Chapitre 3 - Erin

2.8K 220 3
                                    

J'ai remporté cette affaire haut la main et j'en suis très fière, mais le regard ambré qui me dévisage me rappelle à qui je viens de sauver les fesses et mon sourire s'affaisse. Il m'exaspère au plus haut point avec son air arrogant et sûr de lui. Je sors du tribunal sans les attendre, sur les marches je me stoppe en voyant la voiture garée de l'autre côté de la rue. 

C'est lui. Ses lunettes de soleil cache la moitié de son visage mais je sens ses yeux démoniaques me scruter. Mon corps réagit instantanément, il se souvient de tout ce qu'il lui a fait subir.

— Tout va bien? me demande Travis en posant une main dans mon dos.

— Oui, pourquoi? je tente d'éluder.

— Parce que tu trembles par 28°, réponds Jake.

Sa voix a toujours le même effet sur moi, ma peau se couvre d'un frisson. Je détourne la tête de l'homme qui me menace par sa simple présence pour ne pas éveiller leurs soupçons. Mon téléphone vibre dans ma main, j'ouvre le message reçu d'un numéro inconnu.

"Je t'avais pourtant prévenu de ne pas fricoter avec les SOH"

Je déglutis avec difficulté et plante les deux bikers ici, m'éloignant autant que possible d'eux. Jimmy avait pourtant été clair, je ne devais jamais défendre de MC et surtout pas celui de Jake. Lorsque j'ai été appelée pour Travis la première fois, Jimmy m'a appelé à peine rentrée à la maison. Si je continuais, je mourrais et je le croyais bien plus que n'importe qui d'autre. 

Je monte dans ma voiture et roule rapidement jusqu'à chez moi. Terrifiée je regarde à plusieurs reprise autour de moi avant de sortir. Je cours presque en traversant la route. Une fois ma porte d'entrée fermée, je m'y adosse en soufflant, soulagée. 

Quand je rouvre les yeux, je percute ceux de Jimmy qui m'attend contre le meuble de l'entrée. Appuyé négligemment contre le bois, ses mains s'ouvrent et se ferment à répétition.

— Je t'avais pourtant prévenu, tu ne peux pas juste écouter ce qu'on te dit pour une fois?

Sa voix me glace le sang, je connais chacune de ses intonations et mon corps dans un élan d'espoir se tourne vers la poignée dans l'espoir de lui échapper. Sa main atterrit violemment sur mon crâne, arrachant mes cheveux vers l'arrière. Il me jette un peu plus loin dans le salon, mon dos heurtant le pied de la table en bois. Un gémissement s'étouffe sur mes lèvres. Les coups pleuvent, judicieusement placés pour que je puisse les camoufler, comme à chaque fois. Le bassin, le ventre, les côtes, le dos. 

Je ne crie pas, je ne crie plus depuis longtemps, car personne ne vient jamais me secourir. Chacun vit pour soit, si on entend une femme hurler, on monte le son de la télévision, on change de trottoir, on fait demi tour mais surtout on n'intervient pas. J'attends patiemment qu'il s'arrête, les bras sur ma tête en guise de bouclier, mes genoux relevés devant mon ventre dans l'espoir de me protéger, vainement. Je finis par sombrer emportée par la douleur.

Lorsque je reviens à moi, je suis toujours allongée sur le sol contre ma table de salle à manger. La douleur se réveille avec moi, je palpe mes côtes ce qui m'arrache un cri de douleur. Surement fêlées. Je tente de me relever tant bien que mal et m'adosse contre le pied de la table, reprenant mon souffle après cet effort. Mon corps n'est que douleur, j'ai mal partout comme si j'étais passée sous un rouleau compresseur. La seule partie intacte est ma tête, comme à chaque fois.

J'ai quitté Jimmy il y a un peu plus de 6 mois et pourtant, il a toujours autant d'emprise sur moi. Il décide de qui je peux fréquenter, qui je peux défendre et si j'ai le malheur de ne pas aller dans son sens, il me le fait payer à sa manière. Si je veux lui échapper je dois disparaître mais je n'en n'ai pas envie. De disparaître s'entend! Je ne pourrais plus exercer le métier dont j'ai toujours rêvé, celui pour lequel j'ai travailler dur pendant des année, celui pour lequel j'ai mis ma vie de côté pour me consacrer uniquement à mes études. L'ironie de l'histoire c'est que c'est ce même métier qui m'empêche aujourd'hui de fuir ma vie catastrophique. Je finirai par mourir sous ses coups, mais j'espère réussir à défendre un maximum de personnes avant cela.

Je me relève difficilement et après plusieurs minutes, j'arrive à me déshabiller et me glisser sous l'eau tiède de ma douche. Je m'assois dans le bac et laisse l'eau couler dans mon dos, espérant vainement détendre mes muscles. Des hématomes apparaissent peu à peu sur mon corps entier, je vais souffrir pendant des jours voir des semaines. J'enfile un t-shirt et une culotte, avale des antidouleurs que j'ai toujours dans ma pharmacie et vais me coucher.


Lorsque je sors à nouveau de chez moi, il s'est passé presque une semaine. J'ai refusé tous les contrats qui m'ont été proposés, je n'étais pas en état de me mouvoir sans éveiller les soupçons. Aujourd'hui j'arrive à me tenir droite sans grimacer de douleur. Je descends mes escaliers et traverse la rue pour monter dans ma voiture. Jake est assis sur le capot, une cigarette à la bouche. Je soupire, il ne va donc jamais lâcher l'affaire? Si seulement il pouvait me coller une balle entre les deux yeux ça m'éviterait bien des désagréments. Je l'ignore et vais pour le contourner mais il m'arrête en attrapant mon avant bras. Je grimace involontairement et ses yeux se plissent. Il me lâche immédiatement, surpris.

— Un problème?, s'inquiète t il.

— Oui, toi!, je gronde.

— Je t'ai laissé le temps de te faire à l'idée, maintenant il va falloir coopérer, je suis pas dû genre patient.

— Et moi, pas du genre à vendre mon âme au diable.

Il rigole, ce son m'émerveille. Je le scrute un instant, sa barbe minutieusement taillée, ses cheveux bruns coiffés en catogan, ses yeux flamboyant. Il est diablement sexy. Lorsqu'il me surprend à le regarder, ses narines frémissent.

— Tu ne vends que tes services la baveuse. Et on paie bien.

— C'est non!

— Ce n'était pas une question, grogne t il, perdant patience.

— Tu peux rester ici tant que tu veux, je ne travaillerai jamais pour vous, je lui crache pleine de haine.

— Tu n'as pas envie de me mettre en colère crois moi, me menace t il.

— Je n'ai rien à perdre.

— Alors raison de plus.

Cette conversation n'a aucun sens, je lui tourne le dos et m'apprête à ouvrir ma voiture lorsqu'il me dit d'une voix basse et menaçante.

— Ne tourne jamais le dos à ton ennemi, ce serait signer ton arrêt de mort.

— Tu l'as déjà signé il y a 6 semaines de toute façon, je marmonne plus pour moi même.

Je monte dans ma voiture sans le regarder, il s'est enlevé de mon capot et je démarre, mettant le maximum de distance entre lui et moi. 

Sons of HellOù les histoires vivent. Découvrez maintenant