Dimanche 14 avril, 1943
ThomasLa faim me tiraillait l'estomac encore plus que d'habitude, surement à cause de la fille à l'écharpe rouge qui était, je l'espérais bien, déjà en route pour venir me voir. Je prêtais beaucoup plus attention à mon ventre maintenant, sachant qu'il allait être comblé dans peu de temps, y ayant pensé toute la journée.
Il faisait extrêmement chaud. Le mot "extrêmement" n'était peut-être pas approprié pour réellement décrire le temps, mais pour une journée d'avril, la température était douce et confortable. Cela signifiait l'arrivée du temps plus chaud et signifiait aussi que nous n'allions plus mourir de froid dans le camp.
Je hâtais le pas, ma hache dans une main, ma veste dans l'autre, m'approchant de plus en plus de l'endroit où se trouvait le grillage. Quand je l'aperçu enfin, je remarquais que la fille à l'écharpe rouge était déjà là et mon cœur tambourina dans ma poitrine. Elle était de dos, assise par terre, appuyée sur la clôture, son écharpe rouge traînant à côté d'elle, sur les feuilles mortes.
Quand j'arrivai assez proche, puisqu'elle ne m'avait pas entendue, je pris la parole doucement, pour ne pas lui faire peur.
-Bonjour.
Dans un sursaut, elle se retourna en se levant précipitamment et je remarquais immédiatement les marques rouges sur son visage, montrant qu'elle avait pleurée il y a peu de temps. Ne sachant pas trop quoi dire, bouleversé de la voir dans cet état aussi vulnérable et fragile, je fus tenté de baisser les yeux, mais je lui fis un faible sourire en tachant de garder une attitude normale.
-Est-ce que ça va ?
Pour toute réponse, elle renifla en secoua la tête de gauche à droite et je fus surpris de sa sincérité. Nous ne nous connaissions pas, mais j'avais déjà l'impression de la découvrir un peu plus en la voyant ici et dans cet état. Je connaissais probablement ces plus grands secrets du moment : elle était ici, dans la forêt et pleurait en cachette à l'abri de tous, ou presque.
-Veux-tu en parler ? demandai-je prudemment.
Je voyais bien qu'elle tentait de cacher sa peine et qu'elle ne désirait pas en parler, me retrouvant même à être déçu. J'aurais aimé qu'elle se confie à moi et savoir ce qui se passait pour qu'elle soit dans cet état, mais après tout, comme je venais tout juste de penser, nous ne nous connaissions pas.
-J'ai amené de la nourriture, changea-t-elle de sujet de sa douce voix qui me fit encore autant chaud au cœur en l'entendant.
Elle sortit un sac de papier de son manteau et je me précipitais sur le grillage, affamé, ne réalisant pas que je devais avoir l'air d'un animal à réagir de la sorte devant elle. J'avais complètement oublié ma faim pendant un moment, mais elle était revenue bien assez vite au galop en voyant ce trésor sorti du manteau. Le sac ne pouvait passer dans les trous du grillage et je regardais, impatient, la fille à l'écharpe rouge assise parterre qui vidait le sac de nourriture. Il contenait une pomme, des petits pains ainsi qu'un muffin et la vue de ces aliments me fit littéralement perdre la tête.
Je m'installais moi aussi au sol en attendant qu'elle me passe la nourriture, avalant ma salive avec difficulté. Je n'avais jamais vu une pomme aussi belle, elle semblait tellement bonne et je me retenais pour me jeter sur le grillage, voulant passer mes bras dans les minces espaces et m'en emparer au plus vite.
La fille à l'écharpe rouge la pris et la plaça entre les tiges de métal. Je l'agrippais rapidement et, sans attendre, je croquais dedans à pleine dent, le goût sucré et acide explosant dans ma bouche. Je fermais les yeux et pris une seconde bouchée, me délectant des saveurs qui n'avaient pas été goutées par mes papilles depuis longtemps maintenant.
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La fille à l'écharpe rouge
Historical FictionUne fille avec une écharpe rouge, un garçon avec une feuille de papier et un crayon. Un grillage entre les deux pour les séparer mais, pourtant, ils réussiront à faire disparaître ce grillage, à faire tomber les murs, à faire taire jugements et inju...