🔮𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝐈𝐈| 𝐏𝐚𝐫𝐭𝐢𝐞 𝐈𝐈🔮

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Après avoir ramené le calme au sein de l'amphithéâtre, le professeur entame son cours, nous pressant d'ouvrir nos grimoires. La thématique du jour est la projection astrale, une pratique fascinante qui consiste à séparer l'esprit du corps et de voyager dans d'autres plans d'existence mais qui nous est interdite jusqu'à l'année prochaine. Cette soirée... En y réfléchissant bien, si je pouvais y échapper, je m'enfuirais à toutes jambes. Ma mère sera certainement présente ce soir-là, et si je lui fais honte, elle m'en tiendra rigueur. Je suis définitivement horrifiée par ce que pourrait receler mon destin.

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Un soupir s'échappe de mes lèvres tandis que je range mes affaires. Dehors, la nuit est déjà tombée. Après cette journée éprouvante, je n'ai qu'une envie : aller me reposer. Mon dernier cours s'est terminé à dix-neuf heures. Pourtant, je n'en fais pas un reproche, le lundi est dédié aux cours théoriques, m'épargnant ainsi l'humiliation des cours pratiques. Heureusement, demain est une journée libre pour tous les étudiants, les professeurs seront occupés à préparer la soirée, aucun cours n'est prévu.

Alors que je glisse mon sac sur mon épaule, l'amphithéâtre est presque désert. Pressée de retrouver mes appartements, je traverse le long couloir avant d'atteindre l'escalier en colimaçon qui mène à mon étage.

Lorsque j'atteins ma porte, elle s'ouvre avec un léger cliquetis et je suis accueillie par la chaleur de mes appartements. Avant même que je ne pénètre dans la pièce, une voix chantonnante m'accueille.

— Comment s'est passée votre journée, mademoiselle Tehrani ? demande Rhix en inclinant légèrement la tête, faisant osciller ses longs cheveux bleu nuit sur ses frêles épaules.

Rhix est une brownie, pas plus grande qu'un enfant de dix ans, mais c'est une travailleuse acharnée. Depuis que je suis arrivée ici, elle fait toujours le ménage dans mes appartements, sans que je comprenne pourquoi. Au début, je refusais qu'elle le fasse, gênée, mais quand j'ai compris que pour les brownies, c'était une véritable source de bonheur, je ne m'y suis plus opposée. Pour la remercier, je lui fais toujours cadeau de petites babioles qu'elle utilise pour confectionner des tenues et des accessoires. Aujourd'hui, elle porte une robe en tulle rose poudré qui fait ressortir sa carnation gris pâle. Ses yeux totalement noirs me scrutent en attente d'une réponse de ma part.

— Fabuleuse, comme toujours, répondis-je avec un sourire fatigué. Et arrête de m'appeler mademoiselle, je t'ai dit que tu pouvais m'appeler Anya.

Comme à son habitude, Rhix ignore mes propos.

— Un colis vous attend sur votre bureau, Mademoiselle, m'informe-t-elle avant de disparaître.

Je lève les yeux au ciel et dépose mon sac sur le bureau où je remarque une lettre couleur crème portant le sceau de ma mère posée sur une grande boîte noire. Mon cœur se serre. Elle va sûrement m'annoncer sa venue demain et me donner des instructions en tant que membre de la grande famille Tehrani, même si je n'ai jamais agi comme telle.

Je saisis la lettre et me laisse tomber sur mon immense lit à baldaquin. Je brise le sceau et commence à la lire, mon cœur battant à tout rompre.

« Très chère Anya,

J'espère que ma lettre te trouvera en bonne santé et prête à embrasser ton destin avec courage et détermination. Je suis ravie de t'annoncer que je serai présente au bal organisé en l'honneur de la fête du Sort Destiné et j'ai hâte de te voir y briller.

Je souhaite que tu te prépares avec soin et élégance. Tu es ma fille, et je crois en ton potentiel pour réaliser de grandes choses. Que cette soirée soit le début du chemin glorieux qui t'attend.

Pour t'aider à te parer pour cette occasion spéciale, j'ai pris la liberté de t'envoyer une robe que je souhaite te voir arborer avec grâce et fierté. Que son élégance reflète la noblesse de notre lignée et ta force intérieure.

Je te souhaite également une nuit mémorable et pleine de succès. Que cette célébration marque le début d'une nouvelle ère pour toi.

Avec tout mon amour et mes meilleures pensées,
ta mère,

O. Tehrani

P.-S. : Je compte sur toi pour faire honneur à notre nom et à notre lignée. »

Elle choisit rarement ses mots avec tant de douceur. Il y a toujours une manipulation en filigrane. Je soupire profondément, lasse. J'aurais tant voulu être enthousiaste, profiter de ma vie, de mes études. Éviter d'être une déception totale. Je me redresse sur le lit qui rebondit. J'ouvre la grande boîte et en sors une magnifique robe bleue aux motifs argentés. Ma mère ne fait jamais les choses à moitié. Je la sors pour la poser sur le lit, referme la boîte et me rallonge, fixant le plafond de marbre.

Depuis toujours, j'ai l'impression d'être une fille sans valeur, une paria. Dans ma tête, le temps se trouble sans cesse. J'ai l'impression d'être constamment épuisée. Non mais qu'est-ce qui cloche chez moi? Les regards méprisants, les paroles blessantes, tout cela résonne en moi comme un murmure incessant. Pourtant, malgré tout, je garde en moi une lueur d'espoir, une force qui me pousse à avancer malgré les obstacles.

La robe bleue posée sur mon lit est comme un symbole de cette résilience, de cette capacité à surmonter les épreuves, comme si j'avais le droit d'aspirer à quelque chose de plus glorieux pour une fois. Je me lève lentement, laissant mes doigts effleurer le tissu soyeux, comme pour me convaincre que je suis capable de briller, malgré tout. Je ferme doucement les yeux et, dans le silence apaisant, je me remémore les douces mélodies que mon père me chantait autrefois. Dans mon esprit, j'entends sa voix chaleureuse envelopper la pièce, elle efface mes soucis et apaise mon cœur. De ma voix, je l'accompagne comme s'il était à mes côtés.

À travers les échos de ces chants familiers, je me replonge dans des souvenirs lumineux et tendres, lorsque mon père était encore parmi nous. Je me concentre sur chaque mot, chaque note, laissant cette musique intemporelle s'élever dans mon esprit et m'apporter réconfort et force. J'aurais adoré qu'il soit là. Je me lève pour enfiler la robe. Demain, je serai maîtresse de ma propre destinée. Malgré la délicate attention de ma mère, je devrais me préparer mentalement pour l'affronter.

𝐓𝐡𝐞 𝐡𝐚𝐮𝐬𝐞 𝐚𝐟 𝐛𝐚𝐧𝐞𝐬| 𝐋𝐢𝐯𝐫𝐞 𝐈 Où les histoires vivent. Découvrez maintenant