Nos cœurs sous la cendre

Chapitre 20 - Elly

Avril 2025

______________________

J'ai vu la détresse s'infiltrer dans les yeux de Maximilien avant qu'il prenne la fuite et s'exile sur le balcon de nos amis. Ça va bientôt faire quinze minutes qu'il est sorti s'aérer. Je commence à m'inquiéter. Je ne sais pas ce qui l'a mis dans cet état. J'aimerais comprendre ce qu'il se passe dans sa tête pour lui venir en aide. Comme il m'aide moi à aller mieux.

Mes doigts sont crispés sur le verre que je tiens entre mes mains. J'essaye de rester à ma place, mais je fixe inlassablement la baie vitrée par laquelle Max est sorti. Sans réfléchir plus longtemps, je sui mon instinct et me lève du canapé. Mes amis continuent de parler sans prendre la peine de me jeter un seul regard.

Max est là, dos à moi. Il est penché au-dessus du vide. La tête rentrée dans les épaules. Sa souffrance irradie jusqu'à moi. J'ai envie de le prendre dans mes bras pour soulager sa peine. Qu'est-ce qui le met dans cet état ?

- Max ?

Ma voix est peu assurée. Ma supplique à peine audible. J'essaye de reprendre contenance en me tenant plus droite et en enfonçant mes mains dans la poche ventrale de mon sweat-shirt.

- Max ?
- Casse toi !

Son ton n'a jamais été aussi agressif avec moi. Même quand j'avais l'impression qu'il me détestait plus que tout au monde, il y avait toujours une certaine retenue dans sa voix. A cet instant, il n'y a plus rien à part une haine viscérale, une colère explosive qui pourrait tout détruire. Ses mots m'ont cloué au sol.

- Je t'ai dit de te casser putain !

Maximilien est toujours dos à moi. La colère fait gonfler ses muscles dorsaux. Les veines de son cou sont à deux doigts d'exploser sous la pression. Au lieu de reculer et de le laisser tranquille, je décide d'affronter le loup. Comme l'agneau est stupide.

Je m'approche de lui sans pour autant le toucher.

- Est-ce que ça va ? Il y a un problème ?

Un rire sans joie s'échappe de sa poitrine. Mon coeur se sert.

- Un problème ? C'est toi le putain de problème !

Sa rage m'explose en plein visage. Mon souffle se comprime dans ma gorge. Je n'arrive plus à respirer. Je croyais que les crises de manque étaient les choses les plus douloureuses que je n'ai jamais endurées. C'est totalement faux. La chose la plus douloureuse du monde, c'est le rejet et la colère de ceux qu'on aime. Ceux qu'on aime.

- Qu'est-ce que... Qu'est-ce que j'ai fait ?

J'ai perdu toute assurance face à lui. Sa fureur me brûle de l'intérieur. J'agonise sous ses flammes, sous ses mots.

- Tu es toi. C'est ça le problème.
- Max, regarde moi.
- Je veux que tu dégages d'ici bordel !

Je ne sais pas si je suis stupide ou suicidaire, peut-être un peu des deux, mais je décide de ne pas fuir. Cette fois, je reste. J'attrape Maximilien par le bras pour le tourner face à moi. La douleur qui se reflète dans ses yeux finit de m'achever. Je n'ai jamais vu autant de douleur. Mon cœur cesse de battre. C'est au tour de Max de me faire tomber dans sa noirceur.

- Laisse-moi t'aider.

Mon colocataire contracte les mâchoires pour s'empêcher de dire des choses qu'il pourrait regretter. La colère bout dans ses veines. Sa main est chaude dans la mienne.