Chapitre 12

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Zeline

Pas faute d'avoir essayé de cuisiner, j'ai foiré tous mes repas, tous les soirs de la semaine. Pourquoi ? Pour plusieurs raisons, la première parce que je serais capable de cramer des pâtes dans une casserole d'eau froide tant je suis nulle, la deuxième parce que j'avais Keran dans la même pièce que moi.

Précision : Keran, torse nu, tenir sur un tapis de course pendant une heure, là où moi, je serais fatiguée juste de le mettre en route.

La vie est injuste. Je veux faire attention à ce que je mange, ne pas prendre un gramme faute de pouvoir perdre du poids, et lui, a un corps de rêve.

Même le midi, je fais des efforts. Sur le plan humain, désormais, j'arrive à échanger plus de deux mots avec Leoni, le cuisinier du food-truck Italien, il sait que je suis là pour au minimum, une année et que je n'avais pas particulièrement choisi de m'échouer ici. J'ai appris qu'il est venu s'installer aux États-Unis avec sa famille quand il avait à peine 2 ans, et que ses parents ont un restaurant dans le nord de Manhattan. Sur le plan culinaire, quelques fois, j'abandonne ses pâtes pour ses salades... assaisonnées de vinaigrettes aux noix et agrémentées de parmesan et de jambon cru, mais la verdure ça compte non ?

Et enfin, le vendredi je saute le pas et me décide à demander de l'aide à Leoni :

— Tu fais quoi ce soir ?

Parfois, ma bouche dit des trucs sans que je sois consentante. Je me sens rougir de ma bêtise.

— C'est une proposition de rendez-vous ? parce que...

Il sort une chaine de dessous son T-shirt au bout de laquelle un anneau doré se balance. Leoni est marié.

— Non ! non ! non ! c'est pas un rencard. Je... je... laisse tomber c'est stupide.

Il se penche par-dessus son comptoir :

— Si tu veux ta part de rizotto, il va falloir que tu ailles jusqu'au bout de tes pensées.

— Je voudrais que tu m'apprennes à cuisiner.

Ses yeux noirs s'agrandissent de surprise avant qu'il parte en fou-rire.

— Tu vois que c'est stupide ! Tu ris.

— J'ai surtout peur de perdre ma meilleure cliente si je lui apprends à cuisiner.

— Aucune chance. Tu parles à quelqu'un dont le niveau culinaire s'arrête à faire des sandwichs au beurre de cacahuète.

— J'ai du mal à y croire.

— Si tu me voyais dans une cuisine, tu partirais en courant.

Alors qu'il plisse les yeux sur moi certainement pour jauger ma fiabilité, je prie intérieurement pour qu'il accepte.

— Ok, finit-il par lâcher. Laisse-moi ton numéro, je t'appelle plus tard.

Et c'est ainsi que je me suis retrouvée dans un supermarché avec un texto en guise de liste de course et une demi-heure plus tard dans la cuisine de Keran avec Leoni en facetime en direct de la sienne.

Au programme : des lasagnes.

Autrement dit, utiliser une casserole et ensuite le four. Je tremble déjà. Et je pleure aussi à cause de l'oignon. Il me faut 5 minutes pour l'éplucher et tout autant pour le couper. Note pour plus tard : glaner une astuce sur le net.

Ce qui devait être un cours rapide, s'éternise. Je mets un temps fou à concasser les tomates, je m'ébouillante, me coupe, rage de ne pas réussir à enlever la peau aussi facilement que Leoni. Lorsque j'entends sa femme s'impatienter que le repas n'est pas prêt, je propose :

The Shadow Of Your HeartOù les histoires vivent. Découvrez maintenant