22 - Haute tension

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Now you say you're sorry

For being so untrue

Well you can cry me a river, cry me a river

I cried a river over you.

Lesley Gore – Cry me a river


* * *


Le lendemain de la rentrée, presque tous les Terminales avaient reçu leur formulaire d'inscription pour la course d'orientation.

Comme d'habitude, on pouvait remercier Nathaniel pour son efficacité. Avant la fin de la journée, il avait fait le tour des classes et s'était assuré de la participation de chacun – sauf Rosalya, qui avait déjà prévu sa dispense. En comparaison, j'étais à la traîne, puisque j'avais été plus pressée de retrouver mes amies et mes habitudes que de jouer les factrices. Le matin du deux septembre, donc, je suis arrivée en avance pour finir la distribution.

Voyons voir... il reste Violette, Ken, les jumeaux qui viennent d'arriver, Ambre et Castiel.

Ces deux-là, je m'en serais bien passée. J'avais bien eu l'idée de donner à Lysandre deux formulaires pour qu'il en remette un à Castiel, mais vu sa tendance à tout semer autour de lui, mieux valait éviter de lui confier quoi que ce soit. Quant à Ambre, j'avais d'autant moins envie de la croiser depuis notre dernière rencontre.

J'ai songé que j'aurais plus de chance de trouver les derniers sur ma liste en les attendant dans la salle où nous nous apprêtions à avoir cours plutôt que de courir partout dans le lycée. C'est donc là-bas, au milieu des bureaux et du tableau noir qui sentait la craie, que j'ai établi mes quartiers. À une heure aussi matinale que celle-ci, la salle était absolument déserte, ce qui m'épargnait un peu le brouhaha des couloirs. J'ai fermé la porte derrière moi et me suis assise au fond, près de la fenêtre. Puis j'ai jeté un œil à l'horloge.

Vingt-cinq minutes avant le début des cours. Je ferais mieux de m'occuper.

J'ai sorti ma console, dont je n'avais toujours pas fait réparer l'écran, et farfouillé un moment dans la pochette à la recherche d'un jeu. Quand j'ai enfin trouvé la cartouche, j'ai soufflé dessus avant de l'insérer et d'allumer ma console. Puis j'ai lancé une partie et, tout en jouant, j'ai laissé mon esprit vagabonder vers les péripéties de la rentrée.

Le reste de la journée, la veille, n'avait pas été de tout repos. Outre le retour inattendu d'un Ken métamorphosé et l'apparition des deux nouveaux les moins calmes de l'Univers, le chien de la directrice avait profité de la confusion générale pour s'évader du bureau de sa maîtresse, et ça avait été à nous, les Terminales 2, de partir à sa recherche. Je n'en revenais pas : où était-il indiqué, dans le règlement, qu'elle avait le droit d'amener Kiki ? – c'était vraiment son nom, et pas une mauvaise blague comme j'avais cru au début. Le point positif, au moins, était que l'après-midi était passée à une vitesse fulgurante. C'était Lysandre qui avait fini par attraper la bête sans que personne ne comprenne comment il était parvenu à mettre la main sur un cabot qui courait partout alors que son carnet restait toujours introuvable.

" Hé ! C'est Smash Bros, ton jeu ! "

J'ai sursauté. J'étais tellement dans mes pensées que je n'avais pas entendu la porte de la salle de classe s'ouvrir et se refermer. Quand j'ai tourné la tête, un garçon était penché derrière moi, ses deux mains appuyées sur ma chaise. L'un des jumeaux, mais lequel déjà ? Celui-là avait les cheveux noirs, les yeux bleus et l'air de n'avoir jamais vu un peigne de sa vie. Je l'ai tout de suite trouvé sympa.

Sweet ToothOù les histoires vivent. Découvrez maintenant