Chapitre 14

7.7K 778 16
                                    

Jeudi. J-2 avant le grand jour pour les futurs mariés Arbinger.

La veille, j'avais reçu les fiancés, au comble du stress, et avais passé en revue les derniers détails avec eux afin de les rassurer. Je comprenais leur agitation. Qui n'aurait pas été angoissé à l'idée qu'au bout de tant de mois de préparation, la cérémonie allait enfin avoir lieu soixante-douze heures plus tard ? Le fleuriste déniché à la dernière minute était sur le pied de guerre, prêt à fournir la décoration florale. Le traiteur nous avait fait livrer au bureau des miniatures de la pièce montée. J'avais accompagné Lilly, la future mariée, récupérer sa robe. Un grand moment d'émotion, d'ailleurs : heureusement pour elle, j'avais toujours un stock de mouchoirs jetables sur moi. Je lui en avais tendu quelques-uns lorsqu'elle avait soudain fondu en sanglots en remerciant la couturière qui avait effectué les dernières retouches en urgence. Eh oui, le jour fatidique arrivant, la jeune femme avait brusquement pris quelques centimètres de tour de taille entre les deux derniers essayages. L'émotion, d'après elle. Moi, je soupçonnais des petits pieds de pousser bien à l'abri de son ventre.

Après leur départ, j'avais déjeuné avec Jess pour la remercier d'avoir convaincu Mme Sidonie, propriétaire de la fantastique boutique d'orchidées, de nous dépanner au pied levé et ainsi de sauver un mariage du naufrage. Puis cela avait été au tour d'Alban et Noëlla de venir m'exposer leur projet. Depuis notre rencontre précédente, ils s'étaient concertés et avaient finalement opté pour une cérémonie d'engagement... mais religieuse. Alban refusant catégoriquement d'entrer par une église, Noëlla avait donc décidé que s'ils ne pouvaient ne pas aller au prêtre, le prêtre viendrait à eux. Je m'étais alors interrogée sur leur conception de « mariage qui ne faisait pas mariage ». En un mot, la jeune femme avait réussi à contourner la difficulté et le tour de force de faire accepter un sacrement religieux à son fiancé sans que ce mot soit ouvertement prononcé. Ah... la force et l'opiniâtreté de certaines me laissaient toujours muette d'admiration. Néanmoins, j'allais devoir me démener pour mettre la main sur un prêtre prêt à se déplacer sur le lieu de leur cérémonie, soit, à Quiberon, sur la plage, le lendemain du mariage civil. Trouver un curé qui accepterait de célébrer un mariage un dimanche n'allait pas être de la tarte. D'autant que si je connaissais quelques ecclésiastiques à Paris, il n'en était pas de même en Bretagne. J'avais donc eu la vague impression que ce dossier-ci allait être une véritable gageure. Encore un couple qui pensait qu'il me suffisait de dire « supercalifragilisticexpilidocious » devant ma besace pour qu'il en sorte tous les outils nécessaires à la réalisation du mariage idéal.

Ouais. Les doigts dans le nez.

C'est ainsi que j'arrivai au bureau ce jeudi-là, fraîche comme un gardon et assez satisfaite du bon déroulement des différentes cérémonies. Seule ombre au tableau, je n'avais aucune nouvelle de William depuis ce fameux lundi où je l'avais gentiment invité à aller se faire voir. Ce qui ne m'arrangeait guère, même si ne pas l'avoir constamment derrière moi était chose appréciable. Mais tout de même, j'avais été enrôlée presque à mon corps défendant pour m'occuper de leur cérémonie d'engagement, et il restait trois semaines. C'était court trois semaines. Quand bien même j'avais eu le plaisir de m'entretenir au téléphone avec cette chère Emily plusieurs fois par jour depuis le début de la semaine, veillant au grain comme le ferait un inspecteur des travaux finis, j'avais besoin de son avis à lui. C'était même primordial.

Je décidai donc en fin de matinée de partir à la recherche du fiancé fantôme. J'avais une vague intuition de l'endroit où il pourrait se trouver. Aussi, après avoir prévenu Éric et Jess que j'allais m'absenter l'après-midi pour des raisons professionnelles, je me rendis à l'atelier culinaire d'Owen. Si William ne s'y trouvait pas, son frère pourrait sans doute me renseigner. Du moins, je l'espérais.*

Incroyable fiancéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant