X - Utopie

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   Du soleil émanait de doux rayons dorés, dont les reflets prenaient une teinte chromée. Cette fine lumière, passant à travers les nuages, se métamorphosait alors en un somptueux or rosé. Quant à lui, le ciel était peint d'un dégradé de bleu saphir virant vers le rouge écarlate. Et ce magnifique paysage s'étendait à perte de vue, sur des kilomètres et des kilomètres, dans toutes les directions possibles.

   Pierre se réveilla calmement, ouvrit délicatement les paupières et vit Charles en face de lui, toujours plongé dans son sommeil. Le pilote se redressa et tourna la tête pour contempler la vue à travers le hublot du jet. Il n'en croyait pas ses yeux : cette scène était tout bonnement irréaliste tellement elle était belle. Le Français déposa sa tête contre la vitre et observa attentivement son ami dormir : il le trouvait encore plus mignon lorsqu'il se reposait, baignant dans la lumière du soleil levant.

   Après quelques minutes à le contempler, le Monégasque finit par sortir de son sommeil. Pierre détourna immédiatement son regard pour ne pas que son ami ne le surprenne en train de le fixer intensément. Charles, à peine réveillé, se leva et alla récupérer une vieille boîte d'échecs qu'il déposa sur la table qui séparait les sièges des deux pilotes. Il lança un regard furtif à Pierre qui comprit immédiatement que son camarade voulait faire une partie. Il hocha la tête de haut en bas et ouvrit la boîte pour laisser apparaître les pièces éparpillées. Celles-ci étaient faites d'un bois ancien et recouvertes d'une épaisse couche de vernis transparent qui n'avait apparemment pas réussi à les protéger des chocs et frottements ainsi que du temps. Pierre récupéra les pièces blanches faites d'érable, tandis que Charles prit les noires en ébène. Ils les déposèrent soigneusement sur l'échiquier et engagèrent la partie.

   Coups après coups, les pions, cavaliers, tours, fous et dames se faisaient de plus en plus rares sur le plateau de jeu. Mais après plus d'une heure à jouer, c'est finalement Pierre qui réussit à faire tomber le roi adversaire. La défaite en tête, Charles baissa son regard, et d'un mouvement bref, il projeta l'échiquier dans les airs. Pierre fut surpris d'une telle réaction de la part de son camarade de course, lui qui était généralement bon perdant bien qu'il soit souvent déçu de ses capacités. Le Français, ne comprenant pas ces gestes, resta immobile à se poser mille et une questions. Sur le point de demander la raison de cet agissement, Pierre resta muet en voyant Charles se lever en sa direction. À cet instant, la lumière du soleil traversant la vitre du hublot atterrit sur le doux visage du pilote et se refléta dans ses yeux qui s'illuminèrent. Il tendit la main et Pierre la lui serra. D'un coup sec, il tira le Français hors de son siège. Les deux hommes se retrouvèrent alors face à face, très proches l'un de l'autre et se tenant toujours par la main. Charles laissa tomber sa tête en avant pour coller son front contre celui de Pierre. Très troublé, le Français se laissa porter par les mouvements de l'autre pilote, appréciant le moment présent. Charles rapprocha lentement ses lèvres de celles de Pierre, jusqu'à ce que celles-ci rentrent en contact. Après seulement une seconde, il se recula et regarda son ami, pensant qu'il s'agissait d'une mauvaise idée. Mais le Français y retourna sans broncher : Charles se laissa guider, profitant du baiser et comprenant que Pierre l'aimait autant que lui l'aimait. Les deux pilotes se séparèrent, le souffle coupé par leur long embrassement.

   C'est alors que l'horizon se transforma brutalement et laissa place à de sombres nuages et à de l'orage, effrayant au passage Pierre, qui alla se réfugier dans les bras de Charles. Le Français ferma de toutes ses forces ses yeux, espérant que ce scénario se finisse au plus vite. Mais lorsque celui-ci rouvrit les yeux, il constata qu'il se trouvait désormais dans son fauteuil. Il regarda alors par la fenêtre et aperçut un large soleil dominant le ciel, et pas la moindre trace d'un quelconque éclair ou du grondement de la foudre. Le pilote referma les yeux, déçu que tout ce qui s'était passé ne soit qu'illusion, et espérant pouvoir se rendormir et continuer son rêve...

𝑇ℎ𝑒 𝑅𝑎𝑐𝑒 𝑂𝑓 𝐿𝑜𝑣𝑒 ~ 𝑃𝑖𝑎𝑟𝑙𝑒𝑠Où les histoires vivent. Découvrez maintenant