The Shadow Of Your Heart

Chapitre 21

Keran

J'ai mal dormi. Un peu comme toutes les nuits de ces dernières semaines. J'ai imaginé différentes suites à ce qui aurait pu se passer si je n'avais pas mis fin à notre rapprochement dans le club. Même là encore dans la cuisine, si je ferme les yeux, je peux sentir le goût salé et le grain de sa peau sous mes lèvres. Il m'a fallu une force surhumaine pour me détacher d'elle. J'avais peur qu'on nous surprenne, j'avais peur de ne plus pouvoir m'arrêter.

Putain Keran, tu deviens dingue.

Je jette un coup d'œil à mon téléphone. Zeline n'a toujours pas répondu au dernier message que je lui ai envoyé lorsqu'elle est rentrée cette nuit.

[Je n'aurais pas dû]

Pourtant, je sais qu'elle l'a lu. Pour preuve, le « lu » dessous ma bulle. Je voulais qu'elle me demande : quoi.

De l'avoir presque embrassée ? de lui avoir dit que ça m'était égale qu'elle finisse dans le lit d'un inconnu ? de m'être arrêté...

Je voulais encore la provoquer. Mais qui sait jusqu'où ça ira la prochaine fois... Et finalement, je me demande si ça n'est pas mieux ainsi. Qu'elle me voit comme un connard, qu'elle me déteste.

— Salut, dit-elle froidement.

Ma trachée se resserre. Je relève les yeux vers elle. Alors que je m'attendais à la voir en t-shirt, jean, tenue propre à ses week-ends, elle porte une combinaison bleue électrique.

— Tu es habillée.

Elle fronce les sourcils et riposte :

— Bien sûr, tu t'attendais à ce que j'aille récupérer Liam à l'aéroport en pyjama ?!

Je m'attendais juste à ce que tu sois habillée normalement pour lui. Je prends une grande inspiration et avoue :

— Tu es très belle.

Ses traits se durcissent d'avantage. Je ne sais pas si c'est à cause de la couleur de sa tenue ou son humeur massacrante, mais ses iris semblent avoir pris une nuance plus foncée. C'est désarçonnant. Je reprends, en lui tendant une assiette :

— J'ai fait des pancakes, il y a aussi des œufs, du bacon ou des fruits si tu veux.

— C'est quoi l'embrouille, Keran ?

Je soupire et plaque mes mains sur le plan de travail devant moi. Je dois être convainquant. Aussi bien pour elle, que pour me persuader moi-même de ce que je vais dire.

— Il n'y en a pas. Je n'ai pas envie de gâcher cette journée. C'est la première fois que Liam vient ici, alors autant que tout soit parfait.

— J'ai du mal à te croire.

Ouai. Mais si je lui disais que je n'ai aucune envie qu'il soit seul avec elle, ça sonnerait aussi tordu.

— Tu as du mal à croire quoi ? que Liam n'a jamais pris la peine de venir me voir à moi ou que tout doit être parfait ?

Je jurerais l'avoir vu tressauter un instant. Je continue avec une lassitude non dissimulée :

— Si Liam rapporte à nos parents que notre cohabitation se passe mal, tu peux être certaine que papa rappliquera dans les jours qui suivent.

— Et ni toi, ni moi, ne voulons que ça se passe ainsi.

J'acquiesce. C'est ça. Même si je me demande si ça ne pourrait pas lui être profitable. Après tout, il suffirait qu'elle lui propose de lui trouver un appartement. Avec le recul, je pense qu'il nous a imposé cette cohabitation juste pour l'empêcher de suivre son stage dans une autre boîte que l'entreprise familiale.