Chapitre 3

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Stefanie

— Non ! Il n'y a aucune nana qui a fait battre mon cœur de cette façon.

Cette phrase équivaut à un coup de poignard, qui me fend le cœur en deux et me coupe le souffle. Je ne devrais plus regarder les interviews d'Oliver à la télévision. À chaque fois, l'impact est plus violent. Douloureux. Mon amour-propre se fait piétiner sans pitié. Je le déteste ! Tout comme cette fille, scotchée à son bras. Je la déteste ! Les autres aussi. Celles avec lesquelles il s'affiche. Celles qui ont partagé son lit, dormi dans ses bras. Je les déteste ! Rageusement, j'essuie la larme qui coule sur ma joue.

Argh ! Pourquoi est-ce que je n'arrive pas à passer à autre chose ?

Mes sentiments persistent à s'accrocher, même après qu'il m'ait abandonnée. Je ne peux pas l'effacer de ma tête. Oliver a été mon premier amour - le seul, d'ailleurs - et celui à qui j'ai donné ma virginité. Ça représente tellement pour moi ! Cela l'est-il, pour lui ? Il est surtout le père de mon fils. Mis à part le bleu de ses yeux, Jonah en est sa copie conforme.

Que je le veuille ou non, le souvenir d'Oliver fait quotidiennement partie de ma vie.

Quand j'ai su que les Shadow Musicians donnaient un concert à Baltimore, je n'ai pas pu résister. Je voulais voir Oliver en chair et en os, et non pas sur un écran ou dans un magazine. Un accès de faiblesse que j'ai regretté. Me retrouver parmi ces fans hystériques n'a fait qu'accentuer ma frustration. Laquelle finirait sa nuit avec lui ? J'ai bien vu comment il flirtait avec elles. Ses sourires. Ses regards soutenus. Ses yeux ténébreux ont croisé les miens. Il y avait une probabilité infinitésimale qu'il m'aperçoive au beau milieu de cette marée humaine. Ce contact s'est produit. Et j'ai eu peur. Cette connexion, si courte fut-elle, m'a bouleversée. Alors, j'ai fui. Comme je sais si bien le faire quand je me sens en danger. Lâchement.

— Maman !

J'éteins rapidement la télé. Je ne veux pas que Jonah ait cette image de son père. Il sait qui il est. Des heures durant, je lui ai parlé d'Oliver. Je lui ai dit combien il était doux, gentil, attentionné. Je lui ai venté son don pour la musique et pour le chant. J'ai insisté sur le fait qu'il est une personne exceptionnelle.

J'ai menti.

Cet homme-là n'existe plus. Il n'est plus celui que j'ai côtoyé. Je ne le reconnais pas. Mais j'entretiens quand même son souvenir. Jonah et moi avons confectionné une boîte, dans laquelle nous stockons bon nombre d'objets. Des photos. Des CD. Des goodies. Jonah boit son chocolat dans un bol à son effigie. Je fais tout mon possible pour qu'il sache qui est son père. Jusqu'à maintenant, j'ai réussi à escamoter les questions de Jonah quant à son étrange absence. J'ai prétexté ses nombreux concerts aux quatre coins du monde. Je lui ai raconté qu'il l'aimait et qu'il viendrait bientôt le voir. Mon fils est encore crédule. Un jour, il faudra bien que je lui dise la vérité.

Son père nous a abandonnés.

Jonah court vers moi, sa peluche girafe à la main. Je l'attrape au vol.

— Tu t'es brossé les dents, ma grenouille ?

— Oui !

Il ouvre grand la bouche, ce qui me fait rire. Je le serre un peu plus dans mes bras.

— Tu sais que je t'aime, toi !

— Je t'aime aussi, maman !

Les petites fissures à la surface de mon cœur se colmatent instantanément. L'amour d'un enfant est puissant. Tout en avançant vers l'entrée, mon panda perché à mon cou, je lance gaiement :

My Love Song, second couplet : pardonner(tome 2)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant