𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟗

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Vancouver, Canada

Aylin

Mon corps entier me fait souffrir, il est tout ankylosé, chaque mouvement est une torture. Une douleur affreuse pulse dans mon crâne. Chacune de mes cellules est en feu, pourtant, un seul endroit de mon anatomie prédomine tous les autres.

Mes yeux.

Ils me brûlent, me démangent, c'est comme si on avait braqué un énorme projecteur, droit sur mes yeux. Je ne vois que du blanc, des points lumineux qui me transpercent la rétine alors même que mes paupières sont closes. Quel insupportable supplice, j'en arrive à avoir l'envie de mourir tant c'est atroce. Il faut que quelqu'un m'enlève ça et vite. Ou alors je vais me les arracher pour ne plus avoir à supporter ce calvaire.

Des bribes de conversation me parviennent, cependant, je n'arrive pas encore à décrypter leurs contenus. Où suis-je bon sang ? Je me sens complètement à la ramasse, perdue au milieu de toutes mes interrogations. Une odeur étrange me prend au narine, ce qui est sûr c'est que je ne suis pas dans mon lit.

Qu'ai-je fait pour mériter ça ? La douleur, de plus en plus forte, m'empêche d'ouvrir les yeux. L'impression que ça va empirer si je le fais me consume. Soudain, je sens quelque chose s'insérer dans mon bras et tout à coup, je n'ai plus autant envie d'ouvrir mes paupières. Elles deviennent bien trop lourdes. Tout devient flou et se mélange dans ma tête. Mes pensées sont embrumées. Les bruits deviennent sourds. Sans même m'en rendre compte, je sombre dans les profondeurs de la fatigue. Les ténèbres m'engloutissent, et, pour une fois, j'en suis heureuse.

Cependant, la seconde d'après, j'entends des bips un peu partout autour de moi. J'essaye à nouveau d'ouvrir les yeux, mais cette fois, une force étrange m'empêche de le faire. Comme si mes paupières étaient collées. Mes muscles me font moins souffrir qu'avant, j'ai la sensation d'avoir récupéré de l'énergie. Alors j'essaye de bouger mes doigts, j'y arrive, certes, faiblement, mais j'y parviens.

Un flash m'apparait brusquement dans la tête. Suivie de plusieurs autres. Je commence petit à petit à me rappeler. Aucune souffrance précédente n'égale celle que je ressens en comprenant.

Non. Non. Non. Non. Non.

Ce n'est pas possible, on devait juste rentrer d'une fête, Alya n'avait même pas beaucoup bu, elle me l'a dit. Mais comment ? Pourquoi ? J'essaye de forcer sur ma mémoire afin de me souvenir de ces quelques instants, ceux juste avant l'impact de notre voiture sur la barrière. Je tente de me rappeler ce qui a causé notre déviation de la route.

D'un seul coup, comme propulsé à nouveau sur la scène, tout défile devant mes yeux. Je les revois. Le motard ainsi que le phare éblouissant de sa moto. Il fonce droit sur nous, cependant, Alya parvient à l'esquiver juste à temps. Sauf qu'en l'évitant, c'est nous qui entrons en collision dans une barrière de séparation. Après ça, c'est le trou noir complet. Je ne sais pas comment j'ai atterri dans cet hôpital.

Comme pour répondre à mes interrogations silencieuses, j'entends soudain mon père qui entre avec un médecin. Ils parlent de moi. Sans savoir ce qui me prend, je fais semblant de dormir, je ne bouge plus d'un poil, j'arrête même de respirer. Je suis trop absorbé par leur discussion.

— Alors, vous avez enfin des bonnes nouvelles à nous annoncer ? demande mon père d'un ton bourru.

Un silence gênant s'installe pour seule réponse. Mon père est aussi strict qu'autoritaire. Quand il veut quelque chose, il doit l'obtenir, sinon, il entre dans une rage folle. Personne n'aimerait avoir à supporter ses crises d'égo.

— Monsieur Yildiz, pour l'instant, je ne peux pas m'avancer, déclare le médecin avec calme. Émettre un diagnostic maintenant serait une erreur. Certes la vie de votre fille n'est pas en danger, mais pour ce qui est de ses autres séquelles, je ne pourrais me prononcer qu'une fois qu'elle se sera réveillée.

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