Chapitre 22 : Trois petits mots

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Louna me regarde avec tendresse. Elle caresse mes cheveux.

- Je suis désolé, je sais que c'est un peu trop tôt... Je...

- Ce n'est pas trop tôt ! Ce sont des sentiments que je ressens aussi. Sinon je ne t'aurais jamais demandé de prendre une décision comme celle que je t'ai demandé, me coupe-t-elle.

Je souris, même si je suis un peu déçue qu'elle n'ait pas dit ces trois petits mots. C'est quand même bizarre, je me sens comme mise à nue et j'ai l'impression qu'elle s'est protégée derrière une phrase.

- C'est ridicule, laissé-je échapper.

- De quoi ? demande-t-elle.

- J'ai envie de t'entendre dire "je t'aime" alors que tu viens de m'expliquer que c'est réciproque mais c'est comme si rien n'était concret avant que tu ne me le dises, expliqué-je.

- J'ai dû mal à le dire, avoue-t-elle.

- Pourtant tu le ressens, alors pourquoi tu hésites ? Si moi je suis prête à mettre ma vie en suspend pour toi et Azraq, pourquoi n'arrive-tu pas à me dire que tu m'aimes ? m'agacé-je.

J'écarte sa main de la mienne et me lève. Je ne veux pas lui mettre la pression mais je ne peux pas faire tant de sacrifices pour quelqu'un qui n'est pas sûre de ses sentiments. Si je m'engage avec elle alors qu'il est possible qu'elle me largue à mi-chemin, je préfère m'éloigner maintenant.

- Je vais sortir prendre l'air, tu peux rester dormir si tu veux, dis-je avant de prendre mon manteau et mon sac et de quitter l'appartement.

Elle n'essaie pas de me retenir. Je commence à marcher, un pied après l'autre. Je regarde le sol sans vraiment savoir où je vais. J'ai l'impression d'être une idiote, que c'est un signe de l'univers. Peut-être que je devrais simplement la quitter. Simplement... Comme si je pouvais éteindre d'un seul souffle mes sentiments.

Je trouve un café ouvert. Je prends un cappuccino et m'assois à une des tables. Je suis seule, avec le serveur. Il est plutôt jeune et sa tête me dis quelque chose. J'essaie de me rappeler mais rien n'y fait. Je finis par abandonner et boire mon café.

- Pauline ? dit le serveur.

- Oui ? On se connait, non ? demandé-je.

- Oui, c'est moi Roby, on a travaillé ensemble il y a quelques années ! dit-il.

- Oh mon dieu ! Ca fait si longtemps ! m'exclamé-je. Comment vas-tu ? continué-je.

- Je peux ? demande-t-il en montrant la chaise en face de moi.

J'acquiesce et il s'assoit.

- Je vais plutôt bien, ça fait quelques mois que je travail ici, en plus de mon boulot de designer, raconte-t-il.

- Ah oui, c'est vrai que tu faisais tes études à l'époque ! me rappelé-je.

- Oui et ben, apparemment, être designer n'était pas la plus brillante de mes idées. Le secteur est complétement bouché et je suis payé par projet... se lamente-t-il. Et toi ?

- Oh rien de bien nouveau, je travaille dans un nouveau restau et ça va plutôt bien à ce niveau-là, expliqué-je.

- A ce niveau-là ? Pourquoi ça ne va pas à un autre niveau ? rigole-t-il.

Je souris tristement. Je n'aurais peut-être pas dû laisser Louna seule. Je laisse échapper un soupir.

- Ce soupir et le fait que tu sois entrain de boire un café à cette heure-ci me dit que quelque chose te tracasse, remarque-t-il.

Je le regarde, j'ai envie de tout lui déballer. Peut-être qu'il peut me donner des conseils après tout.

- Bon d'accord. Je sors avec cette fille et pour la faire courte, elle a un passé un peu compliqué. Son père n'acceptait pas son orientation sexuelle et celle son frère. Son frère a été forcé d'épouser cette femme et ils ont eu un enfant. Bref, il ne veut pas s'en occuper parce qu'il représente tout ce qu'il a subit alors sa sœur, ma copine veut sa garde, mais y a la mère au milieu... Enfin t'as compris, expliqué-je.

- Et tu sais pas si tu veux rester avec cette fille c'est ça ? devine-t-il.

- Bah enfaite, ça fait pas longtemps que je la connais et puis aujourd'hui... hésité-je.

Je regarde mon café. Je suis plus blessée par le comportement de Louna que ce que je pensais.

- Aujourd'hui ? répète-t-il.

- Je lui ai dit que je l'aimais et elle ne me l'a pas dit.

- Aïe... murmure-t-il.

- Elle m'a juste dit que c'était réciproque mais elle n'a pas dit « Je t'aime aussi » tu vois... Tu dois me trouver ridicule... soufflé-je.

- Non pas du tout. Une fois, je suis sorti avec cette fille, j'étais fou d'elle. Je comptais l'épouser et fonder une famille avec elle. Je lui ai dit 100 fois que je l'aimais et elle me l'a dit 1000 fois, alors je pensais que c'était vrai. Un mois après notre anniversaire des 5 ans, elle m'a trompé avec un de ses collègues. Au contraire, la femme que j'ai épousé a longtemps hésité à me dire qu'elle m'aimait. Tu sais des fois, il vaut mieux se méfier des gens qui dise ces mots sans hésité que de ceux qui ont dû mal à le dire. Bien sûr, j'en ai discuté avec ma femme et elle m'a dit qu'elle avait peur qu'au moment où elle le dirait, je partirais. J'ai eu dû mal à le comprendre jusqu'à ce que je me rende compte que chacun a son expérience et son rythme. Peut-être que ta copine à besoin de temps, dit-il.

Je me sens comme apaisée par ses mots. C'est exactement ce que j'avais besoin d'entendre.

- Tu as totalement raison ! m'exclamé-je. Je te laisse mon café, lancé-je avant de me lever.

- Tu as facebook ? demande-t-il.

- Oui ! Envoie-moi un message ! dis-je avant de quitter le commerce.

Je fonce vers mon appart', déterminée a enfin donner une réponse à Louna.

Le grain de sucre (GXG)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant