~ Chapitre 74 ~

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SARAH

Je dus finir par m'assoupir car lorsque j'ouvris les yeux, il faisait nuit et un plateau était posé à côté du lit, sur la table de chevet avec un verre de jus de fruit et des onigiris. Même si ils avaient l'air très appétissants, je n'avais pas le cœur à avaler quoi que ce soit. Je restai allongée un moment, pensive lorsqu'on frappa à la porte.

— Sarah chan ! prononça la voix de Jiro.

— Oui !

— Je peux entrer ?

Je me redressai et cachai le tee-shirt sous l'oreiller avant de lui répondre par l'affirmative.

— Tu vas bien ?

Je me contentai d'un hochement de tête approximatif.

L'Oyabun souhaite te voir. C'est notre chef de clan et...

— Et le père de Ren ! terminai-je en me levant.

Je le suivis dans les escaliers et nous descendîmes jusqu'à la porte du bureau du chef de clan Ichinose. Jiro frappa à la porte prudemment et s'annonça. La voix qui résonna derrière la cloison me déclencha un frisson d'angoisse. Je ne savais pas comment allait se dérouler cet entretien, mais je sentais que ma vie en dépendait. S'ils ne me faisaient pas confiance, je savais que ça allait être compliqué pour moi et avec Ren qui n'était pas en capacité de parler...

Je pénétrai dans le bureau derrière Jiro, me tenant mes mains devenues moites.

— Laisse-nous Jiro, merci !

Ce dernier s'inclina, puis fit demi-tour sans un mot et referma la porte derrière lui. J'aperçus dans le coin la pièce Hideoki et mon ventre se serra d'autant plus.

L'Oyabun se leva et contourna son bureau alors que je ne bougeai pas.

— Je crois qu'en occident, on se sert la main, non ? dit-il en me tendant la sienne.

Après hésitation, je la lui serrai. Ses doigts se refermèrent avec fermeté sur les miens quelques secondes, puis il m'invita à m'asseoir.

— Hideoki m'a raconté ce que vous lui avez dit tout à l'heure... commença-t-il.

« Respire, respire », pensais-je, bien que je faisais mon possible pour ne pas pleurer.

— Je suis assez impressionné ! Vous avez poignardé un homme, tué un autre par balle...

Son ton laissait clairement penser qu'il ne croyait pas à ma version de la touriste venue visiter le Japon et se retrouvant mêler à des Yakuzas par le plus grand des hasards. Aussi, je préférai intervenir tout de suite.

— Vous... vous ne me croyez pas, n'est-ce pas ? bredouillai-je en jetant un bref coup d'œil à son second, toujours droit comme un piquet dans l'angle du bureau.

— Mettez-vous à ma place quelques instants, continua-t-il.

— Qu'est-ce que je peux faire pour vous prouver que je ne mens pas ?

Hideoki s'avança.

— J'ai vérifié. Vous êtes bien venu de France avec un visa Working Holiday de un an, j'ai fait des rechercher sur votre famille en France. Votre mère est enseignante en maternelle, votre père est gendarme et il est venu à Nagoya il y a quelques temps, juste après votre voyage à Okinawa. Et il a fait des recherches sur notre clan ! claqua-t-il.

Je me mordis l'intérieur de la lèvre.

— Il avait peur pour moi. Il était au courant pour la clé USB et quand il arrivée à Nagoya, il m'a vu avec Ren et il lui a clairement dit qui... qui il était.

— Ton histoire est un peu bancal... prononça-t-il d'une voix trainante.

Je me mordis l'intérieur de la joue avant de reprendre.

— Je ne sais pas pour qui vous me prenez, je n'ai rien d'une criminelle ou je ne sais quoi d'autre...

— Bien sûr, ricana doucement Hideoki. C'est toujours ce que dit le loup à l'agneau.

— Je pensais que c'était moi l'agneau dans cette histoire et non l'inverse...

— Les loups savent prendre plusieurs formes.

Un long silence se fit où seule ma respiration mal assurée s'agitait.

— Nous vivons dans un monde où il faut savoir se méfier même de la langue la plus chaude et le regard le plus doux, reprit le père de Ren.

Je n'aimais pas ses insinuations, mais je ne répliquai pas. Que pouvais-je dire ? Pas grand-chose.


Onigiri : boulette de riz fourré souvent au saumon, où d'autres choses.

MAFIA BLOOD - Tome 2 ~ IchinoseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant