Chapitre 20 : Julien

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Entre le prime 6 et 7

Julien


Les minutes s'écoulent lentement, le bruit de fond de l'autre cabine de douche, nos respirations encore saccadées, tout a l'air comme au ralenti. Rien de cela n'a d'importance. Ce que j'entends le plus vivement, ce que je ressens comme un cri droit dans mon tympan, c'est le silence entre nous. Le dos tourné, nous contemplons les vestiges de conversation, les ruines de paroles prononcées il y a des siècles de secondes.

Je ne sais pas quoi penser, rien n'a de sens, mais tout en a. Je ne peux pas être quelque chose que j'ignorai, mais comment expliquer ce frisson quand j'entends Axel retourné dans sa cabine. Comment expliquer le froid qui m'envahit si vite, que je dois rallumer l'eau pour ne pas trembler ?

Les minutes s'écoulent lentement, le bruit de fond de l'autre cabine s'arrête, ma respiration n'est plus saccadée, enfin, je crois. La brûlure de l'eau chaude m'a engourdi les sens, tout comme la chaleur plus tôt semble m'avoir brûlé l'essence. Une fois mon eau coupée également, j'attends, le front coller contre le mur. Les minutes passent plus bruyamment que mille horloges résonnantes, la serviette séchant les cheveux, les vêtements ramasser. La porte qui s'ouvre... Mes pensées deviennent un bloc de glace, mettant sur pause toute velléité de réfléchir plus avant aux événements La porte s'ouvre ! Je me précipite hors de la douche, un cri au bord des lèvres.

« Attends ! »

Mais la porte se referme déjà... avec Axel du... « bon » côté de la porte ?

Je reste interdit face à cette vision, il me regarde interloqué, en caleçon devant la porte de la salle de bain, un plateau de nourriture dans les mains. Me rendant compte de ma nudité, je me renfrogne et empoigne ma serviette avant de lui tourner ostensiblement le dos et de me sécher.

Je l'entends poser le plateau et s'habiller et attendre. J'essaie de me dépêcher, mais quelque chose cloche. J'étais prêt à le poursuivre, complètement nu dans le château, et, en le découvrant toujours là... je ne sais pas quoi en penser. Tout comme... tout comme ce qu'il s'est passé il a quelques minutes...

Une fois habillé je retourne vers lui, assis dans un coin de la salle de bain, les yeux rivés sur le plateau situé devant lui. Je m'interroge sur cette soudaine concentration, peut-être ne veut-il juste pas me voir. Puis moi aussi je regarde, et je comprends.

Maudissant Lénie pour ses idées à la con, mais majoritairement surpris par la manière dont elle réussi son tour en si peu de temps, je m'assois en face de lui. Avec entre nous, le plateau-repas ou sont disposé deux sandwichs au contenu tout à fait classique, mais dont la forme de cœur trahit leur créatrice.

J'ignore à quoi elle joue, mais j'ai faim. Je me jette sur le mien, autant par appétit que par volonté d'avoir une excuse de ne pas démarrer la conversation qui va suivre. Axel en fait autant, et encore une fois, un silence troublant s'installe dans la pièce.

Mes pensées se mêlent, elles vont vers des personnes, des endroits, des moments auxquels je n'avais pas envie de repenser dernièrement. Ma petite amie par exemple, mon départ tout en cris et le fait de ne pas lui avoir parler depuis. Le fait que la production a dû couper le live pour éviter de nous voir nous balader nus en pleine émission télé. Cette pensée me fait d'ailleurs m'étouffer sur ma dernière bouchée, ce que me vaut un regard interrogateur, que j'esquive en fixant le plateau.

Les minutes s'écoulent lentement, plus de bruit de fond pour nous distraire ou nous cacher. Les miettes de paroles tout comme celle du repas s'accumulent sur le sol. Il est temps de parler, mais pour dire quoi ?

Faisons danser nos voixOù les histoires vivent. Découvrez maintenant