IV.9

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« You'll be the saddest part of me, a part of me that will never be mine... »

The Loneliest de Maneskin résonne entre les murs de mon appartement, dans lequel je tourne en rond comme un fantôme sans but, sans personne à hanter. J'aurais pu écouter n'importe quelle chanson qui parle de rupture ou de la perte de l'être aimé ; ce n'est pas ce qui manque, chaque semaine il y en a une nouvelle, mais il me fallait quelque chose de plus sombre. Une chanson qui parle de deuil, de l'inéluctable et de l'inévitable, avec des paroles qui transpercent le cœur de quiconque l'écouterait, comme un fin scalpel méticuleux et horriblement précis. Des paroles auxquels je peux me raccrocher pour ne pas me noyer, des paroles qui décrivent parfaitement ce que je ressens, qui s'alignent sur mes émotions.

« It's obvious, tonight is gonna be the loneliest. »

Les nuits sont longues, terriblement longues. Elles ne semblent jamais finir, et j'y trouve un peu de réconfort seulement quand le sommeil me rattrape. J'ai perdu l'habitude d'être seule la nuit, et je me suis habituée aux mèches rouges éparpillées sur l'oreiller, à ce corps auquel je me collais avant de m'endormir, à la chaleur qui s'en dégageait. Désormais mes draps sont froids, mon lit désespérément vide. J'en viens à serrer ma couette entre mes bras pour compenser l'absence d'Hortense, et ainsi, quand je ferme les yeux dans cette position, j'ai presque l'impression qu'elle est encore avec moi. La remplacer par quelqu'un d'autre dans mon lit n'est pas une option envisageable.

« You're still the oxygen I breathe, I see your face when I close my eyes... »

Chaque putain de nuit je vois son visage. Impossible d'y échapper. La nuit exacerbe tout chez moi. La tristesse, la rancœur, la colère. On dit que la nuit porte conseil, mais je n'ai jamais été convaincue par cet adage. Le jour a au moins le mérite de me faire travailler pour oublier. Mes journées ne se résument plus qu'à ça. Je ne vais presque plus au Jones. J'ai trop peur de retomber dans mes travers.

« It's torturous, tonight is gonna be the loneliest. »

Ce n'est pas seulement de la torture, c'est une lente agonie. Comme si même la mort considère que je ne la mérite pas. Alors j'attends. Quand je ne travaille pas, j'attends. Mes jours de repos ne me reposent plus. Ce sont devenues des journées interminables, des journées dans lesquelles je ne peux plus noyer ma tristesse dans le travail, des journées où j'attends le moindre petit signe d'Hortense, toujours en vain. Savoir que la personne que l'on aime est à la fois si proche et si inatteignable est une sensation vraiment désagréable. Une piqûre de rappel chaque matin, comme une aiguille insidieuse qui pique mon cœur.

Cette douleur s'est renforcée depuis qu'Hortense n'est plus dans son appartement. J'étais intriguée et inquiète de ne pas l'avoir entendue pendant plusieurs jours. J'ai d'abord cru qu'elle était partie chez ses parents. Peut-être pour ne plus me voir, pour m'oublier plus facilement, pour s'éloigner du mal que je lui ai fait. La partie la plus sombre de moi, terrée au fond de mon esprit, espère qu'elle culpabilise, qu'elle s'en veuille, qu'elle regrette. Quelle merde je suis. Je souffre tellement que j'ai envie qu'elle souffre aussi. Je me déteste. Je ne doute pas un instant qu'elle ressent cette même douleur également. J'ai beaucoup de choses à me reprocher. Si elle est partie, c'est ma faute.

Mais je faisais fausse route. Elle n'est pas chez ses parents. Je l'ai appris grâce à son amie Perrine qui garde son chat et son appartement en attendant son retour. Je me souviens que cet hiver, pendant les fêtes, c'était moi qui étais venue voir Pouic tous les jours. Un nouveau crève-cœur. En croisant son amie sur le palier, je n'ai pas résisté à lui demander où était Hortense, et si elle revenait bientôt. J'avais besoin de savoir, d'être sûre. Je voulais qu'on me dise qu'elle se porte bien, malgré tout. La réponse de Perrine m'a fait retomber de dix étages. Elle est partie pour trois semaines. En Corée du Sud. Avec une amie. A deux. Je ne me rappelle plus très bien ce qu'elle m'a dit ensuite, à vrai dire ça ne m'intéressait plus, mais ce dont je me rappelle très bien, c'est d'être retournée dans mon appartement avec la bouche pâteuse, une sensation de lourdeur dans l'estomac et une douleur vive au cœur.

Cœur de pierre, esprit de fer (BagheraJones & HortyUnderscore Fanfic)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant