A Life Without Me

08. Famille

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𝐌a vie est devenue vraiment étrange. Je ne peux pas réellement la décrire, expliquer cette manière dont absolument tout a changé. Je n'arrive moi-même pas à comprendre comment ma mère et mon père ont pu accepter ces choses aussi facilement. J'ai l'impression que tout est sorti de mon imagination, de mes désirs, tellement tout paraît irréel.

Je suis toutefois rappelée assez souvent que je ne suis pas dans un monde qui m'appartient. Mais c'est un monde auquel je veux appartenir.

Depuis les résultats du test ADN, ma mère n'a plus aucun doute sur moi ; elle me croit entièrement. Elle a tenu à ce que je lui raconte chaque détail à propos de mon « autre mère », et cette fois-ci, elle ne m'a pas interrompue une seule fois. Elle m'a sincèrement cru. Elle était surtout choquée par tous les détails qui ne sont pas dans sa vie. Et à quel point un élément a tout pu changer.

En restant avec mon père, en évitant de se renfermer sur elle-même, elle ne s'est pas repliée sur sa propre douleur et a justement décidé d'avancer avec. C'est ce point qui la rend vraiment différente de tout le reste, ce fait qu'avec l'aide de mon père, elle ne s'est pas laissé engloutir par sa propre noirceur.

Elle n'est pas restée seule, elle a été entourée. Et même si elle n'a pas pu devenir peintre comme elle l'espérait, elle est épanouie dans sa vie. Bien plus qu'elle ne semble l'être maintenant.

J'ai passé deux jours entiers chez ma mère. Nous les avons passés à parler, à discuter comme je ne l'avais pas fait depuis longtemps. Et je lui ai parlé, aussi. Elle s'est intéressée à ma vie et je lui ai tout raconté. Je n'ai pas mentionné ce qui m'a fait du mal ni ce que je regrette. Je me suis contentée de partager tout ce dont j'avais envie de parler depuis tellement longtemps.

Et ma mère m'a écoutée. Elle m'a réellement entendue. Elle n'a pas simplement acquiescé pour la forme. Elle a réellement écouté chaque petit détail que je lui ai donné. Et ça m'a fait tellement de bien de pouvoir me libérer de cette façon.

Je ne sais plus quand remonte ma dernière conversation aussi ouverte et sincère ; peut-être n'en ai-je même jamais eu. Quoi qu'il en soit, j'en suis profondément reconnaissante. Et je n'aurais pas pu rêver mieux. Cette connexion avec ma mère, c'est tout ce que j'espérais. Et voilà que je l'ai enfin retrouvée.

Avec mon père, cependant, les choses sont plus compliquées que prévu. Il ne s'est pas excusé depuis la dernière fois. En fait, une fois qu'il a retrouvé sa voiture, il a simplement affirmé qu'il viendrait me voir d'ici peu. Nous n'avons pas eu de nouvelles de sa part depuis deux jours, ce qui en dit long.

Je ne sais pas à quoi il pense. Peut-être est-il en train de digérer le fait d'avoir une fille dont il ignorait même l'existence il y a peu, ou peut-être est-il toujours en colère contre ma mère pour lui avoir « caché ». Quoi qu'il en soit, ce n'est pas mon problème. J'ai décidé que je ne me préoccuperais pas de lui ou de ses pensées, car il n'en vaut pas la peine tant qu'il ne se sera pas excusé, envers ma mère et envers moi.

Et puis, je crois que je commence vraiment à m'habituer à cette vie avec ma mère, où je n'ai pas à me soucier des cours ou de mon avenir. Rien d'autre n'a d'importance que l'instant présent, ces moments que je partage avec ma mère.

— Pourquoi peins-tu toujours en noir ? demandé-je en récupérant une pistache dans le bol, levant les yeux vers sa toile en cours tandis que j'en retire la coque.

Ma mère, un pinceau à la main, se retourne vers moi.

— Parce que le noir est une belle couleur, n'est-ce pas ?