Février 10.034
- Madame, ce n'est pas proscrit d'être un demi-elfe ?
- Plus maintenant Judie. Le Monde a évolué et avec lui, ses règles. Ainsi, le mélange entre deux races est maintenant largement accepté.
Les yeux de tous les enfants en face de moi me dévisagent et je m'empresse de cacher les miens derrière mes mèches. Ils lèvent tous la main ou le doigt en même temps et sans attendre le consentement de leur maîtresse à ma droite, ils posent tous leurs questions. Je serre mes mains de toutes mes forces sur ma jupe et baisse la tête. Je déteste le jugement des autres. Je déteste mes cheveux qui me trahissent : ils ne sont pas d'une couleur uniforme, formant un dégradé de bleu, accordé à la teinture de mes pupilles claires. J'essaye de me contrôler, maman m'a demandé de garder mon calme et de rester sage. Pourtant j'ai beaucoup de mal. Papa lui m'a simplement regardée avant de me serrer dans ses bras.
Je suis toute seule dans la classe, sans soutien, ni mon frère, ni ma sœur, transférés ailleurs. Sans Papa, sans Maman. Seulement cette maîtresse incapable de garder sa classe et tout ces gamins immatures. C'est déjà la quatrième fois que je change d'école cette année et nous ne sommes qu'en février. Deux fois, à cause de moi. En même temps, il faut dire que je n'ai pas un caractère très facile ; renfermée, sauvage, effrontée. Certains ne l'ont pas compris. Mon poing dans leurs figures le leur a vite rappelé. Je me souviendrais toujours de ma première bagarre, j'avais quatre ans. C'était un petit agé d'un an de plus que moi qui en avait fait les frais après avoir tenté d'enfermer ma sœur et moi dans les toilettes des garçons. Les deux autres fois, c'était la faute de mon père, ou plutôt de son travail. Il est général et travaille dans l'entourage de grands de la Cour ce qui fait qu'il est souvent appelé d'un côté à l'autre du Monde.
Maman elle, elle est professeur à l'école des plus grands. Elle leur apprend la Voltige mais étant donné que c'est notre mère, elle nous l'a appris dès le berceau à moi et ma fratrie. J'aime bien son prénom, ma première poupée portait le même : Gerda. Maintenant, elle est rangée dans le grenier, je préfère aller jouer à me battre avec papa. Lui il s'appelle Elros et il a toujours voulu nous apprendre à nous défendre et je dois avoué qu'il a plutôt réussi avec moi et mon frère, Daïrim. Maman qui ne voulait pas que ses filles jouent à la bagarre a tout de même réussi à « préserver » ma sœur. Ce sont ces mots. Pourtant, moi je trouve ça drôle de rouler par terre et de me jeter sur mon père. Les séances se terminent toujours en éclats de rire et en guilis. Daïrim est très chatouilleux, pas moi, sauf quand c'est papa qui me le fait. Sinon, personne n'y arrive.
- Earwen?Tu veux raconter tes vacances à tes camarades ?
- Pourquoi je ferais ça ?
- Pour qu'ils puissent te connaître un peu mieux. Allez, va-y...
La petite fille s'appelant Judie relève la main et clame :
- Mais Madame, nous ne voulons pas la connaître, c'est une demi-elfe et maman dit toujours que les enfants purs comme nous ne doivent pas parler à des hybrides.
- Judie ! On ne dit pas de ces amis qu'ils sont des hybrides !
- Sauf que Madame, personne ne veut être amie avec une demi-elfe ! En plus elle a les cheveux bleu !
Les autres enfants commencèrent à crier les mêmes insultes que toujours : Sorcière ! Démon !! Harpie ! Vipère !!
D'une main, je chassais les larmes qui me venaient aux yeux et serrais très fort les poings : tant pis pour ma promesse ! J'en avais plus que marre d'être le souffre-douleur de tout le monde ! Plus que marre de me laisser faire des jours et des semaines ! Je regardais Judie droit dans les yeux ce qui la fit reculer et pigner. La maîtresse à ma droite se tourna vers moi :
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Maudite, tome 1
FantasyLe silence se fait. Les oiseaux éteignent leur musique et on entend plus que le vent qui souffle fort entre les branches. Il siffle la mélodie de la peur. Mais je n'ai pas peur. Des hurlements lointains se mettent à résonner et des yeux apparaissent...