Cœur de pierre, esprit de fer (BagheraJones & HortyUnderscore Fanfic)

IV.6

J'observe le visage de Justine, profondément endormie dans son lit. Je dirais même que je l'admire, car comment ne pas l'admirer. Elle semble si paisible désormais et j'aimerais la voir comme ça tous les jours. J'aimerais qu'elle me réveille tous les matins avec son sourire angélique et ses doux baisers dans mon cou. J'aimerais qu'on la laisse enfin tranquille, que la vie arrête de s'acharner sur elle injustement. Justine a vraiment eu une sale nuit. Elle a même pleuré devant moi. Pour la première fois depuis que nous nous connaissons, elle m'a laissé voir ses larmes, elle n'a pas fui. Je crois qu'elle n'en avait pas la force. Mon cœur s'est lentement déchiré en voyant cette blonde si forte, si courageuse, bien plus que n'importe qui, s'écrouler au sol. C'est quelque chose que je ne veux plus jamais revoir. Quelque chose de pire que mes cauchemars.

L'image de Justine en pleurs à côté des toilettes m'a hanté toute la nuit. La phrase qu'elle a prononcée aussi. Je veux qu'Eddy revienne. Purée. Encore lui. Je ne peux pas m'empêcher de le haïr même si c'est stupide de haïr un mort. C'est sa mort qui donne des cauchemars à Justine. C'est son absence qui l'empêche de dormir, qui lui enlève son sourire quand elle pense à lui – et elle pense souvent à lui en ce moment – à tel point qu'elle se rend malade avec ça. Ce n'est pas normal de finir dans cet état en pensant à quelqu'un. Je la revois être recroquevillée à côté des toilettes, son corps tremblant de spasmes procurés par ses pleurs. Je l'ai prise dans mes bras, je l'ai serré aussi fort que j'ai pu. Elle a enfoui son visage dans mon cou. Elle a pleuré pendant de longues minutes qui m'ont semblé durer des heures.

Maintenant que l'orage est passé, je suis soulagée de la voir paisiblement endormie. Quand elle se réveillera, je lui apporterai un café chaud et je lui ferai un bisou sur le front. Un café et un bisou. C'est tout ce que je suis capable de lui donner pour la libérer de ses démons. Mais ses démons sont bien trop puissants pour se contenter d'un café et d'un baiser. Je le sais et ça me fait peur. Justine doit le savoir aussi. Je n'ai peut-être pas les épaules pour la protéger de son passé. Peut-être pas assez de courage non plus.

Mes pensées parasites s'envolent lorsque je vois Justine bouger doucement. Ses yeux s'ouvrent difficilement. Un faible sourire apparaît sur ses lèvres quand elle me voit, assise à côté d'elle, en train de scruter ses moindres réactions. Ma main rejoint sa joue, la caresse avec le pouce, elle émerge petit à petit. Un semblant de calme est revenu.

« Comment tu te sens ?

- J'ai mal à la tête, dit-elle en posant sa main sur son front.

- Je vais te chercher un médoc'. Bouge pas. »

Je sors du lit pour chercher un verre d'eau et un médicament. Je les lui rapporte, puis repart pour un autre aller-retour afin de lui faire un café. Je tapote nerveusement mes doigts contre le plan de travail de la cuisine pendant que le café coule. Quand la machine s'arrête enfin de faire du bruit, je me précipite à nouveau vers la chambre et je mets la tasse entre les mains de Justine, avant même qu'elle puisse dire quoi que ce soit. Et, comme je l'avais dit, je lui dépose un doux baiser sur le front, qu'elle accueille avec un petit sourire. Un sourire fatigué qui témoigne d'une nuit difficile.

« Merci mon cœur. Qu'est-ce que je ferais sans toi ?

- Tu te serais fait un café en vitesse puis tu serais allée travailler comme si de rien n'était. Et ne me dis pas non, je te connais.

- Faudrait quand même que j'aille bosser... »

Elle est sérieuse ou elle se fout de moi ? Je lui lance un regard ahuri. Elle baisse le regard vers sa tasse. Ce n'est jamais arrivé. Ce n'est pas la Justine que je connais. La Justine que je connais ne baisse pas le regard. Pas même face à un homme de deux mètres. Et encore moins face à moi. Venant d'elle, ce regard qui se baisse est un signe de faiblesse. Justine a toujours été un roc, une branche solide, ma branche solide. Quelque chose ne va pas.