Prologue

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Temps de lecture : 06 minutes.

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𝐈l fut un temps où j'ai cru pouvoir enfin trouver la force en moi pour affronter la réalité de la vie. À ce moment-là, je pensais pouvoir faire preuve de courage pour avancer la tête haute. Je pensais être capable de regarder le monde qui m'entoure sans baisser les yeux de honte. Je croyais être suffisamment forte pour ne pas craquer face à ce monde sombre qui m'engloutit un peu plus chaque seconde qui passe. Je pensais pouvoir voir au-delà de la peine et de la terreur, d'enfin apercevoir la fin du tunnel obscur dans lequel je sombre depuis des années.

J'avais ce profond espoir, ce désir incassable, cette pensée inébranlable de pouvoir surmonter toute la noirceur autour de moi et d'enfin retrouver la lumière que j'espérais approcher sans jamais réussir à atteindre. Elle me semblait tellement proche.

Pourtant, chaque fois que j'ose m'approcher, je n'arrive pas à marcher suffisamment longtemps pour y parvenir.

Il fut un temps où j'ai cru que tout pouvait prendre fin. C'est bien ce qu'on dit après tout, n'est-ce pas ? On dit toujours qu'après un certain temps, les choses finissent par s'améliorer, que les gens finissent par oublier, qu'ils passent à autre chose. On m'a souvent répété que tant que je gardais la tête haute, tout irait bien.

Mais que faire lorsque je n'arrive plus à la maintenir droite ? Que faire lorsque le poids sur mes épaules est si lourd que je peine à regarder devant moi ? Je cherche désespérément cette lumière dans le noir de ma vie. Je la cherche depuis des semaines, des mois, des années. J'espère la retrouver. J'espère la voir. J'espère enfin y jeter un coup d'œil pour m'assurer qu'elle est bien réelle, que je ne me fie pas à une illusion, à un concept simplement inventé pour empêcher ces êtres qui n'ont plus rien de sombrer dans le désespoir.

J'ai essayé d'être forte. J'ai tenté d'incarner la femme courageuse que je rêvais de devenir à l'âge de dix ans. J'ai fait de mon mieux pour être cette personne qui ne se laisse pas abattre, qui persiste, qui n'abandonne jamais, même lorsque tout semble l'y pousser. Parce que c'est ce qu'on dit, n'est-ce pas ? Qu'il ne faut jamais perdre espoir, qu'il faut toujours croire.

J'ai espéré.

Peu importent les obstacles qui se dressent devant nous, on nous demande d'aller plus loin, de viser plus haut, d'être plus forts.

J'ai essayé. Encore et encore. Chaque jour, j'ai espéré réussir un peu plus. Mais je n'ai pas cette force en moi. Je ne ressens plus cette détermination. J'aurais tellement aimé être cette personne que j'imaginais être il y a dix ans. J'aurais tant voulu ne pas décevoir cette petite fille qui croyait devenir une femme incroyable et capable d'affronter la moindre difficulté. Je pensais pouvoir la rendre fière.

Pourquoi ne me suis-je jamais senti aussi pathétique qu'aujourd'hui ? Pourquoi ne me suis-je jamais senti aussi misérable ?

Jour après jour, j'appelle. Je crie. Je hurle au monde de m'entendre. Je lui rugis de ne pas m'abandonner dans mon propre désespoir. Voix brisée, peine exacerbée, espoirs brisés. J'appelle sans jamais recevoir d'écho. Je gueule sans jamais être écoutée.

Parce que personne ne veut entendre ces cris d'affliction, personne ne veut les affronter.

Je peine à être forte, sachant que je n'ai pas les épaules pour porter le poids que cela implique. Je ne les ai jamais eues. Peut-être ai-je un jour pensé que je pourrais trouver en moi cette énergie, cette détermination, cette puissance dont tout le monde parle, dont tout le monde espère trouver la source. J'ai tant essayé de la trouver. Je l'ai cherchée, jour après jour, sans jamais y parvenir.

J'aimerais être capable de continuer, de garder cet espoir en moi pour ne pas abandonner aussi facilement. Mais il n'y a rien de facile à cela. Après des années à espérer, je n'ai plus la force de lutter. Mon corps n'a plus la force nécessaire pour ne pas se briser en mille morceaux.

Il fut un temps où j'ai cru m'en sortir.

Aujourd'hui, je sais que j'ai cru en vain.

Je me pince les lèvres en observant cette route déserte en dessous de moi qui s'étend au loin. Sur ce pont, tout semble tellement plus vaste, tellement plus intense. Sous ce paysage sans fin, je ne suis rien d'autre qu'un atome parmi d'autres. Rien ne me rend spécial. Rien ne me rend unique. Rien ne me rend indispensable.

Pourquoi s'accrocher à la vie alors que la vie ne m'a jamais rien donné ?

Je sais que je devrais être reconnaissante. Je sais qu'il y a beaucoup de choses merveilleuses autour de moi. Mais je ne les vois pas. Je ne les vois plus. Elles sont toutes floues, assombries par ma propre douleur qui me ronge lentement. Il n'y a rien de beau dans un vide noir. Il n'y a que du noir. Rien que du vide. Et c'est exactement ce que je ressens. C'est précisément ce que j'endure depuis des semaines.

Comment pourrait-on changer quoi que ce soit ? Comment les choses pourraient-elles s'améliorer ? Il n'y a pas d'espoir. Pas de joie. Pas d'amour. Il n'y a rien. Alors, à quoi bon ?

Il fut un temps où je pensais pouvoir vivre. Respirer à nouveau. Aujourd'hui, je réalise que je retiens mon souffle depuis des années parce qu'il n'y a plus d'oxygène autour de moi. Je suffoque et personne n'est là pour le voir, pour l'entendre, pour témoigner.

Seule. Je suis seule. Je l'ai toujours été ; je le serai toujours. Je crois que c'est la dernière chose que j'avais besoin de comprendre. La dernière chose que j'avais besoin d'intégrer.

Aujourd'hui, face à ce monde trop grand pour mon cœur, je laisse les larmes couler le long de mes joues en fermant les yeux. J'essaie d'invoquer en moi des souvenirs. De bons souvenirs. Je n'en trouve aucun. Ça fait longtemps que je n'en trouve plus en moi, comme si mon esprit avait tout effacé.

Je ne lui en veux pas. Je comprends qu'il n'y a seulement plus aucun espace pour le bon en moi.

Je ne lui en veux pas. Je n'en veux pas au monde. Je n'en veux à personne. J'en veux seulement à moi-même d'avoir été naïve, d'avoir cru, d'avoir désiré.

Parce que maintenant que tout s'effondre, c'est comme si je sentais chaque partie de mon corps s'écouler. Et je déteste ça.

J'inspire profondément en rouvrant les yeux, grimpant sur le bord du pont tandis que la vie nocturne laisse doucement place au jour. J'ai toujours rêvé de voir un lever de soleil. Aujourd'hui, je souris en en apercevant un. Il est si beau, entouré de ces couleurs chaleureuses qui caressent la végétation pour la réveiller tendrement de son sommeil. Je souris parce que c'est beau. Je souris parce que j'ai enfin trouvé ce bon souvenir.

Lentement, je laisse le vent frais frapper mon visage, faisant virevolter mes cheveux dans l'air. À quoi ressemblé-je, à cet instant précis ? Sous les larmes, avec ce sourire, à quoi ressemblé-je ? Quel sera le dernier portrait que je livrerai au monde ?

J'espère que ce sourire ne quittera jamais mon visage.

J'espère que ces larmes disparaîtront.

En attendant, je mets de côté ces pensées.

Puis je me laisse tomber dans le vide de ma torture.

N.D.A. : évidemment que j'ai pleuré en écrivant ça.

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LOVE ∞

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A Life Without MeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant