L'oiseau de l'Ombre

Chapitre 22

Le soleil commence sa lente descente derrière l'horizon tandis que la lune s'élève pour le remplacer. Le ciel se teinte de lueurs orangées à rouges. Quelques nuages épars s'illuminent de reflets dorés avec les rayons du soleil couchant. Les montagnes enneigées se parent alors de magnifique couleur chaude. Je reste sans voix devant la beauté du paysage que m'offre la nature. Tandis que je contemple la vue, des pas légers trouble le silence du moment. Je devine que c'est Takeshi qui s'approche. Dans un froissement de vêtements à peine audible, il s'assoit à mes côtés. Je me sens bien près de lui. J'ai enfin l'impression d'être en sécurité après ses mois de cavale. Mon corps se détend et tous mes muscles se relâchent. Un long soupir s'échappe malgré moi de ma bouche. Je sens son regard se porter sur moi, je tourne alors la tête dans sa direction. Ses yeux vert sapin me fixent, ils sont remplis de gentillesse. Naturellement son bras vient se poser sur mes épaules et je sursaute légèrement à son contact. Mais finalement, je finis par poser ma tête sur son épaule. Cela fait tellement de bien d'avoir quelqu'un sur qui se reposer, même si cela ne dure qu'un instant. Je ne suis plus seule. À cette pensée, mon cœur bat un peu plus fort. Je ne peux empêcher des larmes s'échapper de mes yeux. J'attendais depuis si longtemps de ressentir ce sentiment. Je ne suis donc pas la dernière de mon espèce. Un profond soulagement m'envahit. Takeshi sert un peu plus sa main sur mon épaule, certainement pour me donner un peu de courage.

- Merci pour tout, dis-je dans un murmure à peine audible.

Il ne me répond pas, mais je sais qu'il a entendu. J'imagine qu'il ne veut pas rompre ce moment magique.
Nous restons ainsi jusqu'à ce que le soleil finisse par disparaître derrière l'horizon. Finalement, l'homme se lève sans un bruit et retourne vers l'entrée de la grotte en lançant :

- Aller rentrons, la nuit va être froide et nous devons nous reposer. Demain, nous prendrons la route en direction du village.

Le village ? Après tout ce temps, je vais enfin pouvoir le découvrir ! Je me lève précipitamment, manquant de justesse de m'étaler face contre terre dans la neige. Je l'entends ricaner non loin. Ce n'est pas gentil de se moquer, j'aurai pu me faire mal ! Je finis par le suivre en faisant plus attention cette fois-ci. J'entre dans la grotte juste après lui. Mes yeux s'habituent rapidement à la faible lueur que dégage le feu. Il ne reste plus que des braises qui crépitent doucement. Takeshi s'accroupit près du foyer puis remue les cendres avant de mettre de nouvelles branches dessus. Les flammes, d'abord très faibles, s'intensifient au fur et à mesure. Après quelques instants à observer le feu danser, je m'approche finalement et m'assied à ses côtés. Toujours dans le silence, il attrape son sac puis en sort de la viande séché, du fromage, une galette de céréales ainsi qu'une petite casserole. Il se lève et par la suite se dirige vers la sortie. L'homme aux yeux verts sapin fini par revenir quelques minutes plus tard, sa casserole pleine de neige entre ses mains. Il la dépose sur le feu afin de faire fondre son contenu. J'ai tellement de questions à lui poser concernant le village, mais je n'ose pas rompre ce silence. Combien sont-ils ? Est-il loin d'ici ? Comment la vie s'organise-t-elle là-bas ? Je suis vraiment impatiente de découvrir à quoi cela ressemble. J'avais une vague idée grâce à l'image sur le parchemin, mais est-ce réellement représentatif de la réalité ? Je le saurai bien assez vite !

Nous finissons de manger en silence. Takeshi range sa casserole puis se couche près du feu sous une grosse couverture en laine grise. Je l'imite et m'allonge de l'autre côté du foyer. J'ai une boule d'angoisse dans l'estomac en pensant à demain. Comment vont réagir les autres ? Vais-je bien être accueilli ? Va-t-on m'accepter ? Les questions se bousculent dans la tête m'empêchant de trouver le sommeil. Alors que je me retourne une énième fois sous ma couverture, le ronflement de Takeshi me fait sursauter. Eh bien, il n'a pas mis longtemps à sombrer dans le sommeil. Je l'envie un peu, j'aurais aimé m'endormir aussi rapidement. J'écoute le son de sa respiration et fini par rejoindre le pays de rêve bercé par son souffle lent.