28. Aveux

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Temps de lecture : 17 minutes.

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𝐉'inspire profondément en m'arrêtant devant la porte de son appartement, me demandant si c'est réellement ce que je souhaite faire. Cette question me tourmente depuis mon arrivée, et à chaque fois, je déteste la certitude qui me répond.

Pour une fois, j'aimerais avoir des doutes. J'aimerais ressentir de la peur. J'aimerais éprouver des sentiments contradictoires qui me pousseraient à faire marche arrière. Mais quand je m'arrête ici, je ne ressens rien de tout ça. La seule certitude que j'ai, c'est que tout ça semble évident depuis le début. Et même si ça ne l'était pas au début, ça l'est depuis un moment, mais j'ai choisi de l'ignorer.

Ça fait tellement longtemps que tout ça reste coincé au fond de ma gorge sans que je n'ose jamais en parler à qui que ce soit. Aujourd'hui, je ressens une sorte de soulagement à pouvoir enfin tout libérer, mais une partie de moi est quand même frustrée de ne pas avoir eu à réfléchir avant de venir ici.

C'était une pure évidence.

Hier, j'ai réalisé que j'avais besoin de parler à quelqu'un. C'est quelque chose qui m'a souvent été répété, mais je l'avais toujours considéré comme quelque chose d'illusoire. On me l'a toujours présenté comme quelque chose de sérieux, avec un adulte, un professionnel, quelqu'un que je ne connais pas et à qui l'on est censé se confier.

Et je n'apprécie pas ça. Je n'aime pas ce pont de confiance qu'il faut établir pour parler à quelqu'un d'autre. Pourquoi est-ce nécessaire ? Pourquoi ai-je besoin que quelqu'un me dise ce que je dois faire ? Je n'ai pas besoin de conseils. Je veux juste qu'on m'écoute. Je veux aussi me sentir importante quand je le fais. Je ne veux pas être une tâche, un travail. Je veux être reconnue en tant qu'individu. Et c'est exactement ainsi que je me sens près de lui – près d'Idris. Comme quelqu'un.

La question maintenant, c'est comment entrer chez lui. Je ne l'ai pas revu depuis que je l'ai laissé avec sa famille, et je n'ai pas pu le contacter car nous n'avons jamais échangé nos numéros. Je me retrouve donc un peu perdue, à me demander s'il est chez lui, s'il veut même me voir. Je ne connais même pas son nom de famille pour sonner à la bonne porte, alors ça fait un moment que j'attends dehors, à me demander ce que je devrais faire.

Pour l'instant, je ne sais pas encore. Je crois que j'attends que quelqu'un descende pour m'ouvrir la porte, mais personne ne l'a fait jusqu'à présent. Ni sorti, ni entré. Je reste donc bloquée au rez-de-chaussée, un peu comme une idiote, à attendre le bon moment pour agir.

Ma patience est en train de me quitter doucement et je sens que si je continue à attendre, je vais finir par exploser.

Finalement, je m'approche de l'interphone et cherche parmi les noms de famille celui qui me semble le plus familier. J'hésite entre deux, mais finis par appeler le premier. Ça sonne, j'attends quelques secondes, et lorsque je m'apprête à me présenter, la personne ouvre la porte sans même dire quoi que ce soit. J'en profite donc pour rentrer aussi vite que possible.

Je me souviens où se trouve son appartement, alors je monte rapidement et ne perds pas de temps à hésiter devant la porte : je toque immédiatement. Patiemment, les bras croisés contre moi, je sens ma poitrine s'emballer de plus en plus au fil des secondes, comme si elle allait finir par exploser. Je ne sais pas vraiment quoi en penser, si je devrais être effrayée ou non. Je crois que oui, mais je ne le suis pas.

À la place, je suis seulement calme et posée, comme si je savais que c'était ce à quoi j'étais destinée depuis le début. Et quelque part, c'est peut-être le cas. C'est exactement ce dont on m'a avertie.

A Life Without MeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant