Chapitre 6 - Hésitation

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Assise tranquillement et profitant de son café, une femme regardait la foule, sans y porter de plus d'intérêt que nécessaire. Alors qu'elle guidait la tasse à sa bouche, elle stoppa son geste. Un trio apparaissait devant elle et deux d'entre eux, lui semblaient familiers.

Presque dans la précipitation, elle engloutit sa boisson, se leva et sans laisser le temps au serveur de lui donner l'addition, elle déposa un billet sur le comptoir.

– Gardez la monnaie, lança-t-elle déjà arrivée à la porte.

À bonne distance, elle les suivit. Trop loin, Selena se retrouvait privée de leur échange. En ville pour des achats d'appoint seulement, elle se retrouva à passer sa journée à espionner la petite famille. Sachant qu'elle n'allait pas tarder à perdre leur trace, elle n'eut qu'à siffler pour qu'un oiseau vienne se poser sur mon bras, devant les passants qui pour certains, étaient étonnés.

– Ne les lâche pas d'une semelle.

« Les cibles » désignées, le volatile émit un léger cri et se remit à battre des ailes. Les plans étant chamboulés par cet imprévu, Selena décida de prolonger son séjour et réserva une chambre d'hôtel. Dans la soirée, alors qu'elle profitait calmement de son dîner, elle entendit des coups à la fenêtre. L'oiseau cognait contre le verre, à l'aide de son bec. La femme lui ouvrit et il lui fit comprendre qu'il avait trouvé où ils habitaient. Cette nuit, il la mena donc jusqu'à la demeure.

– Eh bien, j'espère qu'avec ça, il lui offre une vie confortable.

– Tu les connais ?

L'oiseau, s'installa sur l'épaule de sa maîtresse et curieux quant aux intentions de la femme, il n'avait pas hésité à l'interroger.

– Je n'en suis pas certaine. J'ai besoin de quelques jours pour m'en assurer. Tu peux rentrer.

– Que vas-tu faire ?

– Vérifier qu'il s'agit bien de mon imbécile de mari. Ça fait trop longtemps que j'attends de régler mes comptes avec lui.

Au préalable, Selena mena sa petite enquête. Étrangement, elle ne trouva rien. Aucun document accessible concernant le terrain sur lequel ils se situaient, le véhicule de l'homme ou tout autre élément le touchant lui ainsi que la plus jeune.

Lasse d'enquêter dans le vide, l'apprentie détective décida de déposer une candidature spontanée à l'endroit où travaillait Basile. Dans un premier temps, elle passa un entretien qui s'était très bien déroulé. En revanche, la réponse reçue ne se trouva pas à la hauteur de ses espérances.

Faisant face à un nouveau mur, l'heure de passer à l'étape supérieure arriva ou presque. Se rendre devant la porte de la demeure était aisé, mais sauter le pas et sonner était une autre histoire. Remplie de doutes et d'appréhensions, Selena fit marche arrière. Désespéré du comportement de sa maîtresse, Fulis utilisa sa tête pour appuyer sur le bouton.

La boule au ventre, la femme n'eut d'autre choix que rester et attendre que les habitants daignent lui ouvrir. La montre en main, elle regardait la trotteuse parcourir le cadran. Un premier, un second, un troisième. Temps écoulé.

– Avant l'heure, ce n'est pas l'heure et après l'heure, ce n'est plus l'heure. Allons-nous-en. Je reviendrai la semaine prochaine.

– Cesse donc de jouer à l'enfant. Il faudra se jeter dans le bain tôt ou tard. Ça ne te ressemble pas. Tu es si déterminée et pourtant effrayée.

– Mets-toi à ma place. Depuis qu'il est parti, nous n'avons plus eu le moindre contact. Je crains de faire face à une fille qui me déteste pour une raison infondée. L'esprit d'un enfant est si facilement manipulable.

– Tu n'as aucun moyen de savoir du moment que tu ne poses pas un pied dans le plat.

Deux jours passèrent et un matin dès le réveil, Fulis découvrit sa maîtresse habillée et visiblement déterminée à aller jusqu'au bout. Sans décrocher un mot, il s'envola par la fenêtre  ouverte et la suivit. Tout se déroulait bien, jusqu'au moment, où Selena bifurqua dans une rue, s'éloignant par conséquent, de sa destination. Pour autant, l'oiseau sentait que cette décision soudaine ne relevait pas du  hasard. Les pas rapides de l'adulte, rattrapaient ceux de la jeune femme, qui avait plus l'air de se promener, que d'aller en cours.

Intéressant, pensa Fulis. Curieux d'entendre les propos, il s'approcha et s'improvisa funambule, sur les clôtures du voisinage, toujours en suivant ses cibles.

- Excuse moi ! lança Selena.

Retirant ses écouteurs et baissant sa capuche, Malori se tourna.

– Oui ?

– Tu es Malori Rosset ?

– Aux dernières nouvelles, oui. Et vous êtes ?

– Officiellement, je suis Selena Rosset, mais plus important, je suis ta mère. Je peux te le prouver en te disant que ta date de naissance a été gravée sur l'alliance de ton père, ainsi que la mienne.

– Vu notre ressemblance, j'ai bien envie de vous croire, mais...

– Que veux-tu savoir ?

– Tout. Pourquoi ne plus être ensemble tous les deux ? La seule fois où je lui ai posé une question sur notre famille, il s'est énervé et a crié à en faire trembler les murs de la maison.

– Je n'ai pas plus d'informations à ce sujet. Un soir, je suis rentrée à la demeure et je l'ai retrouvée vide. La plupart de vos affaires avaient disparu.

– Vu le type qu'est mon père, je veux bien croire qu'il ait été capable d'une chose du genre.

Pendant une bonne partie de la matinée, les deux femmes échangèrent autour d'une table. Selena répondait aux questions que lui posait sa fille et vice-versa. Toujours en pleine discussion, le téléphone de Malori sonna. Voyant le nom de son contact, elle souffla et s'excusa auprès de sa mère.

– Oui ?

– Pourquoi tu n'es pas à l'école ? J'ai reçu un message d'absence. Tu ne t'es pas rendue à un seul cours de toute la matinée.

Flemme.

– Tu vas te ressaisir, jeune fille. Ce soir, nous aurons une discussion.

– Écoute, je n'ai pas le temps de te parler. Attends que l'on soit à la maison pour me réprimander, je n'ai pas envie d'avoir deux épisodes en une journée.

- Nous reprendrons plus tard.

Déchéances T1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant