Le Moncelino

Chapitre IV

Kim continua de boire plusieurs verres du liquide ambré, ignorant délibérément Abigail, qui l'observait avec une attention croissante. Voyant Kim s'enfoncer dans l'alcool, elle laissait transparaître une expression d'inquiétude mêlée d'agacement sur son visage.

- Vous devriez peut-être ralentir sur l'alcool, conseilla-t-elle d'un ton calme, mais ferme. À moins que vous ne souhaitiez être ivre avant notre conversation ?

Kim, imperturbable, se contenta de la toiser un instant avant de retourner à son verre, refusant obstinément de lui répondre. L'attitude désinvolte de Kim attisa l'impatience d'Abigail, qui insista.

- M'ignorer ne résoudra pas votre problème.

Mais Kim ne se laissa pas déstabiliser. L'alcool commençait à affecter son équilibre et elle se leva en titubant, s'efforçant de garder un semblant de dignité. Abigail, sur le qui-vive, s'approcha rapidement d'elle.

- Eh, là, faites attention, lança-t-elle, un mélange de frustration et d'inquiétude perçant dans sa voix.

Kim la regarda d'un air brouillé, ses pensées visiblement embrouillées par l'ivresse.

- Je... vais rentrer chez moi, déclara-t-elle d'une voix pâteuse, ses mots se heurtant les uns aux autres.

Abigail secoua la tête, un soupir las échappant à ses lèvres.

- Désolée de vous décevoir, mais je crains que ce ne soit pas une option pour le moment.

Le regard de Kim se durcit, et elle répliqua sèchement :

- Alors, dans votre foutu casino, il doit bien y avoir des chambres.

Elle planta son regard dans celui d'Abigail, un soupir légèrement agacé s'échappant de sa bouche. Abigail ne se laissa pas impressionner.

- Il y a effectivement des chambres dans l'hôtel associé au casino, admit-elle, mais il est hors de question de vous laisser aller comme ça dans votre état.

Kim ne sembla pas apprécier la réponse et rétorqua avec une pointe de défi :

- Vous me retenez prisonnière dans votre casino... Alors je vais  me chercher une chambre par moi-même.

Sans attendre de réponse, elle se détourna et se dirigea en titubant vers l'ascenseur. Abigail la suivit du regard, exaspérée. Un homme grand et mince, d'une cinquantaine d'années, aux cheveux gris et aux yeux bruns, s'approcha d'elle. Il avait tout observé de la scène, n'en perdant pas une miette.

- Qu'ai-je fait pour mériter cela ? soupira Abigail, désespérée.

L'homme esquissa un sourire amusé et répondit sur un ton léger :

- Être de la mafia, peut-être.

Abigail leva les yeux au ciel à sa remarque sarcastique.

- Merci pour l'analyse, Einstein, répliqua-t-elle avec ironie. Elle marqua une pause avant d'ajouter, plus sérieuse : Tu peux la surveiller... Je n'ai vraiment pas envie qu'elle cause la pagaille dans mon casino, et encore moins qu'elle fasse fuir les clients. Accompagnes-la jusqu'à une chambre.

L'homme hocha la tête avec professionnalisme.

- Bien, répondit-il simplement avant de se diriger calmement vers Kim, qui attendait l'ascenseur, chancelante.

- Mademoiselle, dit-il d'une voix douce en arrivant à sa hauteur, la patronne souhaite que je vous escorte jusqu'à une chambre disponible, pour vous aider.

Kim le regarda avec des yeux vitreux, essayant de se concentrer sur ses paroles.

- J'ai... pas besoin d'aide, répliqua-t-elle, avant d'entrer maladroitement dans l'ascenseur.

L'homme, imperturbable, la suivit à l'intérieur. Kim, dans un geste enfantin, appuya sur tous les boutons de l'ascenseur avant de se maintenir contre la rambarde pour garder son équilibre.

- Votre état me prouve le contraire... Mademoiselle...? dit-il avec une patience infinie.

- Johnson... finit-elle par murmurer.

- Enchanté, Mademoiselle Johnson, répondit-il avec un sourire chaleureux. Vous pouvez m'appeler Franck.

L'ascenseur finit par arriver à l'étage, et Franck prit délicatement le bras de Kim pour la guider jusqu'à une chambre. Il ouvrit la porte, prêt à l'accompagner à l'intérieur, mais Kim se tourna vers lui avec un regard vague, ses paroles lourdes de fatigue et d'alcool.

- Merci... Alfred...

Elle referma la porte avec maladresse, laissant Franck devant l'entrée, un sourire amusé aux lèvres.

- C'est Franck, pas Alfred, murmura-t-il en secouant la tête, avant de repartir.