Supermundane tome 1

Episode 13 : petit oiseau

   Dans un garage de la ville, un homme inspecte une belle Volvo noire, il tourne autour à plusieurs reprises puis croise mon regard anxieux.

Petit, avec quelques kilos de trop, timide et maladroit, il observe le véhicule encore quelques instants puis finit par me faire part de son verdict :

-Pas mal ! Elle est vraiment nickel ! lance-t-il.

-Tu es d'accord pour me la reprendre rapidement ?

-Bien sûr, je ne vais pas laisser passer une bonne affaire pareille, dit-il en souriant. Tu te décides enfin à quitter ce bled ?

-J'ai eu comme un déclic lorsque Matt m'a virée. Je crois que ma vie n'est plus ici.

-Tu sais Leo, depuis le temps que je te connais, je me suis toujours dit que ta vie n'avait jamais été ici... aux côtés de cette femme, Georgia. Elle n'était pas faite pour avoir un enfant. Et encore moins pour adopter une petite orpheline comme toi... dommage que ce soit tombé sur toi.

-Tu n'es pas le seul à le penser. Puis, j'ai survécu, dis-je en riant.

Il est encore très tôt lorsque je quitte mon domicile, un grand sac en cuir à la main. Un homme charge plusieurs grandes valises dans le coffre d'un taxi. Il ne peut s'empêcher de ricaner lorsqu'il manipule les bagages griffés dans son coffre, tous des Louis Vuitton offerts par Georgia. 

Mal à l'aise, je réalise que j'ai l'air pleine aux as, mais je n'ai pas beaucoup d'argent. C'est ma belle-mère qui est riche, pas moi. Avec nonchalance, l'homme me hèle comme si j'étais une bourgeoise huppée insupportable.

Pfff, toutes les mêmes, marmonne-t-il pour lui-même en fermant le coffre avec force. Je fais semblant de ne pas avoir entendu.

Avant de m'assoir dans le taxi, je ne peux m'empêcher de faire quelques pas en arrière pour observer le bâtiment derrière moi, qui s'élance vers un ciel bleu azur. Le soleil radieux de Phoenix brille tout là-haut. Je pénètre enfin dans le taxi sans me retourner une seconde fois sur mon immeuble.

Le véhicule démarre et prend la direction de l'aéroport.

Me voilà enfin partie.

Il était temps.

Je traverse l'aéroport, mon sac sur l'épaule et une valise à roulettes qui roule derrière moi. J'avance parmi une foule en mouvement. Tout tourne autour de moi, m'emportant vers cette délivrance tant espérée.

Pourquoi ne suis-je jamais partie plus tôt ? 

Complètement déconnectée du brouhaha ambiant, je marche vers la liberté, encore plus vite, toujours plus vaillamment vers une nouvelle vie qui peut-être sera plus clémente avec moi que la précédente.

Je me sens comme sur un nuage même si l'inconnu me fait peur, même si la solitude me pèse. À cet instant, je ne pense pas à tout ça. Je ne veux plus me lamenter sur le passé même s'il me hante et me poursuit.

Je rêve juste de m'envoler tel un oiseau, de laisser tous mes soucis derrière moi.

Mais est-ce possible ?