Me and the Devil

Tu voulais oublier tout ça..

Anaïs se réveille lentement, les yeux lourds et encore embués de sommeil. Un léger rayon de lumière filtre à travers les rideaux tirés de la chambre, baignant l'espace d'une lumière tamisée. Tout semble étrangement calme, presque irréel. Elle est allongée sur le côté, son corps replié sous les couvertures épaisses. Ses mains cherchent instinctivement la chaleur de l'autre côté du lit. Mais là... il n'y a rien. Le vide. Ce vide qu'elle aurait dû anticiper, mais qui lui frappe en plein cœur, brisant le peu d'espoir qu'elle avait en elle.

Ses doigts effleurent l'oreiller. Il est frais, comme si la personne qui l'occupait venait tout juste de se lever. Elle serre les yeux et tente de se recaler contre l'oreiller, mais tout lui semble soudainement trop froid, trop grand. L'odeur d'Ellie, qui avait imprégné les draps, est déjà en train de se dissiper. Il n'y a plus que l'odeur de la chambre, de la vieille poussière et de la lavande des produits ménagers.

Anaïs ferme les yeux un instant, son cœur s'alourdissant à chaque seconde qui passe. Le silence pèse. Elle se remémore la nuit précédente : la douceur de leur échange, la chaleur de leurs corps, le parfum d'Ellie qui flottait autour d'elles. Comment cela a pu déraper si vite, comment elles ont fait un pas en avant pour ensuite se retrouver aussi seules, perdues dans un moment suspendu ? Pourquoi Ellie n'est-elle pas là, à ses côtés ?

Elle se redresse lentement, le corps encore engourdi par le sommeil, ses yeux noyés de confusion. Tout est si calme qu'elle en a presque mal. Elle se frotte le visage d'un geste mécanique, comme pour dissiper la brume de son esprit, mais il n'y a rien à faire. Le vide est toujours là. Cette douleur qu'elle a ignorée jusqu'à maintenant la frappe de plein fouet. Elle se sent abandonnée, comme si elle n'avait jamais compté, comme si tout ce qu'elles avaient partagé n'avait plus aucune valeur.

Les larmes commencent à monter, d'abord en silence, puis plus fort, une à une, comme une vague qui déferle sans prévenir. Elle laisse les larmes rouler sur ses joues, le souffle court, prise entre les regrets et la souffrance. Tout lui revient à la figure : les paroles non dites, les gestes qui n'ont jamais été expliqués. Pourquoi ? Pourquoi Ellie l'avait-elle laissée ici, toute seule, après tout ça ?

Anaïs ferme les yeux, les poignets appuyés sur ses yeux pour essayer de retenir la douleur qui veut s'échapper. Elle ne comprend plus. Pourquoi se réveiller dans ce lit, dans ce lieu si familier et en même temps si étrange, sans elle ?

Finalement, elle se lève d'un mouvement lent, ses pieds nus touchant le sol froid. La pièce autour d'elle semble déserte, sans vie, comme un décor abandonné. Elle balaye du regard la chambre d'Ellie, cherchant des réponses dans ce chaos intime : des vêtements qui traînent, des livres ouverts, des papiers éparpillés. Elle s'approche du petit coin où Ellie laisse souvent ses affaires. Là, parmi un tas de vêtements en vrac, son regard s'arrête sur un vieux t-shirt, un maillot de foot bien trop grand pour elle, celui qu'Ellie porte quand elle veut se détendre. Un symbole de leur proximité. Anaïs le prend dans ses mains, un frisson parcourant son corps en le touchant.

Elle s'enroule dans le tissu, l'enfilant comme une sorte de bouclier. Le maillot est doux, légèrement usé par le temps, et lorsqu'elle le respire, une vague de chaleur envahit son cœur. Il a l'odeur d'Ellie, cette odeur si réconfortante, familière, qui l'avait apaisée la veille. Elle ferme les yeux et inspire profondément. Le parfum d'Ellie, si distinct, si rassurant, lui envahit les narines. Elle se laisse envahir par cette sensation de connexion, mais en même temps, cela lui brise le cœur. Elle n'a pas le droit de se raccrocher à ça, mais elle ne peut s'empêcher de le faire. Elle a besoin de cette odeur, de cette présence, même si elle est désormais toute seule à l'intérieur de ce maillot.

Une larme roule silencieusement sur sa joue alors qu'elle ajuste le t-shirt, son cœur battant plus fort. Tout à coup, le monde semble se resserrer autour d'elle. Elle se sent prise dans un étau de sentiments contradictoires : la douleur, la honte, l'amour. Chaque pensée qui traverse son esprit la fait vaciller, mais c'est cette odeur d'Ellie qui la garde encore là, accrochée à un fragment de ce qu'elles étaient.