Chapitre 18

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Lou

Je respire un bon coup et attrape la poignée avec vivacité afin d'ouvrir aux derniers arrivants. La porte s'ouvre sur deux agents secrets, la chemise déchirée et des tâches de faux sang étalées sur différentes parties de leur corps. Je crois que c'est bien la première fois que je vois un costume d'Halloween aussi sexy. Après avoir reluqué les deux hommes en face de moi, je reprends un air las.

- Vous êtes en retard, dis-je froidement, m'adressant surtout au brun aux yeux verts qui m'observe comme si je lui devais de l'argent.

Je m'écarte de l'entrée pour les laisser entrer, Alex m'enlace doucement et m'embrasse, s'excusant des trois minutes de retard. Non, je ne suis pas dure, je suis pointilleuse sur les horaires, nuance. Il s'en va et me laisse seule avec Matt. Le concerné s'approche doucement de moi, me tape la bise mais s'arrête prêt de mon oreille alors qu'il vient d'embrasser ma deuxième joue.

- Je crois que je préférais ton costume de None misérable à celui-ci...il faisait plus vraie, dit-il en faisant référence à mon déguisement de sorcière chelou.

J'ai fait avec les moyens du bord...

- Je t'ai demandé ton avis ? Demande-je en m'éloignant de lui.

Il commence déjà à me courir sur le haricot...et il n'est là que depuis deux minutes, c'est aberrant.

- Non mais on m'a toujours appris à ne pas mentir, réplique-t-il fièrement avec un sourire de con.

- Ho c'est marrant, moi on m'a toujours dit de foutre les alcooliques dehors ! Je ré-ouvre la porte d'entrée et lui fait signe de mon bras libre de prendre le chemin de la sortie, lui offrant mon sourire le plus faux. Et ne me dis pas que tu n'es pas alcoolique, tu bois depuis le début de l'après-midi, tu as les yeux vitreux et ton parfum est un mélange d'alcool et de sueur, répugnant !

Et c'est reparti, il ne parle plus mais ses yeux me foudroient sur place pour seule réponse. Je garde pieds, je soutiens son regard perçant voulant à tout prix voir quel spectacle ils ont à m'offrir. Le vert de ses iris est très brillant malgré l'obscurité de l'entrée. On dirait qu'il ne cherche qu'à me prévenir d'un danger proche ou d'une intense colère, je n'arrive pas vraiment à comprendre. Ses yeux montrent tellement de choses à la fois qu'il est dur pour moi de comprendre vraiment leurs messages. Je pense qu'il est la première personne chez qui je peine à voir la moindre émotion si ce n'est la colère, et c'est frustrant. Il sait que ses yeux m'intéressent bien plus que lui car je me perds souvent dans son regard. Je ne baisse jamais les yeux, le temps m'a appris à affronter ceux des autres, à mes risques et périls.

Je commence à avoir la chaire de poule à cause du froid provenant du palier. Je ferme la porte et adresse une dernière phrase à Matt qui vient de détourner le regard, le faible.

- Ravie que tu ais compris qu'à la moindre connerie, tu te retrouves comme un con à la porte. Alors tiens-toi à carreaux James Bond.

Les rires remplissent la pièce d'une ambiance réconfortante, avoir mes amis avec moi après les jours passés est un très bon remède contre mon humeur maussade. Chacun a un sourire éclatant, les voir dans ces costumes faits ou achetés à la dernière minute est assez marrant. J'aime rassembler les troupes quand le moral de l'un de nous n'est pas au rendez-vous. Aujourd'hui, c'était mon cas et je ne sais pas ce qu'a dit Julie pour les motiver à traverser tout Paris un dimanche soir, mais ils sont tous là. Et ça, c'est cher à mes yeux. Nous pouvons être en sécurité avec de l'argent mais nous sommes heureux avec des amis, ils sont ma richesse.

Je les dévisage discrètement un à un, tentant d'enregistrer leur sourire resplendissant et sincère dans ma mémoire. J'oublie qu'à côté d'Alex, assis sur le canapé, se trouve Matt. Je tombe sur son visage et à ma grande surprise il sourit, il rigole même ! Mais en moins d'une seconde, je ne saurai dire comment, il sent mon regard et tourne sa tête dans ma direction. J'ai l'impression d'apercevoir de la pudeur dans ses yeux, comme s'il n'aimait pas qu'on le regarde trop longtemps. C'est vrai que maintenant que j'y pense, il finit toujours par détourner le regard en premier à chaque fois que nos yeux se défient, comme s'il avait peur qu'ils le trahissent. Pourtant, je ne le regardais même pas dans le blanc des yeux...j'ai à peine eu le temps d'observer ses dents blanches apparaître alors qu'il souriait, qu'il posait déjà son regard dans le mien.

Nos yeux remplaceront nos motsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant