L'un des éléments les plus problématiques, si ce n'est le plus problématique à mes yeux tout du moins, est la nécessité même que Dieu a à se révéler à ses créatures et à exiger qu'un culte lui soit rendu. Le créateur de toutes choses, des milliards et milliards de galaxies, de l'infiniment grand comme de l'infiniment petit, du visible et de l'invisible, de l'énergie et de la matière, du bien et du mal, de la chair et de l'âme, de tous les atomes de l'univers, du temps, de l'espace, des autres dimensions que nous ne soupçonnons pas, ce créateur ressentirait le besoin, la nécessité, de révéler son existence et surtout des règles de comportement à ses créatures. Je parle bien de besoin et de nécessité car cela nous fait entrer dans une antinomie : Dieu ne peut être soumis à la nécessité car il est tout puissant, mais paradoxalement tout ce que Dieu fait est nécessaire puisqu'il est Dieu et qu'il est créateur de tout, sa nécessité fait la réalité. Dans un tel paradigme il faut donc comprendre que Dieu nous aurait créés nécessairement pour le vénérer. Cette affirmation en soi n'a pas de sens.
Mais à titre personnel, sur le sujet de la vénération, ce n'est pas la réflexion qui m'a le plus éloigné de l'idée d'un Dieu créateur révélé. Ma réflexion à ce sujet est plus pragmatique. Dieu est parfait, véritablement parfait, et il est en quelque sorte notre père à tous. Dans sa perfection il nous fait parvenir des messages nous indiquant comment nous comporter, comment bien lui obéir en tout au point que toute notre vie, nos actions et nos pensées sont affectées par les règles qu'Il nous a données. En tant que père moi-même, bien qu'une paternité humaine ne puisse être que bien peu de chose face à la « paternité » divine dans un paradigme religieux, je ne comprends pas cette façon de faire. Quand on fait des enfants dans un cadre aimant (or Dieu est supposé être amour) on ne les élève pas pour devenir exclusivement de bons automates obéissants, on les laisse se tromper, faire leurs propres expériences et même bien souvent prendre des chemins imprévus en s'éloignant de la manière de voir les choses qu'on estime la plus juste et la plus adaptée pour eux. On n'est pas maître de leurs destinées, de leurs pensées, de leurs actions et pourtant cela n'altère en rien l'amour qu'on peut leur porter. Ce n'est pas parce qu'ils ne reflètent pas notre volonté exclusive qu'on les blâme, qu'on les punit et qu'ils doivent être soumis à notre vindicte. Comment alors expliquer qu'une créature faible et faillible comme l'être humain se montre plus bonne, compréhensive, aimante et tolérante qu'un dieu parfait avec le fruit de sa création. Nous aimons mieux nos enfants que Dieu ne nous aime, car dans le besoin de vénération qu'il nous impose Dieu se montre incompréhensif, rancunier et vindicatif.
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