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𝐋orsque je rentre de chez Idir, mon esprit est en pagaille. Je ne cesse de penser à ce qu'il m'a raconté, à ce qu'il a vécu, et aux larmes sur ses joues. Nous ne nous sommes pas parlé. Nous sommes simplement restés l'un près de l'autre sans savoir quoi dire. Ou peut-être n'avions-nous simplement pas besoin de dire quoi que ce soit.
Idir m'a affirmé qu'il avait besoin de temps seul, et même si je n'étais pas à l'aise à l'idée de le laisser après ce qu'il m'a révélé, je sais aussi qu'il était sincère. Il a vraiment besoin de ce temps pour lui-même. Je lui ai donc promis de venir le voir demain pour que nous puissions reprendre notre mission de le ramener là-bas. Même si, compte tenu des circonstances, je doute que ce soit la meilleure solution.
Je ne lui ai rien dit, mais au fond, je me demande pourquoi il veut y retourner après ce qu'il m'a raconté. Pourquoi ne veut-il pas simplement rester ici et trouver une façon de briser cette boucle ?
Je pense tout de suite à sa famille. Il ne l'a pas mentionnée, alors peut-être qu'elle ne fait pas partie de ce monde. Je trouve étrange que, si tout se répète, sa famille n'en fasse pas partie. Il semble vivre seul, et ça aussi, je ne le comprends pas très bien. Il y a tellement de questions que j'aimerais lui poser, mais que je ne pose pas, car je n'ai pas envie de paraître intrusive. Ce n'est pas non plus le moment de parler de sa famille après ce qu'il a vécu.
À la place, j'essaie de trouver une façon de lui parler sans que ce soit gênant entre nous. Il est évident qu'après ce qu'il m'a avoué, nous ne pourrons pas revenir à la « normalité » que nous avions. Rien ne sera plus pareil. Je ne le verrai plus de la même façon, exactement comme je redoute que le monde me voie désormais.
C'est ironique, n'est-ce pas ? De me retrouver bloquée dans cette vision que j'ai de lui, alors que j'espérais que les autres n'en fassent jamais de moi. On dirait bien que c'est inévitable. Une fois les secrets révélés, il est impossible de revenir en arrière pour tout changer.
J'aurais aimé ne pas être comme ça, mais il faut croire que ça nous dépasse.
Lâchant un soupir, je passe la porte d'entrée de l'appartement de ma mère, déposant le double des clés qu'elle m'a donné sur le meuble. Je retire mes chaussures, puis traverse le couloir jusqu'à ma chambre où je la retrouve assise exactement comme je l'ai laissée plus tôt.
Elle tient un pinceau dans les mains et analyse la peinture devant elle, comme pour essayer de décider quel trait tracer ensuite. Je sais qu'elle me remarque, mais elle ne lève pas les yeux, trop concentrée. Je prends donc une autre chaise et la place derrière elle afin de pouvoir observer ce qu'elle a peint jusqu'ici.
Comme toujours, les coups de pinceau sont noirs, serrés et graves. J'aurais espéré qu'elle tente quelque chose de plus joyeux, mais on en est loin. Son tableau exprime immédiatement de la colère.
Je n'ai pas envie de l'énerver plus qu'elle ne l'est déjà.
— Tu as pu profiter ? me demande-t-elle sans me regarder.
Je déglutis. « Profiter » n'est pas exactement le terme que j'utiliserais pour décrire ma matinée.
— Oui. J'ai pu faire un petit tour.
— Tu n'as eu aucun problème ?
Je sais qu'elle fait référence à la barrière. Je lui explique que non, ce qui doit forcément l'intriguer aussi. Cependant, elle ne cherche pas à en savoir plus.
— Qui est ce garçon pour toi ?
— Quoi ? m'exclamé-je d'une voix plus aiguë que je ne l'aurais voulu. Quel garçon ?
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A Life Without Me
Dla nastolatkówEt si elle n'avait jamais existé ? Aelia, épuisée et désespérée, se tient au sommet du plus haut pont de la ville, prête à mettre un terme définitif à ses souffrances. Pourtant, lorsqu'elle effectue ce dernier pas, elle se retrouve inexplicablement...