Chapitre 19

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Si sa professeure était agacée, elle n'en montra rien. Bien au contraire elle l'apaisa davantage en la gardant dans ses bras. Elle lui passait la main dans les cheveux, lui murmurait des mots tendres. Elle n'y était pour rien, lui disait-elle. Elle ne pourrait jamais lui en vouloir, lui disait-elle. Pourtant, cette conversation avec Paco lui pesait lourdement sur le moral. Qu'allait-elle pouvoir faire ? Y avait-il seulement quelque chose à faire que ne mette pas en danger Noémie ? La seule solution reposait dans les mots de son camarade. Ce qu'elle devait faire pour que ce secret ne s'ébruite pas. Céder à son chantage. Si elle ne le faisait pas, leurs vies seraient compromises. Si la sienne n'avait pas commencée, elle ne pouvait pas détruire celle de Noémie.

Pourtant, elle la connaissait. Elle savait qu'elle ne resterait pas longtemps silencieuse. Non pas par manque de respect, ni même par curiosité mal placée, seulement par amour. Elle voudrait savoir pour l'aider. Elle voudrait savoir pour ne pas rester les mains liées plus longtemps. S'il y avait quelque chose à faire bien entendu. Une chose à laquelle elle n'aurait pas pensée. Ou bien qu'elle ne pourrait faire seule. Une telle solution ne lui semblait pas possible à imaginer à présent. Tout ce dont son cerveau était capable était de ruminer. De stopper. Profiter des bras accueillants de Noémie. Se sentir coupable. Puis ruminer encore tout ceci savamment orchestré, répété depuis des années. Une danse qu'elle connaissait bien, une danse dont elle ne saurait se mélanger les pinceaux. Une valse mentale qui lui faisait souvent défaut.

Elles n'auraient pas dû se retrouver là. Elles n'auraient pas dû se retrouver seules. Nelly l'avait pourtant appelée car elle était la seule qu'elle voulait voir. La seule à qui elle voulait parler si son cœur se desserrait, si elle parvenait à trouver ses mots. Elle était la seule capable de la retrouver.

Alors elle lui tendit la main. Peu certaine de ce qu'elle allait faire mais Noémie accepta sans peine. Nelly l'avait senti hésiter à s'approcher encore. Il n'était pas nécessaire de la torturer davantage. Elle la voulait ici, près d'elle. Elle souhaitait sentir ses bras autour d'elle, son amour et son cœur battre. Ce son possédait le pouvoir de la rassurer. Nelly se blottit contre son professeur par crainte de la perdre. Cette histoire pourrait causer leur perte. Pour différentes raisons, toutes plus plausibles les unes que les autres. Cette étreinte avait un goût qu'elle n'appréciait qu'à moitié. Partagée entre l'envie irrésistible de la faire sienne, contrariée par leur inévitable éloignement si elle ne réglait pas la situation. Peut-être était-ce le moment de faire ce qu'elle n'osait pas encore concevoir. Peut-être était-il temps de se séparer. Pour leur propre bien être à toutes les deux. Son corps sursautait à cette pensée. Non, il tremblait plutôt. Elle ne supportait pas cette idée. Elle était simplement la plus à même de sauver celle qu'elle aimait et de se sauver elle. Paco n'aurait plus d'emprise sur elle de cette façon.

Mais Noémie prit son visage entre ses mains, elle la regardait avec tellement de compassion et d'affection que ses larmes ne prirent aucun de détour. Elles coulèrent librement sur ses joues une nouvelle fois, incapable de se restreindre, de faire bonne figure pour ne pas l'inquiéter. Pourtant elle sentait que ses peurs reprenaient le dessus sur l'instant de douceur qu'elles partageaient. Un instant d'amour gâché par une ombre qu'elle avait toujours vue arriver. Mais pas de cette façon. Ca, elle ne l'avait pas vu arriver. Elle s'était plutôt imaginer que Noémie en aurait un jour marre d'elle, de cette situation car elle l'obligeait à mentir. Une situation qui les obligeait toutes les deux à mentir, à tricher, à comploter pour ne pas se faire prendre. Cela devait prendre fin tôt ou tard. Bien que préparer, Nelly senti que son âme se déchirait. Plus elle pleurait, plus elle sentait Noémie chercher son regard, essuyer les sillons à mesure qu'ils se déversaient.

— Regarde-moi Nel', quémanda la professeure. S'il te plait.

Nelly darda immédiatement son regard sur elle. Sa voix en parfaite balance entre l'autorité et l'inquiétude. La tendresse avec laquelle elle la cajolait ne pouvait pas mentir sur ses émotions. Elle était là, pour elle. Cette annonce aurait pu la plonger dans une profonde colère. Ou pire, un désarroi assez puissant pour lui faire faire marche arrière toute. Mais elle était là.

Histoire de profOù les histoires vivent. Découvrez maintenant