Chapitre 12

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Nous arrivons enfin et Mike semble surpris. Il ne dit pourtant rien, attendant que je vienne à lui. Comme à ses habitudes, il attend et lorsque cela ne lui convient pas il n'hésite jamais à me dire tout ce qu'il pense de mon comportement. Je crois que c'est ce qu'il me fallait finalement. Un homme avec une personnalité plus forte que la mienne et aussi borné que moi si ce n'est plus.
Nous sortons de la voiture, sans un mot. Il attend toujours, il est d'une patience infinie. En dehors de mon boulot, je suis incapable de la moindre patience. Je l'admire pour cela.
J'entremêle mes doigts aux siens et nous quittons le parking pour la zone de buissons et d'arbres qui cachent si bien cette plage. Nous l'avions découverte un jour avec James alors que Lucas, marchant à peine, s'était aventuré dans ce bois dense et pourtant minuscule.
Enfin lorsque nos pieds nus, touchent le sable encore glacé il s'arrête et me fait face. Je sens qu'il a besoin de réponses. Ses yeux bleus interrogent les miens et il ne bougera pas tant qu'il ne les aura pas eu. Très bien, je suis là pour cela après tout.
« Tu dois te demander pourquoi je t'amène ici. »
Mike se contenta d'acquiescer d'un mouvement de tête. Il ne lui avait pas lâché la main et son regard n'avait jamais quitté le vert de celui de sa partenaire. Le ressac des vagues, au loin, était à peine perceptible tant l'étendu de sable était importante. Et le petit bois était aussi long que leur plage. Cette endroit perdu était immense.
« Cette plage était la notre, j'ai dispersé leurs cendres ici. Je leur ai dit adieux ici.... »
Elle marqua une pause, les émotions la submergeant trop rapidement. Sa thérapie fonctionnait à merveille se dit-elle. La présence de son partenaire dans sa vie également.
« .... C'est ici que je voudrais tout recommencer.... » Finit-elle par achever les yeux brillants de larmes.
Elle n'était peut être pas prête à lui dire qu'elle l'aimait comme il l'avait fait mais les mots choisis, le moment et même cet endroit spécial le lui hurlait. Michael lui lâcha la main et la prit avec force dans ses bras. Puis il passa un bras autour de sa taille la gardant le plus prêt possible contre lui et les guidèrent plus près de l'eau.
« Nous devons trouver une solution lorsque nous ne sommes pas à San Francisco. » Lança-il soudain alors qu'ils marchaient en silence depuis une dizaine de minutes.
Il la sentit se figer, et elle répondit avant même qu'il n'ait le temps de s'expliquer.
« Je sais que nous devons faire profil bas, que cette enquête était pénible et que les autres le seront tout autant mais.... »
Il s'arrêta, posa ses mains de chaque côté du visage de Sarah le sourire aux lèvres. Son regard était rassurant constata-t-elle soudain et son coeur se mit à battre moins fort. Elle ne se ferait jamais à l'idée que cet homme chamboulait tout en elle.
«Nous allons trouver une solution pour que tu ne dormes plus seule Sarah. »
Elle secoua la tête fermant les yeux.
« Regarde moi. »
Elle plongea de nouveau son regard dans celui de Michael, il était si inquiet.
« Je... »
Elle soupira, elle allait devoir le lui avouer et elle détestait cela. Son thérapeute le lui avait suggéré, pas pour elle mais pour apaiser les inquiétudes de son partenaire. Elle avait refusé. Michael Kyson l'avait peut être changé mais elle restait tout de même au plus profond d'elle quelqu'un de secret ayant du mal avec l'expression de ses sentiments.
« Tu quoi! »
Son ton avait changé, son regard était toujours aussi concerné mais sa voix se faisait plus impatiente. Comme chaque fois qu'il tentait de lui soutirer tout ce qu'elle avait sur le coeur. Sarah soupira de nouveau, de frustration cette fois et finit par reprendre presque excédée. Comme chaque fois qu'il gagnait à ce jeu là.
« Ok tu veux tout savoir? »
Elle se détacha brusquement et il l'a laissa faire cachant un sourire. Il la connaissait par coeur.
« Oh et si tu veux que je finisse, tu ferais bien d'effacer cette grimace de ton visage! »
Elle lui tournait le dos et il dû faire un effort surhumain pour ne pas rire. Ils étaient effectivement deux à pouvoir jouer à ce petit jeu et parfois il avait tendance à l'oublier. Jamais, il n'avait connu de femme comme Sarah. Elle était son égale, elle le complétait. Il avait à la fois envie de la protéger et de l'affronter et il avait su la première fois qu'il l'avait rencontré qu'elle était la seule femme qui réussirait cette prouesse. Elle lui avait redonné envie d'aimer et y était parvenu sans même le réaliser.
Elle ne reprit que lorsqu'elle fut certaine qu'il avait retrouvé son sérieux et également pour le jeu. Cette joute incessante et dont ils ne se passeraient pour rien au monde.
« Je ne dors que lorsque j'entends ou je sens les battements de ton coeur. »
Elle murmurait presque et lui tournait toujours de dos. Il n'y avait pas un seul brin d'air ce jour là et c'était finalement une bonne chose. Il n'aurait rien entendu auquel cas.
« SATISFAIT! » Cria-elle frustrée.
Il l'attrapa avec force par le bras et la força à lui faire face.
« Parfaitement. » Répondit-il d'un calme olympien en total contradiction avec les émotions qui traversaient son corps et son esprit.
Il eut ce petit sourire en coin qui la faisait enrager. Celui qu'il arborait chaque fois qu'il avait raison et pas elle. Qu'il gagnait leur petite guerre comportementale et pas elle.
Elle ouvrit la bouche pour lui répondre, il l'en empêcha aussitôt plaquant la sienne avec force sur celle de sa partenaire. Leur baiser fut presque violent, cette fois il lui montrait l'effet que ces mots avaient eu sur lui et cela n'avait rien à voir avec l'autosatisfaction qu'il avait feint avec son sourire.
Lorsqu'ils se séparèrent à bout de souffle, il garda une main dans le dos de Sarah. La jeune femme lui en fût reconnaissante, ce genre de baisers la laissaient souvent tremblante. Et il avait la décence de ne pas le lui faire remarquer, également parce que parfois c'était lui qui se retrouvait dans ce cas là.
« Idiot. »
Elle souriait pourtant. Et il se mit à rire capturant de nouveau ses lèvres avec la même passion. Il ne lui répéta pas qu'il l'aimait sachant parfaitement que cela la mettait mal à l'aise. Il gardait ces mots pour les moments difficiles ou lorsqu'il sentait qu'elle était prête à les entendre.
Ils finirent par s'assoir, dans les bras l'un de l'autre, face à l'océan. Les vagues les berçaient et les apaisaient. Ils en avaient grandement besoin après la seule mais éprouvante journée qu'ils avaient passé la veille.
« Je crois que Jen se doute de quelque chose. » Lança-elle soudain.
Michael, dans son dos, avait la tête posé sur l'épaule de sa partenaire et elle le sentit sourire contre sa joue.
« Tu crois? »
« Notre hackeuse est trop maligne pour notre propre bien. Si elle n'était pas si fragile, elle aurait déjà intégré Quantico »
«Mmmm, je suis d'accord mais... » Il marqua un temps d'arrêt juste pour provoquer plus d'effet et elle leva les yeux ayant deviné la fin de sa phrase.
« ...Nous sommes largement meilleurs....elle ne saura rien...notre secret. »
Sarah se contenta de hocher la tête pensive.
« Mais tu penses que leur mentir n'est peut être pas la bonne solution. »
Elle soupira.
« Trop facile de lire dans tes pensées ma Sarah. »
Elle cru entendre Jamie et ne pu s'empêcher de rire. Il adorait réussir cette prouesse, c'était si rare. Mais depuis qu'ils étaient ensemble son fils et lui y arrivaient de mieux en mieux.
Ils restèrent longtemps, assis sur le sable dans les bras l'un de l'autre à profiter de cet après-midi au calme. Ils avaient l'impression d'être seuls au monde, rien que le ressac de vagues et le soleil qui leur redonnait un peu d'énergie. Les surfers, les quelques habitués des lieux, semblaient avoir disparu.
« Comment allons-nous faire alors? » Finit-elle par demander soucieuse tout de même.
Ils ne voulaient et ne pouvaient pas être séparés. Et surtout, ils ne voulaient pas mettre Henry en situation délicate vis à vis de leur hiérarchie. Ils étaient peut-être l'équipe d'élite de la côte Ouest mais cela n'impliquait pas qu'ils devaient enfreindre les règles.
« Deux solutions... » Répondit-il tout aussi soucieux.
Elle inspira profondément, les connaissant parfaitement et peu certaine de vouloir choisir la première qui leur venait à l'esprit.
« On en parle à l'équipe.... » Continua-t-elle.
Et au ton qu'elle utilisa il su qu'elle n'était pas prête. Il resserra son étreinte et l'embrassa dans le cou. Elle frissonna et il ne pu s'empêcher de sourire. Il se dit alors qu'elle lui rendrait la monnaie de sa pièce lorsqu'ils seraient moins préoccupés par la situation.
« Où nous nous débrouillons pour ne pas nous faire repérer chaque soir. Comme hier. » Termina-t-il pour elle se rendant compte qu'ils avaient l'air de deux adolescents dont les parents refusaient qu'ils se voient.
Elle acquiesça et ils surent tous les deux qu'ils adopteraient cette solution, du moins temporairement. Michael refusa soudain de penser aux soirs où ils seraient obligatoirement séparés. Ils le seraient c'était inévitable et probablement au cours d'enquêtes ou d'infiltrations. Et il ne supportait déjà pas de la voir souffrir de ses cauchemars lorsqu'elle était dans ses bras mais la savoir seule avec ses démons lui brisait le coeur.
Et comme si elle avait comprit, elle se retourna tournant le dos à l'océan. Elle se positionna sur ses jambes relevés, les genoux de chaque coté de ses hanches enfoncés dans le sable. Puis elle passa les bras derrière sa nuque jouant avec les cheveux dans son cou. Il frissonna et elle sourit. Gagné, ils étaient deux à pouvoir jouer à ce jeu. Cela le fit sourire et il en oublia presque ses inquiétudes.
« Je peux gérer quelques nuits sans toi tu sais...j'y suis arrivé pendant plus de 30 ans. »
Il cacha sa surprise persuadé que la tragédie avait tout déclenché. Elle le perçu tout de même et déposa un doux baiser sur ses lèvres avant de lui expliquer.
« Mes nuits sont hantées depuis aussi loin que je me souvienne. A l'orphelinat déjà je me mettais à hurler la nuit réveillant tout le dortoir. Les soeurs n'arrivaient pas à me réveiller et les filles se mettaient à pleurer aussi. »
Il lui caressait tendrement le visage comme s'il cherchait à effacer toutes ces peines. Elle lui sourit avec amour et reprit.
« James perdait parfois patience et partait dormir avec notre fils lorsqu'il n'arrivait pas à me tirer de mon sommeil.... »
Elle soupira et le sentit se tendre.
« ...Lucas n'a jamais rien entendu, jamais rien vu...l'instinct maternel certainement. »
Mike hocha simplement la tête. Sarah lui sourit tristement caressa du pouce les lèvres de son partenaire. Il l'embrassa à chacun de ses mouvements. La jeune femme continua.
« Tu lui en veux...c'est la première fois que je te vois porter un jugement... »
Elle était surprise.
« Oui. »
Son ton était sans appel. Elle lui avait avoué plus tôt qu'elle ne pouvait dormir sans entendre les battements de son coeur. C'était à son tour de lui avouer une chose intime qu'il aurait voulu garder pour lui. Ils ne pouvaient visiblement rien se cacher.
« Je ne supporte pas de te voir lutter comme ça. De te voir souffrir sans arriver à te battre comme tu peux le faire tous les jours dans ta vie, dans notre travail. Stewart tu es la femme la plus forte que je connaisse... »
Il avait commencé sa phrase presque avec colère et la termina dans un murmure.
« Continue. »
Il la fixa, le vert émeraude plongeant dans le bleu azur et inspira profondément. Il allait parler de James et cela ne semblait pas affecter Sarah. Son estomac se décontracta soudain.
« Ce n'est pas de ta faute. Jamais, tu entends jamais je ne perdrais patience face à tes angoisses nocturnes. Je te garderai tout contre moi, te murmurerai des paroles apaisantes. Je peux même tenter d'accélérer les battements de mon coeur pour te calmer.»
Elle lui sourit.
« James ne comprenait pas... »
« Moi non plus mais... »
Elle posa un index sur les lèvres de son amant.
« Laisse moi finir. Toi non plus je le sais...mais tu n'es pas James. Et j'ai mis du temps à le comprendre et à le reconnaître mais malgré tout l'amour que j'avais pour mon mari. Avec toi c'est différent. Avec toi, j'ai l'impression...je ne sais pas... »
« D'être enfin complète? »
Elle hocha la tête soudain incapable de dire quoi que ce soit d'autre. Ils s'embrassèrent de nouveau, cette fois avec toute la tendresse et la douceur que leur prodiguait les lieux et les derniers mots échangés.

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