Après plusieurs jours, le temps de donner sa démission de la faculté de médecine d'Eluville, d'effectuer quelques préparatifs et de gagner Evelymme pour utiliser son passage grâce à ses quelques économies, Jill arriva à Tikkr'eth.
La ville était certainement moins élégante que la distinguée Eluville mais la jeune femme s'y sentait plus à son aise, plus à sa place, moins comme une tache de salissure sur la belle toile noble de la cité portuaire.
Abandonner ses études entamées à Eluville ne l'avait pas dérangée, comme elle l'avait affirmé à Gaëlan. Elle en avait assez de subir les remarques de ses riches camarades de promotion, qui ne manquaient jamais une occasion de signaler leur différence d'origines, et enquêter sur des recherches royales secrètes paraissaient bien plus intéressant et stimulant que de continuer à côtoyer ce genre d'idiots.
Sans compte que, de toute manière, Tikkr'eth lui offrirait tout autant la possibilité de compléter sa formation de médecin qu'Eluville.
Ne pouvant se rendre directement au palais de Tikkr'eth pour demander le docteur Dimitri Centhvint, la jeune femme procéda autrement.Trouvant un emploi dans un hospice pour les démunis, elle commença à y travailler en espérant entendre parler du docteur Centhvint,toute information s'avérant bonne à prendre. Ces quelques jours qu'elle venait de passer à Tikkr'eth ne lui avaient cependant rien appris.
Personne à Tikkr'eth ne paraissait connaître le docteur Dimitri Centhvint, comme si ce dernier était un véritable fantôme. Les gens dans son entourage semblaient préférer parler du mariage entre Taminiëlle Cécyly et Ilian De Ohcaire, qui approchait, mais il n'était pas que source de réjouissance.Beaucoup de citoyens de Névinda s'en inquiétaient car, furieux devoir la possible alliance avec Thamyre lui échapper, Trystan De Lauvel menaçait de lancer des offensives contre son voisin même si,avec ses ressources, Taïfyne aurait certainement eu plus à perdre qu'à gagner dans une telle opération mais son souverain n'avait pas la réputation d'être raisonnable, bien au contraire.
En attendant de voir comment les choses tournaient, la vie continuait et Jill devait s'acquitter de sa nouvelle tâche au sein de l'hospice,où ses manières ne lui valaient pas de reproches. Au contraire,elle comprenait parfaitement les patients qu'elle recevait, ayant elle-même vécu dans une grande précarité.
Aujourd'hui cependant, les choses étaient plutôt calmes et Jill s'ennuyait.
Cherchant à s'occuper, elle arpentait les couloirs de l'hospice dans l'attente qu'on requiert ses services d'apprentie médecin. La soirée approchait et l'activité allait certainement augmenter sans tarder.
Débouchant dans le hall de l'établissement, elle avisa le directeur de l'hospice en pleine conversation avec un jeune homme que Jill ne reconnaissait pas, elle ne croyait pas qu'il s'agissait de l'un de ses nouveaux collègues et, malgré ses cheveux noirs mal coiffés, il ne ressemblait pas à l'un des nécessiteux qu'ils soignaient.
Feignant de ne pas les remarquer, Jill voulut s'abstenir de les saluer mais ils l'avisèrent et la jeune femme soupira, se doutant qu'elle ne pourrait pas échapper à des présentations, comme si elle n'en avait pas suffisamment subies ces derniers jours.
Soudainement, la porte de l'hospice s'ouvrit brutalement pour livrer le passage à deux hommes, l'un soutenant l'autre qui poussait des râles de douleur et dont la jambe droite était couverte de sang.
Jill réagit la première, sa vie à Kaleth lui ayant appris à être rapide.
Accourant auprès des deux hommes, elle ordonna au premier d'allonger son camarade directement au sol, l'urgence n'offrant pas d'autre possibilité, alors qu'elle ouvrait sa besace de cuir contenant son matériel de médecin qu'elle gardait sur elle.
Déchirant la jambe du pantalon usé de l'homme, elle dévoila sa blessure : une fracture ouverte dont l'os dépassait.
Fouillant dans sa besace, Jill ordonna à la cantonade qu'on aille lui chercher de quoi désinfecter et de quoi fabriquer une attelle sans prendre la peine de relever les yeux, puis elle retira la ceinture du blessé pour la faire mordre à ce dernier et éviter qu'il ne se coupe la langue. Ayant besoin d'aide, elle alla pour donner de nouvelles directives au camarade du blessé mais, relevant les yeux, elle constata que l'interlocuteur du directeur de l'hospice se chargeait déjà de solidement maintenir le blessé.
Lui assurant que c'était bon, il adressa un hochement du menton à Jill et elle replaça l'os du malheureux d'un vif mouvement, lui arrachant un hurlement de douleur.
Le directeur de l'hospice étant revenu avec le matériel réclamé par la jeune femme, elle put désinfecter la plaie de généreuses rasades d'une teinture d'alcool avant d'entreprendre de recoudre la plaie, toujours assistée du jeune homme à la chevelure désordonnée puis ils l'enveloppèrent dans des bandages et maintinrent la fracture en confectionnant une attelle.
L'homme étant soigné et l'urgence gérée, le blessé fut conduit à un lit par d'autres employés de l'hospice,arrivés durant les soins, pendant que Jill se relevait en essuyant ses mains tachées de sang sur son pantalon.
Percevant un regard perçant sur elle, elle se tourna vers le jeune homme qui lui prêté main forte.
Ne s'embarrassant pas de manière ou de quelconque tournure de politesse, il demanda à la jeune femme :
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Le Sang des Déchus - Tome 2 : Traîtres
FantasyAprès que Lysange ait été blessée, mettant sa vie en péril, le groupe des Déchus trouve refuge dans un lieu du passé d'Abélianne, qui dévoile alors certains de ses secrets. Heureusement, ils reçoivent l'aide d'un mystérieux personnage surnommé le Ma...