Chapitre 49

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Je suis stressée de rentrer en France. C'est bête parce que c'est moi qui ai fait cette requête et pourtant maintenant je ne ressens plus cette envie qui m'a pris avant. Je sais très bien pourquoi. C'est que j'ai peur, peur de retomber au plus bas en disant à mes parents ce que j'ai sur le cœur depuis dix-huit ans. Dix-huit ans où je gardais tous mes problèmes pour moi et je sais que quand je vais tout énoncer à voix haute, quelque chose en moi va changer à tout jamais.

Alors, je prépare ma lettre que je vais lire demain devant leur tombe et que je vais laisser, histoire de laisser ma trace.

-T'es sûr que ça fait pas bizarre cette perruque ?

-Mais nan, ne t'en fais pas tu es très belle comme ça, même si je te préfère au naturelle.

J'ai des doutes sur les paroles de Marco mais je ne peux plus faire marche arrière, je suis déjà de retour dans ma ville natale. Rien n'a changé, tout est comme je l'ai laissé l'année dernière, sauf ma maison. Je suis passée devant et il y a des nouvelles personnes. Ça fait bizarre de revenir ici surtout que cette maison a vu toutes les phases de ma vie et toutes mes humeurs.

J'ai déjà envie de pleurer, ça promet.

Arrivé au cimetière, Marco demande l'emplacement de la tombe et nous y allons.

Voir les noms de mon père, ma mère et mon frère me fend le cœur. Je savais qu'ils étaient morts, mais, là j'en ai la preuve irréfutable car leurs noms sont inscrits. Pourtant une dernière écriture attire mon œil et les larmes coulent toutes seules et je sens mon cœur se déchirer.

“Célestine Bélaire
2005-...”

La main de Marco se pose sur mon épaule en guise de soutien et je sais qu'il ne sait pas où se mettre.

-Je suis désolé que tu vois ça, hum, je te laisse te recueillir le temps qu'il te faut, je suis sur les bancs à l'entrée du cimetière, tu me rejoins quand tu finis.

J'hoche la tête et sors la feuille de ma poche sur laquelle j'ai noté mes pensées hier soir et commence à la lire.

“Papa, maman, Kévin,
Je suis contente de venir vous voir même si j'aurai préféré vous voir en chair et en os et que ce soit pour une autre raison.
Je tiens tout d'abord à m'excuser d'avance pour les propos que je vais tenir dans cette lettre envers vous. Je sais que c'est lâche car je ne l'aurai jamais fait de votre vivant et on peut dire que je profite de la situation. Alors j'espère que vous allez me pardonner de la haut et je veux que vous sachiez avant tout je vous…aimes.”

J'ai du mal à distinguer les lettres car ma vue s’embue en même temps que je lis la lettre. Je vais y laisser une partie de moi.

Allez Célestine tu vas y arriver.

“Merci pour tout ce que vous avez fait pour moi. Vous m'avez logé, nourri, payé une école, offert des vacances et des beaux cadeaux. Alors merci pour ça car je sais que certaines personnes n'ont pas cette chance.”

Je lâche la lettre des yeux pour regarder la tombe.

-A partir de maintenant, je m'excuse de ce que je vais dire et j'espère que vous ne serez pas trop blessés, j'en ai besoin pour avancer et j'ai conscience que mon comportement est égoïste.

De retour sur ma feuille je prend une grande inspiration pour ne pas que je m'effondre tout de suite.

“Le truc que je pourrais vous reprocher c'est de ne pas avoir été assez présent physiquement. Depuis que je suis petite j'ai l'impression de passer après Kévin et de ne pas être assez pour vous. A chaque fois que je voulais jouer avec lui et qu'il travaillait, vous me criiez dessus pour que je laisse tranquille. J'avais cinq ans. Je ne savais pas ce que c'était de travailler alors j'allais dans ma chambre et je pleurais toute seule. C'est arrivé plusieurs fois et je pense qu'en m'expliquant pourquoi je ne pouvais pas jouer avec lui, j'aurai peut-être compris. Puis, les années ont passé et, maman, me dire que je suis grosse, qu'il faut que je fasse un régime sinon on allait se moquer de moi et bien ça n'a pas aidé pour ma confiance en moi. J'avais neuf ans quand ça a commencé. Depuis, à chaque fois que je me vois dans un miroir je me trouve moche, grosse et je me demande si un jour quelqu'un me trouvera jolie et moi la première. T'aurais pu me dire que je suis jolie et faire le rééquilibrage alimentaire sans m'envoyer voir une nutritionniste à huit ans sous prétexte que j'avais un peu de ventre.”

The truth of a lifeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant