Echos des Brumes [ BARDATTAL ]

IV - Un sauveur inattendu

Le son sec du dossier qui claqua contre le bureau résonna dans la pièce, brisant le silence. Gabriel se laissa tomber en arrière dans son fauteuil, les yeux fixés sur les papiers éparpillés devant lui. Il avait repris le dossier en cours, mais son esprit était ailleurs.

Il repensa à la veille, à cette soirée qui avait pris une tournure inattendue. Pourtant, son objectif initial avait été clair : entrer en contact avec Fabio Pelezzi, leur principal suspect. Qu'est-ce qui lui avait pris de se laisser distraire par de beaux yeux bruns ? Il était envahi par des pensées qu'il ne pouvait plus ignorer. Il était troublé. Il y avait quelque chose chez Jordan qui l'avait animé. Son esprit revenait sans cesse aux moments de la veille, cherchant à percer le mystère qu'il incarnait. Gabriel se força à revenir à son travail, balayant mentalement ses pensées perturbatrices. Il se pencha sur les documents et les rassembla.

La porte toqua au moment où il finit de mettre de l'ordre sur son bureau. Tobias entra avec son sourire habituel et déposa un nouveau dossier sur le bureau du procureur. Gabriel soupira, jetant un coup d'oeil au dossier supplémentaire, signe que le travail ne cesserait jamais de s'accumuler. Il haussa un sourcil interrogateur en direction de son ami, cherchant à en savoir plus sur cette nouvelle pile de documents.

« Alors, avant de t'en dire plus sur ce que je viens de t'apporter, dis-moi, grand stratège, c'était comment la chasse au suspect hier soir ? J'espère que tu ne l'as pas effrayé. » plaisantait Tobias.

Gabriel se repositionna dans son fauteuil, un peu mal à l'aise. Comment lui dire qu'il avait dévié de son objectif, de manière inattendue. Il regarda Tobias qui attendait, amusé.

« J'ai essayé de faire mon travail... » commença Gabriel, mordillant nerveusement sa lèvre inférieure, cherchant ses mots pour ne pas laisser apparaître son intérêt pour l'homme qu'il avait rencontré. Tobias s'impatientait. « Et...je devais jouer contre Pelezzi mais un homme a pris la relève, laissant Pelezzi s'échapper ». Le sourire de Tobias s'élargit, il savait qu'il ne disait pas tout puisque le procureur mordait généralement ses lèvres lorsqu'il était nerveux.

« Ah, je vois...Donc, tu as essayé de faire ton travail... » Tobias se laissa tomber sur la chaise en face de Gabriel, les yeux pétillants de malice. « Est-ce que dans ton travail, il est prévu de faire du charme à un inconnu au lieu de s'approcher du suspect  ? »

Gabriel haussa un sourcil. Comment savait-il qu'il avait passé son temps au casino à jouer contre un autre homme ? Il se gifla mentalement : c'est vrai qu'il n'était pas seul, des collègues l'avaient rejoint pour se renseigner auprès d'autres personnes. Eh bien, les nouvelles circulaient vite. Gabriel tenta de garder son sérieux « C'était une rencontre fortuite, rien de plus. »

« Fortuite, hein ? » Tobias éclata de rire « Je suis sûr que le suspect a dû être soulagé de voir que tu étais distrait ».

« Je n'étais pas distrait, Tobias » répliqua Gabriel, un sourire en coin, cherchant à reprendre le contrôle de la conversation. « Disons que je m'informais...sous un autre angle. »

Tobias secoua la tête, toujours amusé. « Mais oui, bien sûr. Je ne savais pas que ton « autre angle » impliquait de flirter avec un inconnu ».

« Je n'ai pas flirter avec, je me ressourçais auprès de lui » se défendit Gabriel en croisant les bras sur sa poitrine dans une tentative de garder sa dignité intacte.

Tobias ne put s'empêcher de rire davantage. « Ressourcer, oui. Et c'est ce que je dirai au chef si jamais il demande pourquoi le suspect court toujours dans la nature. « Gabriel se ressource, chef, il enquête sous un nouvel angle, un angle très personnel. » »