Chapitre 28 : Bestioles et balai

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Cela fait plusieurs heures, maintenant, que Minerva arpente le grand hall. Les traits tirés, la mine sérieuse et les mains jointes dans le dos, elle fait les cent pas devant la porte d'entrée. Les rares élèves encore hors de leur dortoir à cette heure tardive – deux préfets, une élève sortant de trois heures de colle avec M. Rusard et deux petits malins en mission ninja pour les cuisines – ont tous sursauté en la trouvant là.

Alors, quand, enfin, la porte s'ouvre sur une silhouette sombre et élancée, elle bondit dans sa direction et lui agrippe les avant-bras, de fort méchante humeur.

— Severus ! Par Merlin, vous voilà de retour.

Elle est furieuse, ou peut-être inquiète ? C'est parfois difficile de faire la différence, alors Severus ne répond rien. Après tout, ce n'est pas sa faute à lui s'il s'est fait arrêter illégalement par deux aurors stupides.

— Personne ne m'a tenue au courant de rien depuis le patronus de Kingsley après votre libération, s'égosille la directrice. Allez-vous m'expliquer ce qu'il s'est passé ? Et où est Harry ? Il n'est pas avec vous ? Ne me dites pas que vous n'êtes pas parvenus à mettre vos différents de côtés, ce serait absurde. Vous savez, tous les deux, qu'avec vos caractères respectifs il va vous falloir tempérer vos accès d'humeur. Vous êtes adultes, enfin, mettez-vous donc...

Sur le visage de Rogue, l'agacement naissant laisse soudain place à la stupéfaction, puis à la crainte, et il la coupe dans son monologue emporté.

— Comment ça « où est Harry ? » Il n'a jamais été avec moi, Minerva. J'étais retenu contre mon grès au ministère, je ne comprends pas de quoi vous parlez.

Le visage de McGonagall se décompose.

— Comment ça ? Il n'était pas avec vous ?

— Pourquoi l'aurait-il été ? J'étais parti voir Drago.

— Oui, bien sûr, mais... quand j'ai appris qu'Harry n'était plus au château, j'ai pensé qu'il était peut-être parti avec vous... Ou que vous l'aviez suivi...

— Que je l'aurais... Mais pourquoi, diable, aurais-je eu besoin de le suivre ? Il était encore à l'école quand je suis parti !

Minerva retire ses lunettes en écailles vertes, en nettoie les verres avec un pan de sa robe de sorcière, puis les remet après avoir secoué la tête.

— Je n'en suis pas sûre...

Qu'est-ce que ça veut dire ? Ça n'a aucun sens, cette vieille chatte perd tout simplement la boule. Pourtant, Severus jette un œil inquiet à la grande porte, il hésite à planter Minerva là pour foncer jusqu'à la maison au bord du loch. Dans quoi ce foutu cornichon s'est-il encore fourré ? Qu'est-ce qu'il a encore bien pu faire comme cornichonneries ? Sauf que ce n'est pas à Harry qu'il en veut, là tout de suite. Ce n'est pas Harry qu'il a envie de secouer. Ce n'est pas à Harry qu'il mettrait volontiers des baffes si l'occasion lui en était donnée. Non, cette fois, cette unique fois, peut-être, c'est lui le cornichon. Lui, l'imbécile. Lui le lâche. Voilà à quoi ça mène de faire l'autruche pour éviter une discussion sérieuse ou pour profiter de la libido débridée de son compagnon. Il aurait dû insister après Noël, quand il l'a trouvé bizarre. Il aurait dû insister il y a bien plus longtemps que ça. Mais il faut d'abord qu'il se calme, qu'il voie les choses dans leur ensemble. Et qu'il dorme un peu, aussi, parce qu'il n'a pas les idées claires. Sauf qu'il n'a pas le temps pour ça. Il regarde encore la grande porte, se mord les lèvres, en plein dilemme, mais choisi de se retourner vers sa collègue. Il doit réfléchir avant d'agir. C'est comme ça qu'il est resté en vie malgré son rôle d'espion. C'est comme ça qu'il retrouvera Harry.

— Racontez-moi ce qui s'est passé depuis mon départ.

La triste réalité, c'est que Minerva n'a pas grand-chose à lui apprendre. Elle a bien noté son départ vers midi trente le lundi, mais l'absence d'Harry n'a été remarquée que bien plus tard, ce soir-là. En interrogeant les élèves censés avoir eu cours avec lui, elle a découvert qu'il ne s'était pas présenté pour ses entraînements du jour et qu'il avait été vu pour la dernière fois le dimanche soir, pendant le dîner. Elle en a déduit que leur dispute avait été plus violente que d'habitude, que Harry avait quitté le château et que Severus était parti le chercher alors qu'elle le pensait à Sainte Mangouste. Le tout sans l'en avertir, ce qui l'a mise très en colère. Ne voyant aucun d'eux revenir, elle a envoyé un hibou chez Harry et un autre à Sainte Mangouste. Quand le premier est revenu avec sa lettre, elle a commencé à vraiment s'inquiéter. Et quand la réponse de Sainte Mangouste lui est parvenue, elle a décidé de contacter Kingsley sur le champ, en lui envoyant son patronus. Celui-ci lui a répondu une heure plus tard, de la même manière, en lui résumant très brièvement les derniers événements.

La complainte de la Vouivre (Snarry)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant