Chapitre 16, Hemli

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Earwen se lève de table et sort, les larmes aux yeux. Daïrim la suit et moi, je reste. Sa toute petite sœur, Elenwe, se lève à son tour et vient se réfugier dans mes bras.

- J'aime pas quand maman et Earwen se disputent, murmure-t-elle.

- Ca va aller, lui chuchotais-je, d'accord ?

Elle hoche sa petite tête colorée.

- Aller, retourne t'assoir maintenant, lui dis-je avec un sourire que j'essaie de faire rassurant.

Elle s'exécute tandis que je jette un œil aux autres sœurs. Leur figure est décomposée, elles sont toutes pâles et aucune des deux n'ose bouger. Je me tourne vers Gerda, un éclair de révolte dans les yeux.

- Comment osez-vous parler de votre fille ainsi ? C'est votre progéniture... Comment... Comment pouvez-vous prononcer son nom avec cette air-là ?

- Hemli. Je ne t'ai pas demandé ton avis, tu n'es pas de ma famille, juste une fille qui est appréciée de mes enfants. Je te demanderais de ne plus approcher mes deux autres filles et de ne plus jamais me parler sur ce ton là, suis-je clair ?

- Je ne crois pas, non, dis-je, énervée, vous savez, j'ai peut-être été élevée dans la forêt mais on m'a appris ce que c'était que les valeurs et le respect. Je n'ai peut-être pas d'enfant mais vous pouvez être sûre qu'il ne me viendra jamais à l'esprit de parler d'eux comme vous venez de le faire. Je vais y aller maintenant, merci pour l'accueil et le repas.

Sur ce, je me lève et pars sans me retourner. Je croise Daïrim dans le couloir qui me fait savoir qu'Earwen est rentré et qui propose de me raccompagner par la même occasion. J'accepte avec plaisir car je dois dire que les rues me font un peu peur de nuit. Pas à cause de personnes dangereuses, non, à cause de se qu'il s'est passé cette fameuse nuit où j'ai perdu le contrôle. Par ma faute, Earwen a pris de gros risques et je ne veux pas que ça se reproduise. Et puis son frère est beaucoup plus fort, physiquement...

Nous nous engageons dans les rues silencieuses et sombres sans dire un mot. L'atmosphère est oppressante  et je sens le regard de Daïrim peser sur moi presque tout le temps. Le silence de la nuit est bientôt interrompu par sa voix.

- Hemli ?

- Oui ?

Son ton est hésitant.

- Euh... ça te dit d'aller manger un truc... Tout ça m'a donné faim...

- Hm... Pourquoi pas... répondis-je.

- Je t'invite, reprend-il avec un petit sourire en coin.

- C'est d'accord, dis-je en souriant à mon tour.

Je rougis légèrement en me rappelant ce que m'a dit Earwen à son sujet. Nous changeons de direction et nous nous dirigeons vers le centre-ville. Même à cette heure tardive, les rues sont encore bondées de monde et on y voit comme en plein jour. Je m'émerveille devant les bruits, les lumières, pour une fille qui vient de la forêt, tout ça est époustouflant. Daïrim me prend la main : il y a vraiment beaucoup de monde. Je me laisse entrainer sans rien dire, profitant du spectacle qui s'offre à moi. J'ai l'impression que la nuit ne finira jamais, et pour la première fois, j'ai enfin l'impression d'avoir le contrôle. Nous longeons les magasins jusqu'à un petit café où la décoration est à couper le souffle. Les arbres, les oiseaux et même le ciel ont l'air réel. On entre et on s'assoit sur une banquette moelleuse, le long de la vitre qui donne sur l'agitation urbaine. Quelques animaux, crées magiquement, viennent nous voir, nous renifler. Nous les caressons puis ils repartent à travers le mur où se tient une forêt.

- Bien ! déclara Daïrim en attrapant le menu, au-dessus de nos têtes, tu prends quoi ?

- Je ne sais pas trop... Tout à l'air délicieux...

Maudite, tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant