Chapitre 46

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Elena

Jack m'a laissé en plan après avoir aboyé ses ordres. J'ai comme un sentiment de déjà vu, les tables sont regroupées et recouvertes de couvertures pour accueillir les blessés qui ne sauraient tarder. Mon rythme cardiaque augmente quand je prends la mesure du nombre de lits de fortunes qui ont été créées. Jack a parlé de quelques blessés. Je ne sais pas à combien ils sont partis en mission, mais je dénombre dix places pour recevoir des soins.

— Messieurs, bonjour. Dégagez le passage.

Je me retourne et découvre le Doc.

— C'est un plaisir de vous revoir, mademoiselle. Je suis heureux de constater qu'ils ne vous ont pas tuée, vous allez pouvoir vous rendre utile.

Interdite, je le dévisage, choquée par ses propos.

— Ne le prenez pas personnellement. C'est juste qu'en général, je ne vois jamais deux fois un visage innocent comme le vôtre. D'ailleurs, vous me rappelez quelqu'un...

— Assez de bavardages.

Jack nous coupe. Le Doc a attisé ma curiosité.

Je lui fais penser à qui ?

— Ne distrais pas mes hommes ni le Doc, m'ordonne le pres'. Son ton est à peine volé d'une menace. Je n'ose pas détourner les yeux, attendant qu'il reparte, loin de moi.

Le Doc, ayant par la même occasion compris le message m'adresse une moue compatissante, sans oser poursuivre notre conversation.

— Elena.

Je me retourne et découvre Jared, les bras encombrés de bandes, de compresses, mais également de sacs de flacons de désinfectant. On dirait que depuis la dernière fois, ils ont refait du stock.

— Jared.

Je ne prends pas la peine de lui faire la conversation. Après tout, il m'évite, alors il assume. Je le décharge et commence à confectionner des petits kits sur chacune des tables, ça m'évitera de courir dans tous les sens lors du rush. Je ne fais plus attention à mon meilleur ami qui finit par s'éclipser. Le Doc, de son côté, ouvre sa mallette qui regroupe un nombre impressionnant de scalpels, des aiguilles et plusieurs rouleaux de fil pour recoudre les plaies. L'adrénaline se répand dans mon corps. Je ferme les yeux quelques secondes, m'imaginant que je suis dans la salle des urgences de l'hôpital, je pourrais presque sentir l'odeur aseptisée si reconnaissable de ce genre d'endroit. Une pointe de nostalgie me gagne. C'est donc là l'un de mes derniers moments à passer au club, une ultime possibilité de leur faire mes adieux, sans pour autant les formuler à voix haute.

Des klaxons me parviennent, puis des grincements de pneus, nous informant l'arrivée imminente des blessés. De gros baraqués envahissent l'espace, portant des têtes connues et les posant avant de repartir.

— Oh mon dieu ! Waren !

Je me précipite à son chevet. Sa peau mate est recouverte de sang. Son cuir, poisseux, colle à son t-shirt écarlate. Je ne sais même par où commencer. Je perds mes réflexes face à ce visage que je connais tant. Les paupières closes, un sifflement sort de sa bouche à chaque inspiration.

— Waren, tu m'entends ? Ouvre les yeux, murmuré-je, essayant de capter son attention.

Ma supplique ne le fait pas bouger. Ça ne me dit rien qui vaille, mais je me refuse à penser au pire. Rapidement, je farfouille dans la mallette du Doc et déniche une paire de ciseaux. Sans perdre de temps, je découpe le haut maculé. Il y a tellement d'hémoglobine que je peine à voir d'où provient l'hémorragie.

— Que s'est-il passé ? questionné-je l'un des gars près de moi.

— Ce sont les affaires du club.

Black Shadow : l'écho des secrets [en cours de réécriture]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant