Monomanie - Tome I - Rouge passion

Chapitre 23

- Monsieur Alcaraz, quelle bonne surprise de vous voir ici ! lance le majordome à l'entrée de l'immense casino qui domine le front de mer.

- C'est toujours un plaisir, lance nonchalamment Caleb, une main dans la poche, l'autre tenant une cigarette fumante.

Mes yeux ne décrochent pas du sublime et luxueux bâtiment aux immenses colonnes, éclairé par des spots lumineux et gardé par une armée de vigiles.

- Je vous libère votre table habituelle, monsieur ?

- S'il vous plaît.

Caleb aime visiblement arpenter les tables de jeu. Et en y réfléchissant, je l'imagine sans aucun mal en pleine partie de black jack avec une bande de partenaires peu recommandables.

- Après vous princesse, me lance Ambroise en m'invitant à passer devant lui.

Arrivée à l'intérieur, j'ai l'impression d'être entrée dans un film d'époque. Tout est doré, ponctué de touches de velours rouge et de marbre. Le sol arbore un motif graphique sûrement hérité des années Gatsby. Je déambule entre les machines à sous et les grandes tables de jeu, curieuse et fascinée, glissant mon regard par-dessus l'épaule de joueurs en costumes ou en robes de gala. L'ambiance est animée, survoltée et on peut dire, sans se tromper, que l'argent flambe.

Nous nous installons à une table de poker, où une bouteille de champagne nous attend, puis le croupier nous explique rapidement les règles du jeu. Je fais mine de les découvrir mais en réalité, j'y ai déjà joué plus d'une fois avec mon père et son ami Olivier. La stratégie, le bluff, c'est mon point fort. Je suis ici en terrain conquis, cependant je préfère garder ma carte secrète pour moi. 

Le croupier compte nos jetons lorsqu'un jeune homme rejoint notre table.

- Je peux ? me lance-t-il en désignant la chaise vide à côté de la mienne.

C'est un beau métis, élancé, dans les 25 ans, qui me fait penser à un patron d'entreprise avec son élégant costume bordeaux.

- Bien sûr, lui dis-je avec mon plus beau sourire.

En face de nous, à l'autre bout de la table, Caleb nous observe, le regard dur. Ambroise est posté à sa gauche, Dahlia à sa droite. J'entre à présent dans la phase deux de mon plan : le rendre dingue.

Je balaie des yeux mon jeu de cartes. Pas mal... en étant maline je devrais aisément m'en sortir. Je me tourne vers mon voisin et commence à lui chuchoter malicieusement à l'oreille.

- Je ne comprends rien à ce jeu... J'espère que vous serez indulgent avec moi.

Un sourire se dessine sur son visage. Je viens de flairer ma proie.

- Quel est votre prénom ? me demande-t-il.

- Iris.

- Magnifique. Moi c'est Abel.

- Enchantée Abel, dis-je d'une voix séductrice.

Au fil de la partie, je ne cesse de flirter avec mon partenaire, je rigole aux éclats, me rapproche de lui, pose ma main sur la sienne plus d'une fois. On me sert une bonne quantité de Martinis que j'enfile les uns après les autres. Je me surprends à être douée dans ce rôle de provocatrice insolente. Sûrement parce que j'ai plus que jamais besoin de goûter aux délices de la vengeance.

En face de moi, Caleb bouillonne, tremblant carrément de rage. Il parvient à peine à se contrôler. Je jubile et ne le cache pas, allant jusqu'à planter mon regard dans le sien avec un sourire satisfait. Je sais, je suis une peste, mais je m'en fous.