Chapitre 29 Julien

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Prime 8


Julien


 Concentration, il nous faut de la concentration ce soir.

Le tableau chanté dansé est compliqué, mais c'est une preuve de confiance. Je ne dois penser à rien d'autre. Les semaines de travail portent leur fruits, et le relâchement du au poids que je ne porte plus sur mes épaules me permets de me déployer encore plus. Je ne dois penser à rien sauf la performance...

Pas à cette vielle discussion cryptique avec Nikos.

Je ne comprends vraiment pas tout ce qu'il se passe dans ce château et au-delà. La production, les médias et tous les enjeux d'argent et de pouvoir me passent par-dessus la tête. Il faut rester concentré et ne pas s'imaginer des choses sur des mots que j'ai peut-être imaginés et des machinations secrètes.

Ne pas penser à cet appel...

Pas le son de sa voix et tous les souvenirs qui remontent. Ne pas penser aux larmes de l'autre côté du téléphone... aux miennes qui montaient petit à petit conquérir mes yeux, aux siennes qui auraient pus couler dans le combiner et, à l'en croire, noyer le monde dans un déluge.

Surtout ne pas penser à elle...

Surtout...

Pas...

Elle...

Pense à Axel.

Il est là lui. Pas a des centaines de kilomètres de là. Juste là sur la scène. Avec moi aux répétitions le jour, près de moi la nuit.

Le savoir non loin de là me redonne de la force. J'avance dans les couplets comme un navire fend les vagues, mon corps pareil à celui d'un homme dans la cale de la nef, luttant dans le cœur d'une tempête de pas de danse.

Je tourne la tête une demi-seconde vers celui qui me fait chavirer, celui vers qui, même un instant de trop loin est un instant couler. Il est là, sur le banc, aux côtés des autres. Mon regard cherche le sien, seulement il est trop concentré sur autre chose et ne me remarque pas.

Son expression est un mélange de confusion et d'inquiétude, les deux se jetant sur moi telles des créatures affamées. Je dois rester concentré, me retourner et m'occuper de ce problème quand je le pourrais.

Ma tête se tourne et mon prochain partenaire s'avance, et le choc est plus violent que tout. Je comprends mieux l'expression de mon camarade.

Amélie est là. Au cœur d'une chorégraphie légèrement modifiée pour l'accueillir. Je n'avais rien remarqué, trop concentré sur le fait de faire comme en répétition tout en évitant les sujets épineux qui me torturent les tripes.

Elle est là. Magnifique, dans la tenue sans doute choisie par la production. Elle vole la vedette comme d'habitude, rien qu'en apparaissant. Pas besoin de chanter, à peine de danser et le public est en délire.

La mémoire musculaire me sauve et je continue de danser, la prenant dans mes bras comme si cela avait été programmé et me lance dans le dernier passage. Je tente de ne pas la regarder, mais un aimant est voué à se tourner vers la chose qui l'aimante... la plus proche en tout cas.

La note finale passe mes lèvres et l'instant d'après celles-ci sont collés aux siennes. Je me laisse aller dans l'étreinte. La sensation n'est qu'un vestige de ce qu'elle était il y a quelques mois. Ruines de mes sentiments et des siens. Le tout mit en scène une dernière fois pour un public affamé des pics et des vallées de l'amour auquel il croit si fort.

En m'écartant je la regarde enfin, sans vraiment faire attention à l'annonce de Nikos. Elle se nourrit des applaudissements et des vivats, je ne sais pas si c'est un masque qu'elle porte, ou si c'était son plaidoyer au téléphone la supercherie... Je décide de figer mon expression pour faire bonne figure, le temps de mettre tout ceci au clair.

La méduse à trouver son radeau et c'est moi qui en fais les frais. J'espère juste que je serai le seul à goûter à l'eau salé et à découvrir les profondeurs dans lesquelles cette histoire va me mener.

Je salue, remercie, fanfaronne un peu, comme l'ancien Julien l'aurait fait. Je crois ne plus l'être, je l'espère de tout cœur.

Le retour au banc avec ma « petite amie » à mon bras est douloureux tant je me force à ne pas me tourner vers Axel, nous en discuterons plus tard, ça n'est pas le moment.

Le reste de la soirée est irréel, tout semble factice, comme si j'étais de l'autre côté du miroir. Même Nikos et les professeurs semblent désorienté, comme flou, simple reflet trouble de ce qu'ils sont habituellement. Le public n'a pas l'air de le remarquer et c'est tant mieux, mais de mon côté impossible de profiter du moment.

Au moment des séparations, je tente de rester distant, elle ne m'en laisse pas la possibilité, se collant à moi le plus possible pour me chuchoter à l'oreille. Les paroles pourraient paraître langoureuses pour ceux qui observent de loin, rien qu'en voyant la posture et sa main sur mon torse, mais c'est une sueur froide qui me coule dans le bas du dos.

« Je sais ce qu'il se passe dans le château, laisse moi bien te dire quelque chose, je ne suis pas venu de gaîeté de cœur. On m'a filé un joli chèque pour venir « rassurer » le public sur notre relation, alors t'a pas intérêt à tout foutre en l'air, compris ? »

Je hoche la tête, son insistance sur le mot « rassurer » me fait peur, bien plus que tout le reste. Même si le mystère de se venue devient plus clair. Elle continue, son ton encore plus froid.

« Je reviens demain pour le repas de noël, ne me fais pas honte où je détruis ta réputation, reçu la star ? »

Encore une fois, j'acquiesce. Mon sang figé, mes muscles tendus, la colère et la peur se mêlant dans un mélange explosif, mais qui ne doit pas s'enflammer tout de suite.

Elle part après un baiser presque tendre sur la joue, me laissant inerte, la mort dans l'âme, et une seul pensée à l'horizon.

Ceux qui ont organisé ça vont m'entendre, ça oui, et ils vont le payer...



Note de l'auteur


Hello tout le monde ! J'espère que le chapitre vous a plus ^^


J'ai peut-être été un peu optimiste en vous disant que vous auriez deux chapitres cette semaine, mais je vais faire de mon mieux pour que ça arrive vite !


On arrive à un événement assez explosif comme vous pouvez l'imaginer ! L'histoire va chavirer par rapport à la réalité et comme vous vous en doutez, mais je me dois de le rappeler, rien de ce qui est fait et dit n'est réelle et ne pourra être imputé aux personnes qui sont décrites. Le personnage d'Amélie n'a rien à voir avec sa contrepartie réelle et je ne pense pas que la production est entrepris ce type de choses durant l'émission.


En-tout-cas, je vous souhaite un beau week-end ! Je retourne au festival de musique et je fais vite pour la suite !

Faisons danser nos voixOù les histoires vivent. Découvrez maintenant