Diane a disparu. Depuis quelques jours, le Temple s'active à garder cette disparition secrète. Je redoute le pire. Ma mère sous-entend qu'elle peut avoir été dévorée ... pas maintenant, nous devions partir ensemble. Elle a disparu après sa rencontre avec le Soleil. Je n'ose pas imaginer le pire la concernant. Si elle a réellement été dévorée, il ne restait plus que moi pour régler la situation.
Ma mère m'a informé que depuis quelques mois, le Soleil dévore de plus en plus de jeunes filles. IL semble constamment affamé. Il faut vite trouver une solution. Les nouvelles Prêtresses seront toutes dévorées si on ne trouve pas un moyen de se débarrasser de lui. J'espérais secrètement que Diane ait pu trouver le passage menant à l'extérieur de la cité et trouver refuge au village un peu plus loin. Sans elle, j'imaginais difficilement comment je pourrais régler la situation.
Je préférais ne pas y penser dans l'immédiat. Ce qu'il fallait désormais, c'était trouver une solution. Ma mère me confia quelques objets qu'on glissa dans une sacoche. Je portais une robe et j'espérais que la cape que je portais cacherait ce sac.
« IL devient impatient. Chaque fois qu'IL réclame ta présence, je ...
—Tout va bien aller, Mère. Je vais y aller, et je reviendrais avec une solution.
—Ne reviens pas si tu n'as rien, si c'est pour te mettre plus en danger que maintenant. Plus tu vois cette créature, moins je reconnais des traits humains sur ton visage. J'ai toujours eu peur, depuis ta naissance, que je verrais sur toi SES traits. Mais maintenant que je te contemple, je vois une jeune fille qui me ressemble. Tu perds peu à peu tes traits, à chaque fois que tu vas le voir.
—C'est la dernière fois.
—J'avais peur de haïr ton visage, et tout ton être. À cause de ce qu'il m'avait fait, mais mon amour pour toi est encore plus brûlant.
—Je ne veux pas lui ressembler. Je ne prendrais pas plus de ses traits, je vous le promets. »
Je ne comprenais pas ce qu'elle voulait dire par là, mais je la croyais. Si elle disait que je lui ressemblais de plus en plus, je la croyais.
Je ne voulais plus que le Soleil puisse toucher ni dévorer qui que ce soit, je refusais de le servir un instant de plus. Je refusais de lui offrir cette cité sur un plateau, je refusais que nous le servions un moment de plus. J'étais responsable de tout Solisneir. J'étais responsable de notre rébellion, mais je pourrais revenir avec un moyen de le vaincre. Je pourrais fonder un nouvel ordre, sans cette soumission au Soleil. Je pourrais tout changer. Je deviendrais une Grande Prêtresse différente. Je deviendrais une femme capable de protéger son peuple de toute tentative de destruction. Je deviendrais une femme capable de refuser qu'on influence sur mon corps et sur mon esprit.
Je mis ma cape sur mes épaules. Il faisait nuit. Il fallait que ça se passe cette nuit. Ma mère me prit la main et toutes deux, nous allions devant les Portes. Avant aujourd'hui, je n'avais jamais remarqué à quel point cet endroit ressemblait à une horrible prison.
« Sois prudente, Célia. Et reviens-moi vite.
—Je vous aime, Mère. »
Pour la première fois de sa vie, je la vis souffler et sourire d'un air si bienveillant que son visage se métamorphosa. Elle sembla rajeunir d'un coup et j'appréciais voir cet air sur elle. Je l'avais toujours trouvé effroyablement froide, mais maintenant que je voyais son visage, je me rendis compte qu'elle m'était semblable sur beaucoup de points. Nous avions la même peau métisse, les mêmes cheveux et les mêmes yeux. Je me surpris à apprécier la ressembler.
« Je t'aime aussi Célia. »
Elle s'approcha et baisa mon front :
« Ma pauvre petite fille, que ce que je donnerais pour être à ta place et pouvoir te protéger.
—Ça va aller. C'est moi qu'il veut. »
Elle m'ouvrit les portes. Je pris mon courage pour entrer une nouvelle fois dans cette pièce maudite et dénuée de toute humanité.
La pénombre me parut soudain familière, comme une vieille amie qui vous enlace après une longue absence. Et le Soleil aussi, parut être une présence usuelle à mon esprit abimé par nos rencontres. Je pris une profonde inspiration.
Je savais qu'il aimait se poster derrière moi et il aimait attraper une mèche de mes cheveux. Pourtant, mon regard analysait la pièce dans l'espoir de trouver le passage. Au fond de la pièce, le mur était fissuré. Des plantes y poussaient, et plus important encore, de la lumière s'échappait de cette espace, prouvant ainsi qu'il menait à l'extérieur. Il était là-bas, c'était le passage, c'était par là. C'était mon échappatoire.
Je pris une profonde inspiration et fermait les yeux pour tenter d'ignorer la main de la Créature jouant dans les cheveux. Puis, il était temps, je devais le tenter. J'attrapais le bas de ma robe et je m'élançais en avant. Je courais.
J'entendis le Soleil derrière moi, IL hurlait et poussa un grognement terrible. Je sentis son mouvement pour m'attraper, mais j'étais déjà près du passage. IL était debout, les bras écartés et tendus dans ma direction.
« Re-Viens. Re-Viens, ordonna-t-il. Re-Viens. Re-Viens. Papa. »
Je sentis un sentiment brûlant me prendre à la poitrine. Il se propagea dans tout mon corps et je me sentis vibrer comme le Soleil :
« Tu n'es pas mon père ! »
Je me tournais vers le passage et la forêt de sapins géants. Je courrais dans cette direction, vers une liberté incertaine. Derrière moi, le Soleil hurlait de colère. Pourtant, je devais y aller. Nous ne devions plus l'accepter.
La forêt m'accueillit dans un silence bienveillant. Je ne voulais pas m'arrêter avant d'être sûre que le Soleil ne pouvait plus tendre sa main géante et informe pour m'attraper. Je n'osais pas me retourner pour voir ce passage noir et béant, qui retenait ma peur la plus profonde.
Je finis m'arrêter après un moment, complètement essoufflée et hors d'haleine. Quand je me retournais, il n'y avait que des arbres derrière moi. La forêt n'était pas sombre, l'épaisse lueur de la lune tombait sur les bois et sur moi. Je finis par éclater de rire, soulagée d'avoir échappé à ce monstre. Je m'adossais à un arbre pour reprendre mon souffle et mon calme.
Maintenant, il fallait que je trouve ce village. Ma mère m'avait donné quelques indications pour le trouver. Une aide magique très importante pour s'orienter dans ces bois et de quoi manger s'il était à plusieurs jours de là.
Je n'en eus pas besoin, je n'avais pas eu le temps de lancer le sort nécessaire, que je sentis, au plus profond de mon cœur, comment trouver ce village. Ce pressentiment aurait eu de quoi effrayer n'importe qui d'autre, mais je préférais suivre cette intuition. Je me mis en chemin.
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Le Soleil noir
FantasyCélia, fille de la Grande Prêtresse de Solaria, est destinée à reprendre le rôle de sa mère à la mort de celle-ci. On la prépare depuis la naissance à ce rôle. Le jour se rapproche de plus en plus, pourtant, dans un pays où le rôle d'un Dieu prévaut...