Chapitre 17

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Zeline

Sa phrase résonne encore dans ma tête quand je passe les portes de ma chambre. Je m'enferme à double tour. Je tremble, j'ai la nausée, une terrible envie de hurler. Mais une petite voix tout au fond de moi me raisonne. Elle me force à ne pas croire un mot de ce qu'il a dit.

« Pour hériter de l'entreprise familiale, je serai prêt à tout. Même à faire semblant de t'apprécier ».

Je refuse de croire qu'il n'y a que son héritage qui compte. Comment peut-il passer du gars sympa, agréable, drôle à ce type abject ? Qu'importe ce qu'il peut avancer, ce qu'il s'est passé ce week-end et ce soir, ça n'était pas du bluff.

Voilà Zel, respire. Ne regarde pas l'écran explosé de ton téléphone, ça ne le fera pas revenir à la vie ! Cherche quelque chose de positif... Maman ne pourra pas me harceler ? Keran ne pourra plus me pister ?

Ça ne fonctionne pas. Même s'il ne pensait pas un mot de ce qu'il a dit, l'intention de me blesser était là. Alors quoi ? Est-ce que c'est ce coup de fil avec Liam qui l'a mis dans cet état ? Du plus loin que je me souvienne, il n'a jamais désiré lier quoi que ce soit avec lui. Sentiment entièrement partagé par Liam d'ailleurs. L'indifférence de Keran à mon égard, a nourri son rejet pour lui.

Je me débarrasse de mon téléphone et attrape mon ordinateur. Je m'installe dans mon lit et envoie rapidement un mail à Liam pour l'informer que mon téléphone m'a lâché. Je devrais lui dire de reporter sa visite, pour apaiser les choses, mais ça lui donnerait davantage prétexte à venir. Même s'il dit que c'est pour passer du temps avec moi, je ne peux m'empêcher de penser que c'est aussi pour s'assurer que je vais bien. Est-ce que c'est le cas ? Avant son appel, j'aurais pu imaginer qu'être à New-York n'était finalement pas si terrible. Mais en réalité rien a changé. Keran est toujours aussi con !

Retour à la case départ. Entre ces quatre murs ? Dans cette chambre trop parfaite avec vue imprenable sur la ville ?

Hors de question, je ne me laisserai pas faire. Je me change en vitesse. J'enfile un jean, un gros pull et attrape mon sac à mains et mon nouvel appareil photo. Je sors de la chambre plus que déterminée.

Sitôt en bas des marches, Keran m'accueille d'un regard circonspect. Je l'ignore, tout sourire et poursuit ma route jusqu'à l'entrée.

— Tu sors ? demande-t-il à ma suite.

J'enfile mes chaussures tout en répondant d'un ton complètement désinvolte :

— Je vais manger un bout dehors.

— J'avais préparé la ratatouille.

Mes converses à moitié attachées je tourne la tête dans sa direction. Et donc ? Il s'attendait à quoi ? Que je descendrais dresser la table et qu'on continuerait à papoter tricot ? Au lieu de m'énerver, j'avance simplement :

— Je suis certaine qu'elle sera encore meilleure demain midi. Tu dois bien avoir de quoi me faire une lunch box dans ton appartement ?

Lacés noués, je me redresse. Il a l'air... en colère.

— Je ne pourrais pas te localiser.

Il fallait certainement y penser avant de casser mon téléphone ! Je prends une grande inspiration.

— Tu veux te joindre à moi ? demandé-je avec innocence. Au moins, tu sauras où je vais...

Ses mâchoires se tendent, et alors que je m'attends à ce qu'il réplique, qu'il explose, qu'il se jette sur moi... il tourne les talons et lâche :

The Shadow Of Your HeartOù les histoires vivent. Découvrez maintenant