Chapitre 28 : Julien

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Le lendemain du Prime 7


Julien


La réunion avec Nikos et Michael est sur le point de se terminer, il faut que j'agisse. Leur idée accélère un peu mes plans, mais c'est pour le meilleur, ils vont stagner sans fin si je ne saisis pas l'opportunité.

Je lève la main et me lance.

« Nikos, je peux vous parler un instant ? En privé... »

Il a l'air un peu décontenancé, mais restant professionnel m'invite à sortir. Ma voix a trembler légèrement, vestige du doute qui m'habite quand à ma décision.

Une fois dehors, armé d'une veste et de mon courage, j'attends tout de même que le présentateur referme la porte. Courageux mais pas téméraire. Surtout à l'idée que d'autre puisse entendre ce que j'ai à dire. Je respire une dernière fois l'air frais, puis me lance dans l'inconnu.

« J'ai... une requête à vous soumettre. »

Son air interloqué s'amplifie et se teint d'une légère couleur d'inquiétude. Je continue pour ne pas le laisser s'imaginer le pire.

« J'ai besoin de passer un appel. Pas n'importe quel appel, celui-là est très important. »

Ma gorge est sèche, ma bravoure se flétrit, seulement, je ne dois pas lâcher les rênes de mon futur.

« J'ai besoin de passer un appel sans qu'il ne soit enregistré. »

Un éclair de compréhension le frappe, j'ignore à quel point il sait ce que je veux dire, néanmoins ça à l'air suffisant pour le faire réfléchir profondément. C'est à son tour de prendre son souffle avant de parler, je ne sais dire si c'est positif ou pas.

« Julien, je ne sais pas si c'est faisable. »

Il frotte son visage de sa main droite, l'air un peu perdu et contrit. Je m'apprête a interjecter, à prendre la défense de mon cas, mais il m'arrête d'un geste.

« J'ai déjà dû tirer sur la corde pour avoir le changement dans les caméras, je ne peux pas tout avoir d'un coup, c'est trop demandé. Mes mains sont liés par vos contrats et le mien. »

Mon souffle se bloque, il ne peut pas... il a déjà trop fait...

Je ne m'étais pas rendu compte à quel point il joue le rôle d'entremetteur avec les actionnaires de la chaîne, un contre pouvoir pour notre protection dans le milieu du show-biz. La vague de compréhension est grande et manque de me submerger, quels combats a-t-il déjà mené pour que nous aillons autant de libertés d'actions ? Qu'a-t-il dû accepter en échange ?

« Nikos, je suis désolé... je pensais que ça serait une broutille. Je n'imaginais pas à quel point les choses sont compliqué pour vous aussi. »

Il sourit faiblement, se grattant la barbe de trois jours.

« C'est fait exprès, je veux que vous viviez cette expérience dans le meilleur cadre possible et... j'aurais aimé que quelqu'un fasse ça a mes débuts. »

Les yeux dans le vague, une tristesse et une amertume terrible semblent le consumer au souvenir de ses premières années. Il semble plus âgé et comprimé, comme tassé par la pression qu'il a subi et qu'il combat toujours, pour nous...

D'une secousse de la tête, tout à disparu, il redevient le présentateur souriant de la starac. Il prend son téléphone en main et consulte quelque chose, soupire, me regarde et sourit de nouveau.

« J'ai peut-être une idée, je vais demander une faveur à un collègue, il va pouvoir s'arranger. Par contre pour les autres candidats, c'est à toi de jouer, je ne peux pas contrôler leurs déplacements. »

L'espoir disparu m'étreint de le cœur d'une force colossale. Mon plan va pouvoir fonctionner. !! Je m'élance et le serre dans mes bras.

« Merci tonton Nikos !! Mercii beaucoup pour tout !! »

Quand je le relâche, son sourire est triste et ses yeux un peu embués, mais il reste digne et sa voix ne casse pas.

« Tonton ? (rire) J'aime bien ! »

Il prend le chemin de l'allée, mais se retourne après quelques pas.

« Je sais que le choix que tu fais est difficile (lève la main pour m'empêcher de parler). Non je ne connais pas les détails et ils ne me regardent pas. Sache juste ceci, le plus important n'est pas le résultat, c'est d'être fier d'avoir fait le choix qui nous ressemble. »

Et sur ce, il s'en va, laissant derrière lui une énigme de plus ainsi qu'une impression parentale vague.

Au loin, je crois percevoir des mots qui flottent telles des bouteilles à la mer. Illusion de marin, chant de sirènes ou radeau de la méduse, je l'ignore. Je n'y prête attention que parce que mon prénom y figure.

« Je suis désolé pour tout Julien... »

Et encore une fois, je ne comprends rien, le jeu qui se trame me dépasse.

Faisons danser nos voixOù les histoires vivent. Découvrez maintenant