J'ai passé les deux jours suivants à l'état de larve.
Dans un sens, j'étais chanceuse que mon séjour chez Ambre et Nathaniel ait eu lieu pendant les vacances : c'était l'excuse parfaite pour ne pas me lever de mon lit et passer la journée couchée à fixer le plafond. Et avec mes parents au travail, je n'avais même pas besoin de faire semblant d'aller bien. Je restais là, complètement amorphe, à observer mes pensées défiler les unes après les autres.
Et surtout, à rejouer en boucle la discussion que j'avais eue avec Nathaniel.
En fait, c'était ça, le pire. Devoir me souvenir. Me rappeler ses mots, son expression qui oscillait entre l'angoisse et une espèce d'hébétement triste. Songer que je savais tout, que j'avais tout entendu et que j'avais promis de garder ça pour moi. Quelle idiote j'étais ! J'avais cru qu'en ayant le cœur net, j'allais pouvoir soulager mon angoisse, débarquer comme une héroïne et sauver Nathaniel. J'avais cru que tout rentrerait dans l'ordre grâce à moi. Au lieu de ça, non seulement je n'avais sauvé personne et rien changé du tout, mais à présent, je portais une énorme charge dont je ne savais pas quoi faire.
J'avais essayé de soulager ma conscience en écrivant dans mon journal. Mais les mots me manquaient chaque fois que j'ouvrais une page blanche. En parler à mes parents ? Beaucoup trop compliqué ; et puis comment allaient-ils réagir ?
J'étais seule. Désespérément seule.
Nathaniel m'avait fait promettre de me taire. J'avais dit oui sans réfléchir, simplement pour le soulager, parce qu'il ne méritait pas d'être tourmenté davantage. J'avais dit oui en espérant trouver une solution pour le sortir de là, parce qu'au fond, je savais bien qu'il m'était impossible de rester les bras croisés.
Il fallait que je fasse quelque chose. Mais quoi ?
Alors, après deux jours d'abattement, deux jours à écouter la pluie tambouriner contre ma fenêtre, deux jours à pourrir dans le même pyjama que celui que je portais le soir fatidique, j'ai fini par prendre une décision.
J'ai attrapé mon portable, parcouru ma liste de contacts et composé un numéro.
Il a répondu dès la deuxième sonnerie.
" Salut ! " a fait Kentin à l'autre bout du fil " Qu'est-ce qui ne va pas ?
- Comment t'as deviné ?
- Facile. Tu m'appelles jamais, sauf pour mon anniversaire ou quand t'as un problème. Sinon, t'es abonnée aux textos. "
J'en suis restée baba. Voilà le problème quand on traîne avec le même garçon depuis toujours. Il sait déjà tout et on peut rien lui cacher.
" Alors, qu'est-ce qu'il y a ? " a-t-il repris " T'as perdu ton mot de passe sur Steam ? Tu viens de finir la deuxième saison d'Avatar : le dernier maître de l'air ?
- Idiot, ai-je pouffé, j'aimerais bien que ce soit ça. "
Kentin a marqué une pause. Je n'ai pu m'empêcher de porter l'ongle de mon pouce à ma bouche et de commencer à le ronger avant de me reprendre. Il faut que j'arrête de faire ça.
" Faut que je te parle, ai-je dit, en face à face, si possible. C'est un truc qui me travaille et j'ai absolument besoin d'en parler.
- Ouah, ça a l'air sérieux.
- Ça l'est. "
Kentin s'est raclé la gorge.
" T'es libre d'ici une heure ? On pourrait aller dans un café ou un truc du genre. "
J'ai jeté un œil à la pluie qui martelait mes carreaux. Puis à mon pyjama tout sale qui commençait à sentir la transpiration. Et enfin, à ma tête hirsute dans le miroir. On aurait dit que mon reflet allait en sortir, genreThe Ring, et me tuer. Au fond, m'aérer un peu ne me ferait pas de mal, et j'ai accepté en songeant que j'allais devoir courir pour prendre une douche.
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Sweet Tooth
FanfictionQuand Liv Darcy débarque à Sweet Amoris après un transfert précipité, elle est bien décidée à devenir enfin une fille mature et sérieuse, loin de l'image de gamine qui la colle depuis toujours. Mais sa nouvelle école n'a rien d'un lycée normal ! Int...