« J'ai besoin de recul. N'essaie pas de me joindre, je jette mon portable à l'eau juste après t'envoyer ce foutu message. Ne me cherche pas, ne pense plus à moi, ne m'appelle plus. J'ai trop mal alors adieu. »
Une larme roule le long de ma joue et finit son trajet sur le bord de l'eau. Je relève la tête et regarde le ciel avec ses gros nuages gris annonçant un mauvais temps d'ici peu. Le portable dans ma main glisse doucement et tombe vulgairement dans l'eau comme l'avait prévu mon message. Je soupire une énième fois devant cette vie accablante et continue mon trajet sur le bord du pont.
Les voitures grondent tout près de moi et un cycliste s'arrête au feu tricolore. Leurs vies ont l'air bien banales comparé à la mienne qui part dans tout les sens, ce que je craignais en revenant mettre les pieds sur le sol américain. Mes pas se font lents. Je ne sais pas où aller, je laisse guider mes jambes. Les quartiers chics disparaissent pour laisser place à de simples appartements sans aucune gaité. Les rues sont sombres vu l'heure mais je continue, plus rien ne me retiens dans ce monde si glauque. Les nuages noirs se regroupent. Le tonnerre gronde. Une mamie se dépêche de rentrer avant que ça ne verse. Le vent secoue mes cheveux, les volets claquent sauvagement sur les murs. Une lumière soudaine éclaire toute la rue. L'ampoule du lampadaire clignote et finit par griller lorsque le tonnerre gronde à nouveau. La pluie n'est pas encore au rendez-vous mais ça ne va pas tarder. Une bonne douche ferait du bien à la route pleine de détritus en tout genres. Un sachet de bonbons tourbillonne sur lui-même avec quelques feuilles mortes. Les seuls gens présents dans la rue se précipitent à rentrer dans le bâtiment le plus près. Un pauvre mendiant me réprimande entre deux containers à poubelles mais je n'ai rien à donner. Pas même mon cœur qui a été sauvagement piétiné, ni même mon tee-shirt taché de sang. Le ciel tonne dans un bruit assourdissant et je ne prends même pas la peine de me boucher les oreilles pour protéger mes tympans. Plus j'avance, plus le vent claque. Le chat à quelques mètres de moi ne tient plus debout tellement la force du vent est effroyable. Un volet s'arrache de son mur et claque sur le trottoir. Un pot de fleur git sur le bord de la route et la seule couleur pouvant être relevée dans ce monde si désastreux est sa fleur bleue fanée. La foudre frappe une énième fois et je pousse lentement la porte d'un vieux bar miteux qui pourrait bien être mon seul refuge pour ce soir. L'alcool et les cigarettes enfument la salle, tout comme la musique mise au volume maxi. Je monte sur l'un des tabourets de bar libre.
- Une vodka, s'il vous plaît.
Un homme s'assoit à mes côtés et commande la même chose. Je prends mon verre et bois cul sec. L'alcool coule le long de ma gorge et je repose le verre en le claquant doucement.
- Salut toi ! Me dit l'homme. Dit, t'es pas un peu jeune toi ?
- Je m'en fou.
- Ca te dirait de...
- Oh tu la laisse ok ? Lance le barman.
L'homme souffle et s'en va.
- Merci, murmurais-je.
- De rien. Tu es sûre que ça va ? Me demande-t-il en me resservant un nouveau verre de vodka.
- Au point où j'en suis... Oui, parfaitement.
- Tu as pourtant du sang au niveau de ton cou et sur ton pull.
J'hausse les épaules et enfile trois verres d'alcool fort à la suite. J'ai besoin d'oublier. Le barman sert d'autres personnes voulant eux aussi oublier leurs vies misérables, leur travail ou tout simplement passer du bon temps à discuter.
La porte claque et je tourne instinctivement la tête pour voir l'homme qui vient d'entrer, trempé comme jamais. L'eau glisse sur les fenêtres du bar et il est impossible de savoir à quoi ressemble l'extérieur. L'homme s'assoit à mes côtés et commande un whisky.
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Éternel (Tome 1) [EN RÉÉCRITURE COMPLÈTE]
ActionDes parents qui envoient leur fille de l'autre côté de l'Atlantique et qui appellent de moins en moins après quelques jours. Ennui ? Manque de temps ? D'argent ? Tout démarre de ce fameux départ. Quand Olympe, découvrira l'envers du décor quelques m...