Chapitre 7

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Oliver

J'ai l'intérieur du bide noué. Le cœur qui pique une pointe comme un train à grande vitesse. Les mains moites. Je ressens toujours ça avant de monter sur scène. Le trac. C'est une sensation qui me remplit d'énergie. Aujourd'hui, elle ne m'inspire pas. J'ai peur. Je vais rencontrer mon fils. Est-ce que je vais être à la hauteur ? Et s'il ne m'aimait pas ? Dans ce cas, je ne lui en voudrai pas. J'ai quand même boudé les quatre premières années de sa vie. Il va nous falloir du temps pour nous apprivoiser. J'espère que sa mère nous en laissera l'occasion. À ses yeux, je ne suis qu'une espèce de camé.

J'aurais dû éviter de prendre ce cacheton devant elle.

Quand la Chrysler de Stef stationne devant la maison, je suis on ne peut plus nerveux. Je passe une main tremblante sur mon front et peine à respirer. Mon cerveau me rappelle qu'il est temps de lâcher prise. D'un geste devenu automatique, j'attrape ma plaquette de pilules dans la poche de mon jean et m'apprête à en ingurgiter une. Mon geste reste en suspens. Un petit mec trottine vers l'entrée, une boîte en carton et une peluche entre les mains. Ma conscience se livre à un farouche débat. Suis-je capable de me passer de cette merde ? Ai-je envie que mon fils me voie comme un junkie ? Un coup retentit contre la porte. Je vais ouvrir, ma dose dans le creux de ma main. Le débat stoppe au moment où je croise le regard bleuté de Jonah.

Il est beau, putain !

Je fourre la pilule dans ma poche et les laisse entrer. Mon fils prend son temps pour me décrypter. Je n'ai moi-même pas bougé d'un poil. C'est ce môme, du haut de ses quatre-vingt-quinze centimètres qui prend les choses en main. Il tend sa boîte et sa peluche à Stefanie avant de s'approcher courageusement.

— Bonjour, papa !

Une sensation bizarre se diffuse dans mon corps. Une douce chaleur qui s'amuse à me liquéfier de l'intérieur. Je me laisse tomber sur les genoux, corrompu par sa voix de crécelle et son sourire en demi-lune.

— Salut, bonhomme !

Ses petits bras se nouent autour de mon cou. Je ne réfléchis plus. Instinctivement, j'enferme son corps entre les miens. Une drôle de connexion s'établit immédiatement. Un lien invisible mais pourtant bien réel. La même affinité qui me relie à mon père.

C'est donc ça, être parent ?

Je ferme les yeux, grisé par l'odeur de pomme qui émane de ses cheveux. Je n'ai pas envie de le lâcher. Des larmes m'échappent. Sournoises. Elles mouillent ses joues au passage. Jonah se recule et me fixe avec curiosité.

— Pourquoi tu pleures ?

Je renifle en me frottant les yeux.

— Parce que je suis heureux de te voir.

— Moi aussi, je suis content.

Il se raccroche une nouvelle fois à mon cou. Toutes mes appréhensions se tirent. Il ne me déteste pas ! Par dessus son épaule, je remercie Stefanie d'un sourire ravi. Ses yeux sont rougis. J'en déduis qu'elle ne regrette pas de nous avoir offert cette opportunité. Après un moment qui me paraît trop court, Jonah se décolle.

— Tu veux que je te montre ma boîte secrète ?

— Euh ! D'accord !

Il récupère la boîte que lui tend Stefanie, puis s'assoit en face de moi sur le sol. Je me sens un peu bête de l'accueillir pour la première fois dans une maison vide. Elle vaut un paquet de fric, mais elle est froide et inhospitalière.

— Je suis désolé ! Je viens d'acheter cette maison. Elle n'est pas...

— Maman me l'a expliqué, me coupe-t-il spontanément. C'est pas grave !

My Love Song, second couplet : pardonner(tome 2)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant