CHAPITRE 40

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Elaïa

Une heure plus tôt, Résidence d'Elaïa, Nice,

J'enroule mes cheveux dans une serviette chauffée au préalable quand des coups contre ma porte se font entendre. Je jette un œil à mon portable afin de vérifier que Cam n'a pas essayé de me joindre. Tout ce que je découvre est les quelques messages de Roxie que je refuse d'ouvrir. Je me pince les lèvres, espérant qu'elle ne soit pas venue jusqu'à ma porte pour encore tenter de me convaincre de lui faire confiance, de leur faire confiance à tous les trois. Je décide d'ignorer l'intervention inconnue quand les coups résonnent à nouveau. Je soupire, enfile les premiers vêtements disponibles et me dirige dans mon entrée. Lorsque j'ouvre après une longue inspiration, ce n'est qu'Héctor.

— Bonsoir, mademoiselle Elaïa, je suis navré de vous déranger si tard. On a déposé une petite enveloppe pour vous. On m'a demandé de vous la transmettre en main propre.

— Qui ça « on » ?

— Une femme, elle ne m'a pas donné son nom, désolé, mademoiselle Elaïa.

Je récupère l'enveloppe et le remercie d'un sourire crispé d'avoir fait office de courtier. Je l'observe quitter le couloir avant de refermer la porte. L'enveloppe entre mes doigts, je reste immobile un instant les yeux rivés sur mon prénom écrit en lettre manuscrite sur le dessus.

Ouvre! me hurle ma tête.

Méfie-toi! m'implore mon cœur.

J'effleure les contours du papier et d'un pas robotique, je retourne dans ma chambre. Je délaisse l'enveloppe sur mon lit et comme pour aliéner mes propres pensées, je m'attelle à sécher et coiffer mes cheveux. La longueur tombe sur mes épaules, je constate, une nouvelle fois que j'ai abandonné les soins capillaires. Je choisis de nouer un chignon désordonné sur le haut de mon crâne et soupire face au miroir. Mes yeux se perdent au loin dans le reflet et tombent sur l'enveloppe gisant sur la couette. Je baisse la tête et ferme les yeux, les minutes s'allongent avant que je ne procède à un choix. D'un pas traînant, je me rejoins mon lit et m'y installe en tailleur. Lentement, je rapproche le papier de moi et le sous-pèse. Je pense d'abord à des documents concernant ma mère. Je sais que Laurent, à Nantes, se démène pour trouver quelconques indices sur sa localisation et sa vie. Toutefois, la tension qui s'infuse dans mes muscles depuis qu'Hector m'a transmis cette enveloppe m'envoie tout un autre panel de suppositions. D'une main hésitante, je m'en empare. Je décroche la petite épingle et l'ouvre. Je jette le contenu sur le lit puis découvre la simple lettre.

«Tu sais qui je suis.

Même sans me voir, tu me sens, nuit et jour dans l'ombre.

Tu sais qui je suis.

Je ne ferais toujours partie que de tes cauchemars.»

Mon cœur se ralentit, ma respiration s'éteint petit à petit et le tremblement d'inquiétude se transforme en une colère sourde. Je délaisse la lettre pour le reste du contenu. Photo après photo, mon sang quitte mes organes les uns après les autres. Cinq, dix peut-être à quinze reprises, je les détaille dans l'espoir d'y trouver une erreur.

L'espoir.

Parce que si elles sont aussi réelles qu'elles semblent l'être, alors je me suis rendue sale.

Ma gorge se noue, mon ventre se tord, la douleur semble si violente que je ne la sens même plus. Ma respiration devient irrégulière, mes doigts tapotent contre ma poitrine pendant que les images jaillissent sous mon crâne. Le passé et le présent se percutent. Les photos de Simon dans cette maisonnette délabrée, une femme inerte sur son épaule m'arrachent un haut-le-cœur. Malheureusement, je pourrais les décortiquer une vingtaine de fois supplémentaires, il n'y a aucun espoir à avoir. Ses yeux étaient les bons. J'ai laissé le Marqueur se jouer de moi, encore une fois.

Sous Le Masque Tome 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant