Quelques jours se sont écoulés depuis la visite déchirante de mes sœurs, et la grisaille a envahi chaque recoin de ma cellule. La pièce où je me trouve maintenant avec Shinzo, semble aussi oppressante que ma solitude habituelle. Les murs, d'un blanc terne, semblent se rapprocher un peu plus chaque jour.
Shinzo est assis en face de moi, entouré de dossiers, de documents et de notes éparses. Il parle d'une voix posée, essayant de m'expliquer les subtilités du procès à venir, qui aura lieu dans trois mois. Ses gestes sont méthodiques, chaque page feuilletée avec soin, chaque phrase pesée. Mais je suis ailleurs, perdu dans un tourbillon de pensées sombres et de souvenirs douloureux. Je n'entends que le murmure lointain de sa voix.
Il le remarque, évidemment. Son regard, à la fois compréhensif et résolu, se pose sur moi. Il essaie de m'encourager, de rallumer une étincelle dans mes yeux fatigués.
— Sota, je sais que c'est difficile, mais tout n'est pas perdu, insiste-t-il. Il y a encore de l'espoir. On peut travailler sur ta défense. On peut encore faire quelque chose...
Mais ses paroles sonnent creux à mes oreilles. Je n'arrive pas à me détacher du sentiment d'impuissance et de désespoir qui m'envahit. Les mots de Shinzo se perdent dans le brouillard de ma mélancolie. Je n'ai plus la force de croire à un futur où tout pourrait s'arranger. Je suis accablé par ma situation, et l'idée que tout pourrait bien finir semble maintenant aussi lointaine que les étoiles dans le ciel nocturne.
Shinzo me regarde, essayant d'attraper une lueur de motivation dans mon regard vidé. Il est comme un phare dans une tempête, mais moi, je suis perdu en mer, sans savoir si le rivage est encore en vue. Je reste là, silencieux, les épaules affaissées, incapable de trouver la moindre étincelle d'espoir dans les ténèbres qui m'entourent. La détermination de Shinzo se heurte à mon désespoir, et je ne peux que me perdre dans la lourdeur du silence.
Après la visite de Shinzo, je retourne dans ma cellule, la tête encore lourde des discussions que nous avons eues. Même si c'est encore l'après-midi, la lumière déclinante semble se fondre avec la grisaille de mon humeur. J'installe mon futon en désordre et m'allonge dessus, me laissant tomber dans un abîme de découragement. Mon esprit reste englué dans une torpeur déprimante, et le temps semble s'étirer interminablement.
Soudain, un bruit métallique perturbe le silence de ma cellule. La trappe de service, la petite fente par laquelle je reçois mes repas, s'ouvre dans un grincement. Je suis surpris, puisque ce n'est pas l'heure de la distribution des repas. Mon attention se redresse immédiatement. Je tends l'oreille et perçois la voix familière de Meiji résonner depuis le couloir.
— T'as du courrier, dit-il, sa voix tranchant à travers le murmure de l'après-midi.
Je me redresse avec un mélange de curiosité et d'appréhension. Meiji tend une lettre à travers l'ouverture, et je la prends avec une certaine impatience.
— Si tu veux y répondre, dit-il, tu peux demander une feuille et de quoi écrire auprès des gardiens.
Je le remercie dans un murmure. Meiji referme la trappe avec un cliquetis, me laissant seul avec la lettre. Je retourne m'asseoir sur mon futon, l'esprit agité par cette intrusion inattendue. Je déplie l'enveloppe avec attention, me demandant qui pourrait bien m'écrire. Mon cœur bat plus fort à mesure que je déchire l'enveloppe, découvrant une feuille de papier pliée. Je l'ouvre doucement et commence à lire, mes yeux cherchant désespérément à percer le mystère de l'expéditeur.
"Sota,
Je n'ai jamais vraiment écrit de lettres. C'est même probablement la première fois que je me lance dans ce genre de choses. Ça me donne l'impression d'être plongé dans une autre époque, comme si j'étais revenu au temps des vieux courriers envoyés au front. Mais après tout, tu es là, à te battre dans ta propre guerre de liberté.
Ken m'a dit que tu étais enfin sorti de l'isolement et que tu pouvais maintenant recevoir des visites. Je suis désolé de ne pas avoir pu venir te voir en personne. J'avais vraiment envie de te voir, de te soutenir de vive voix. Mais j'ai dû partir. Je suis retourné à Hakone, chez ma mère. J'avais besoin de me retrouver, de m'éloigner de tout ça pour essayer de panser mes propres blessures. Je ne sais pas combien de temps je vais rester ici, ni quand je reviendrai à Tokyo. La vérité, c'est que je me sens complètement perdu. Chaque jour ici est un combat pour moi aussi, et je ne sais pas encore quand je serai prêt à affronter tout ce qui s'est passé.
J'ai passé des jours à hésiter avant de décider de t'écrire. J'avais tellement peur de faire remonter les souvenirs de cette nuit-là, de rouvrir des blessures qui n'étaient pas complètement cicatrisées. Mais plus le temps passe, plus je me rends compte que tu me manques. C'est étrange pour moi de dire ça, je ne pensais pas que tu pouvais compter autant dans ma vie. Tu m'as pris de court, finalement. Mais ton absence me ronge bien plus que la peur que j'ai ressenti cette nuit-là.
Si je pouvais revenir en arrière, je donnerais tout pour être à tes côtés à nouveau. Peu importe le prix, même si cela signifie retourner derrière ces murs, avec toute cette violence et ces règles impitoyables. Rien ne pourrait compenser le fait que nous étions ensemble, même dans les pires circonstances. La simple pensée de partager ces moments difficiles avec toi me manque plus que tout.
Je sais que tu dois te sentir complètement abattu en ce moment. Je n'imagine même pas ce que tu endures dans cette cellule, isolé et loin de tout ce qui pourrait t'apporter un peu de réconfort. C'est tellement injuste, tellement cruel. Mais je veux que tu gardes en tête qu'il y a encore de l'espoir, même dans ce noir profond où tu te trouves. Une fin heureuse est toujours possible, même quand tout semble perdu. Il y a toujours une raison de se battre, après tout.
Rappelle-toi toujours que tu es une lumière, Sota, une lumière que cet endroit sombre n'a pas pu éteindre. Ne laisse pas l'obscurité t'engloutir. Tu as toujours été un phare pour les autres, et même si ta cellule te semble un cocon de solitude, tu n'es pas vraiment seul. Comme tu as été là pour moi cette nuit-là, je veux être là pour toi, peu importe combien de temps cela prendra. Tu n'es pas seul dans cette épreuve, je me battrai à tes côtés. Et je te promets que je serai là jusqu'à la fin de ce voyage. On se retrouvera, Sota, peu importe les obstacles.
Ton gardien préféré,
Jun."
Lorsque je finis de lire la lettre, les larmes coulent sans arrêt sur mes joues. C'est une vague d'émotions qui m'envahit, à la fois douce et poignante. Chaque mot semble résonner dans mon cœur comme un écho de son amour et de son soutien. La surprise de voir à quel point il tient à moi me bouleverse profondément. Je n'avais jamais imaginé qu'il ressentait tout cela pour moi. Sa sincérité est à la fois réconfortante et déchirante.
Je reste là, à relire la lettre, encore et encore, incapable de croire que Jun a partagé ses sentiments de cette manière. Ses mots, remplis d'une telle profondeur, éclairent l'obscurité dans laquelle je me trouve. La douceur de ses paroles m'apporte un réconfort inattendu, un espoir là où je ne pensais plus en trouver.
Je sens une nouvelle énergie naître en moi. La tristesse et la déprime qui me paralysaient depuis des jours se dissipent peu à peu, remplacées par une détermination ardente. Jun m'a montré qu'il croit encore en nous, et cela me donne la force de croire en moi-même. Je me relève, essuie mes larmes, et la lettre en main, je décide de me battre pour me sortir de cette situation. Je dois gagner ce procès, non seulement pour moi, mais aussi pour mes sœurs et pour Jun .
Je suis déterminé maintenant, plus que jamais. Je me jure de ne pas laisser tomber, de tout faire pour retrouver la lumière au bout du tunnel, pour lui, pour elles. Je vais affronter cette épreuve avec la force qu'il m'a donnée, et je ne laisserai rien ni personne me détourner de mon chemin.
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Sous haute surveillance - Sota [MxM]
عاطفيةDans la prison impitoyable Fuchu, à Tokyo, Sota endure chaque jour l'oppression des murs froids et des règles strictes. Quatre ans se sont écoulés depuis son incarcération, et les journées se confondent dans une monotonie étouffante. Mais lorsque Ju...