Chapitre 10

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Suzana


On s'est arrêtés au drive dans un In-N-Out.

Kiara est en train de commander pour nous, je lui ai dit que je ne voulais rien, mais elle a quand même pris mon menu préféré.

Quand je suis parti de chez moi, ma mère m'a lancée un regard noir, mais ne m'a pas adressé un mot. Je suis arrivé dans la voiture de ma meilleure amie en piteux état, elle ne m'a rien dit en me voyant, elle m'a juste pris dans ses bras comme si en me regardant, elle avait déjà tout compris.

Le trajet est terriblement silencieux, donnant l'occasion à mes pensées de me torturer encore une fois de plus.

J'ai besoin d'une maman, de la mienne.

Mon sentiment est ébouriffant et difficile à décrire : je me sens totalement déconnecté de mes émotions, de ma vie.

On a ramassé les brisures de mon cœur pour les culbuter plus ardemment.

— Voilà, tenez pour vous, dit la serveuse en tendant nos sacs. Bon appétit !

Kiara attrape nos sacs en la remerciant et me les tend pour que je puisse les tenir.

Les sacs sont chauds sur mes genoux.

Il fait déjà nuit quand je pose mon pied au sol, je suis Kiara silencieusement jusqu'au seuil de sa porte. Elle a plaqué ses cheveux bouclés en chignon bas, deux mèches ondulées devant et en ressort.

Elle ouvre la porte et me fait signe de la main afin que je la suive.

— Viens Suzana, tu veux te doucher, on mange direct ?

Mes épaules se lèvent, en réalité, ça m'est égal, je ne veux rien faire actuellement.

Elle me regarde avant de me prendre par la main et de me faire monter à l'étage, je crois qu'il n'y a personne, c'est silencieux.

On arrive dans sa chambre, elle pose les sacs sur son bureau, je m'assois en tailleur sur son lit en attendant qu'elle se change.

Ce genre de situation arrive souvent, elle sait que j'ai des problèmes avec ma mère. J'ai l'habitude de venir ici quand ça se passe. Je me sens bien ici.

En me regardant dans le miroir à côté de sa coiffeuse blanche où tout son maquillage y est étalé, mes traits se déforment. Je suis ignoble, mon maquillage a coulé, mon rouge à lèvres est éparpillé partout sur mon visage, et les cernes en dessous de mes yeux qui donnent l'impression que je n'ai pas dormi depuis six mois n'arrangent rien.

Je me tourne vers Kiara qui entre dans la pièce ; elle me sourit et me fait signe de venir, on se précipite en bas, mes yeux se perdent sur les magnifiques courbes de son corps.

Les mots de ma mère qui me crient de prendre sur son corps à elle me reviennent pendant une seconde, je me déteste presque d'envier sa paix et sa tranquillité à elle. Ce qui est totalement faux, car elle aussi se laisse consumer par ses propres démons.

On s'installe sur la table du salon, elle me donne mon menu, mais je n'ai pas envie de manger. Elle a payé pour moi, alors je me force à saisir mes frites et à les avaler. Leurs goûts se rapprochent de l'amertume qui baigne mon palais abondamment.

Elle allume la télé du salon pour faire un bruit de fond et s'assoit sur la chaise en face.

— Tu sais, tu n'es pas obligé de parler, mais si tu veux... je suis là et je ne te jugerai pas, me dit-elle d'une voix douce.

FROZEN HEARTOù les histoires vivent. Découvrez maintenant