Dans tes yeux

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Après le vide-greniers, j'avais accompagné Antoine jusqu'à la gare. Nous nous étions embrassés longuement, mais je sentais qu'il y avait quelque chose de différent. Une distance imperceptible, un léger malaise que je n'aurais pas su définir.

— Tu vas me manquer, m'avait-il dit.

— Oui, toi aussi.

Il m'avait serré dans ses bras, m'avait laissé ses clés avant de me souhaiter un bon week-end. Et moi, dès que le train avait quitté le quai, j'avais couru en hâte jusqu'à son appartement.

La soirée s'était déroulée dans un tourbillon de nettoyage frénétique. J'avais dépoussiéré les étagères, passé l'aspirateur, essuyé les surfaces et même lavé les fenêtres. Je voulais que tout soit parfait pour l'arrivée d'Anna le lendemain. Une fois le ménage terminé, je m'étais arrêtée un instant pour contempler mon travail : le studio était impeccable. Plus aucune poussière, plus de moutons sous les tapis, tous les livres bien rangés sur les étagères. La nouvelle table basse, fraîchement arrivée, tombait à point nommé : aucune tâche de café à camoufler.

Officiellement, j'invitais Anna pour passer du temps ensemble, discuter, peut-être regarder un film. Mais officieusement, j'avais décidé d'enfin lui révéler mes sentiments.

Ce matin, je passe toute la matinée à me préparer. J'ouvre l'armoire d'Antoine et passe en revue mes vêtements, ceux que je laisse chez lui pour mes semaines de cours, cherchant la tenue parfaite. Je finis par choisir un long pantalon marron et un chemisier ample, pour être à l'aise sans en faire trop. Je passe un temps fou à m'occuper de mes cheveux dans la salle de bain. Mais ça, c'est comme d'habitude.

Quand la sonnette retentit, mon cœur s'emballe. Je prends une grande inspiration et vais ouvrir la porte. Anna est là, souriante et rayonnante. Mon cœur bat plus vite et je sens une certaine maladresse s'installer, mais je l'invite à entrer avec un sourire.

— Salut Anna, entre, fais comme chez toi.

— Salut, merci !

Elle s'installe sur le canapé-lit que j'ai évidemment replié pour l'occasion, et je m'assieds à côté d'elle. Puis, c'est le silence. Je lui souris, elle me rend mes sourires, et je cherche désespérément un sujet de conversation. 

— Alors, comment s'est passée ta semaine ? finis-je par demander.

— Pas mal, juste un peu chargée avec les cours, répond-elle avec un sourire.

Je hoche la tête, cherche une réponse, mais rien ne vient. Les moments de silence s'enchaînent et je m'en veux de ne pas trouver les bons mots pour être intéressante sans en faire trop. Mon esprit est encombré par la volonté de bien faire, de plaire à Anna, mais rien ne semble naturel. Les minutes passent, ponctuées de quelques échanges banals, mais rien de significatif. Mon cœur bat toujours aussi vite, mon esprit ne cesse de me rappeler que j'ai quelque chose d'important à lui dire. Je veux tellement lui plaire, trouver les bons mots, que les phrases restent coincées dans ma gorge.

— Tu veux boire quelque chose, au fait ? Je lui propose.

— Oui, volontiers ! 

Je me lève et me dirige jusqu'au frigo. Celui-ci est presque vide. Je me dis que j'aurais dû faire quelques courses pour avoir plus de choses à lui proposer.

— On a du jus d'orange, de la limonade, ou de l'eau pétillante...

— Je veux bien de la limonade.

Je ramène deux verres et nous serre la même chose. Mes mains tremblent un peu, mais j'essayes de me calmer. Après quelques gorgées, elle me dit en désignant le coin de la pièce : 

Tout ce que je veux te dire [wlw][TERMINÉE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant