XXIII - Sous le poison du doute

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Jordan Bardella.

L'esprit de Gabriel se troubla un instant, comme un brouillard épais, tandis qu'il relisait le document. Il parcourut la ligne encore et encore, espérant presque que les lettres se réarrangent d'elles-mêmes pour révéler un autre nom. Mais non, il était bien là, gravé en noir et blanc : Jordan Bardella. Son cœur s'emballa. Que faisait Jordan à cette soirée ? Pourquoi s'était-il retrouvé dans le cercle de personnes si proches de Pelezzi ?

« Hé, Gabriel. » La voix de Tobias le tira de sa torpeur. Il leva les yeux, réalisant que son ami l'observait avec un air d'inquiétude. « Écoute, c'est le psychologue de Pelezzi, sa présence est peut-être normale. Ils ont peut-être discuté dans le cadre des séances. »

Gabriel tenta de se raccrocher à cette explication, mais il n'y parvenait pas. Il connaissait Jordan, du moins l'avait-il toujours cru, et l'idée qu'il se soit retrouvé au cœur de cette soirée, au milieu de suspects et d'alliés potentiels de Pelezzi, lui nouait l'estomac. « C'est peut-être vrai... » murmura-t-il, plus pour lui-même que pour Tobias. Mais une question plus lourde persistait dans son esprit : Pourquoi tu étais là-bas, ce soir-là ?

Il inspira profondément, essayant de faire taire le tumulte de ses pensées, de retrouver son sang-froid. Il savait qu'il ne pourrait avancer sans réponses. Ce n'est peut-être rien, mais...

« Pelezzi est encore là ? » demanda-t-il brusquement, ses yeux se fixant sur Tobias avec une intensité nouvelle.

« Oui, en cellule, pourquoi ? Qu'est-ce que tu comptes faire ? » demanda Tobias, vaguement alarmé par le ton déterminé de son ami.

Gabriel passa une main nerveuse dans ses cheveux. « Je vais lui poser des questions sur Jordan. Je dois comprendre ce qu'il faisait à cette soirée. Pourquoi il était là, avec eux. S'il me cache quelque chose, je dois le savoir, maintenant. »

Un éclat sombre traversa son regard, un mélange de doute et de colère à peine contenue. Tobias le dévisagea, comprenant l'ampleur du choc pour Gabriel. Ce dernier accordait rarement sa confiance, et Jordan avait su se frayer un chemin là où bien peu avaient réussi. Si Jordan avait menti... Gabriel se redressa, une étincelle froide dans le regard.

Tobias hocha lentement la tête, lui laissant le champ libre. « Va lui parler. Moi, je vais m'occuper de croiser toutes les identités de ton père avec les noms présents à cette soirée. Peut-être qu'on trouvera quelque chose. »

Gabriel acquiesça sans un mot de plus et se dirigea rapidement vers la cellule où Pelezzi était maintenu. À mesure qu'il s'éloignait, Tobias sentit son propre instinct d'enquêteur s'activer. Un doute, même minime, était une piste qui méritait d'être suivie. Il sortit son téléphone et envoya un message rapide à un membre de son équipe : « J'ai besoin d'une recherche approfondie sur un certain Jordan Bardella. Envoie-moi tout ce que tu peux trouver, même les détails les plus anodins. »

Tobias rangea son téléphone, le front plissé. Il connaissait Gabriel mieux que personne et savait combien il tenait à Jordan. Il espérait de tout cœur que son ami ne découvrirait pas ce qu'il redoutait.

De son côté, le brun marchait d'un pas vif dans les couloirs du commissariat, sa mâchoire serrée à s'en faire mal. Il sentait son cœur battre à un rythme anormal, une tension qu'il n'arrivait pas à relâcher. L'idée que Jordan ait pu être mêlé de près ou de loin à cette soirée ne cessait de le hanter, comme une écharde qu'il n'arrivait pas à enlever. Pourquoi ? Cette question résonnait en boucle dans sa tête, amplifiant son trouble à chaque pas.

Il s'arrêta un instant, pris une inspiration profonde, fermant brièvement les yeux. Contrôle-toi, Gabriel. Ce n'est pas le moment de laisser tes émotions prendre le dessus. Il se répéta cette phrase comme un mantra. Pour obtenir des réponses, il allait devoir affronter Pelezzi, et il savait que cet homme, aussi instable qu'intelligent, n'hésiterait pas à exploiter la moindre faiblesse. Si Gabriel laissait transparaître la moindre trace de colère ou de doute, Pelezzi le sentirait. Il lui fallait rester impassible, professionnel, malgré la tempête qui grondait en lui.

Echos des Brumes [ BARDATTAL ] Où les histoires vivent. Découvrez maintenant