Chapitre 6

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L'émeute organisée par Ryu nous a privés de liberté depuis une semaine complète. Nous prenons nos repas en cellule et nous n'avons pas accès aux douches. L'odeur de sueur et de nourriture rance imprègne les couloirs, rendant l'atmosphère déjà oppressante encore plus insupportable. Les murs de béton, autrefois gris clair, sont maintenant tachés de saleté et d'humidité, ajoutant à la désolation ambiante. Plusieurs prisonniers, dont Ryu qui a gravement blessé Nobuo, ont été placés en isolement.

Je m'en veux de ne pas être intervenu plus tôt. Mais s'opposer à Ryu n'était pas une décision facile. Même si je peux me permettre de lui tenir tête quand il essaie de jouer au chef, réduire à néant tous ces efforts pour pouvoir profiter de la nouvelle recrue est encore plus dangereux. Il est une figure emblématique à Fuchu, capable de rendre la vie en prison insupportable.

Et pourtant j'ai décidé de mettre ma propre sécurité en péril en intervenant. Au détriment de celle de Toshi d'ailleurs. J'espère qu'il va bien. Les mots d'Eichi me reviennent en mémoire. J'aurais dû penser à mes amis, avant de vouloir jouer au héros.

La chaleur pèse lourdement dans les cellules. Privés de nos activités habituelles, nous tuons le temps tant bien que mal. Le bruit des gouttes d'eau tombant des tuyaux rouillés et le grincement des barreaux métalliques accompagnent le murmure incessant des voix. Je joue aux cartes avec Eichi, qui est dans la cellule voisine. À travers les barreaux froids et rugueux, nous abattons nos cartes sur le sol poussiéreux. Eichi s'exclame soudainement, victorieux, lorsque Hiromi apparaît, sa silhouette se découpant dans la lumière blafarde du couloir.

— Encore à tricher, 0221? demande Hiromi avec un sourire en coin, ses yeux scrutant la scène avec amusement.

Eichi haussa les épaules, un sourire moqueur sur les lèvres.

— Tricher, moi ? Jamais de la vie. C'est juste que Sota est mauvais joueur, répond-il en me lançant un clin d'œil.

Hiromi se tourne vers moi, son expression devenant plus sérieuse.

— Tu as de la visite, m'annonce-t-elle calmement.

Surpris, je laisse tomber mes cartes et me lève brusquement. La surprise fait place à la curiosité, mêlée à une certaine appréhension. Je sens mon cœur s'accélérer, une vague d'anxiété monter en moi. Nous avons droit qu'à une seule visite par mois, elle peut être porteur d'espoir autant que de crainte.

— Une visite ? répété-je, incrédule.

— Oui, une visite, confirme Hiromi.

Les portes de ma cellule s'ouvrent dans un grincement métallique, et Hiromi me passe des menottes aux poignets. Le métal froid contre ma peau ajoute une sensation désagréable à mon impatience. En silence, je me place sur le trait noir au sol, une marque familière mais oppressante de notre confinement. Ma respiration s'accélère légèrement, mon esprit jonglant entre espoir et inquiétude.

Eichi se redresse également, ses yeux suivant chaque mouvement de la gardienne. Ken, à proximité, ouvre la marche vers le parloir. Je le suis de près aux côtés d'Hiromi. Le bruit de nos pas résonne sur le sol en béton, amplifiant l'écho de notre progression à travers les couloirs austères de la prison.

Nous entrons tous les trois dans un sas menant à une grande salle avec des tables et des chaises en bois, usées par le temps et les nombreux détenus qui les ont utilisées avant eux. Les murs gris de la pièce sont couverts de marques laissées par les années. L'air y est légèrement plus frais que dans les cellules, mais toujours imprégné de cette odeur caractéristique de renfermé et de désinfectant.

Pendant que Ken veille à détacher mes menottes, je tends le cou vers le parloir et balaie la pièce du regard. Mes yeux s'arrêtent soudain sur deux visages familiers assis autour d'une table, leurs bras agités dans ma direction. Un sourire illumine mon visage, chassant momentanément les soucis et la tension accumulés ces derniers jours.

Sous haute surveillance - Sota [MxM]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant